Publié le: 2 septembre 2016

L’heure de la reprise des débats!

rentrée – Elle sera bouillante selon quatre parlementaires interrogés: Ignazio Cassis (PLR/TI), Céline Amaudruz (UDC/GE), Isabelle Moret (PLR/VD) et Jean-René Fournier (PDC/VS).

Certains s’en réjouissent vivement, de cette reprise. D’autres sentent la pression remonter. Nous avons interrogé quatre parlementaires latins qui s’impliquent pour les entreprises: Céline Amaudruz(UDC/GE), Isabelle Moret (PLR/VD), Ignazio Cassis (PLR/TI) et Jean-René Fournier (PDC/VS) nous ont confié leur vision sur les dossiers les plus névralgiques de cette session.

Journal des arts et métiers: Quels sont à vos yeux les trois sujets les plus importants de cette session?

n Ignazio Cassis: Prévoyance vieillesse, prévoyance vieillesse et prévoyance vieillesse. En tant que président de la Commission de la sécurité sociale, je serai fortement absorbé par la révision «Prévoyance vieillesse 2020» durant cette session. Je pense que l’on essaiera de trouver des compromis jusqu’à la dernière seconde. Mais la mise en œuvre de l’initiative «Contre l’immigration de masse» est bien entendu également de la plus haute importance pour la place économique suisse. Là aussi, les négociations dureront jusqu’au dernier moment. Le troisième objet qui me tient très à cœur, c’est le message FRI (formation, recherche et innovation). Il faut garantir les investissements nécessaires dans ce domaine, afin que la génération suivante soit préparée aux défis du marché de travail et de l’avenir. Comme le budget fédéral est serré, une solution équilibrée doit être trouvée.

n Céline Amaudruz: Le traitement de l’initiative «Sortir du nucléaire» constitue l’enjeu majeur. Il conviendra de garder à l’esprit que la Suisse est un pays industriel, exportateur, confronté au franc fort et à une vive concurrence mondiale. L’approvisionnement en énergie doit donc être fiable, suffisant et bon marché, afin de maintenir des conditions de production aussi favorables que possible. La préservation de la valeur de Polycom constitue un élément crucial concernant notre système de sécurité en permettant les communications des différents acteurs concernés. En parallèle aux catastrophes naturelles toujours possibles, nous devons prendre en compte la question du terrorisme et nous tenir prêts à faire face à un attentat potentiel d’envergure.

Pour le Conseil des Etats, la question de la Prévoyance vieillesse 2020 représente un enjeu majeur à l’heure où il est clair que la pérennité de notre système n’est pas garantie. Contrairement à ce que prétend la gauche, on ne saurait compter sur les migrants pour assurer les rentes, ceux-ci émargeant pour l’essentiel aux services sociaux. Nous ne pouvons donc compter que sur nous-mêmes.

n Isabelle Moret: La réforme de la prévoyance vieillesse est le gros dossier. Âge de référence de la retraite à 65 ans et garantie du niveau des rentes pour tous: voici mes deux objectifs pour Prévoyance 2020. Une réforme nécessaire pour pérenniser l’AVS, solidifier le 2e piller et permettre aux jeunes d’aujourd’hui de pouvoir eux aussi bénéficier d’une retraite sûre et stable. C’est le ciment de la cohésion intergénérationnelle!

La politique migratoire, ensuite. Mon objectif, c’est de limiter l’immigration tout en préservant les Bilatérales. Comment? En appliquant l’initiative au gré des besoins de l’économie, comme prévu dans le texte. Cette clause de sauvegarde serait activée, pour une durée limitée, à la fois canton par canton et branche par branche. Du coup, la libre circulation reste en vigueur, avec des exceptions limitées aux situations préoccupantes, comme un fort taux de chômage dans une branche ou un dumping salarial. Les avantages sont nombreux. Concrète, sans contingent, elle ne touche pas les branches qui manquent de main-d’œuvre comme l’informatique ou l’horlogerie. Elle permet une préférence nationale dans des cas spécifiques, et ce en demandant d’ouvrir certains postes, dans un premier temps, ­uniquement aux personnes inscrites au chômage. Maintenir un contexte stable avec notre grand voisin européen est d’autant plus crucial en cette période marquée par le franc fort. Un défi pour notre économie qui gagne un franc sur deux à l’exportation! C’est pourquoi il est nécessaire de prendre toutes les mesures pour atténuer le choc. Cela passe par une amélioration constante des conditions-cadres pour les entreprises, la diminution des charges bureaucratiques et l’acceptation de la RIE III.

n Jean-René Fournier: La mise sous toit du fond pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA), le programme de stabilisation des finances fédérales 2017-2019 et la Prévoyance vieillesse 2020 constituent, avec la révision de la loi sur les étrangers et ses répercussions sur les accords bilatéraux, les domaines les plus importants pour notre économie et nos PME inscrits à l’ordre du jour de la prochaine session parlementaire.

Notre économie et nos PME ont besoin d’un réseau routier performant et bien entretenu. Pour cela, davantage de moyens (au moins 60% du produit de l’impôt sur les huiles minérales) doivent être mis à disposition pour les routes afin de relever les défis actuels et futurs et régler les problèmes de trafic les plus urgent sur le réseau routier suisse. Nos PME ont besoin d’un Etat aux finances publiques équilibrées aujourd’hui et demain. Le programme de stabilisation des finances 2017-2019 qui a pour ambition d’économiser entre 800 millions et 1 milliard par an. Le principe qui soutient cette volonté d’économie est que l’Etat ne doit pas dépenser plus qu’il ne perçoit de recettes. Nous veillons à ce que l’effort d’économie se concentre essentiellement sur un frein aux dépenses.

Notre économie a aussi besoin d’assurances sociales pérennes et supportables financièrement. Assurer la pérennité des rentes AVS au moyen d’une règle de stabilisation visant à éviter son surendettement est une mesure soutenue par l’usam. Les financements complémentaires prévus dans la révision actuelle sont extrêmement douloureux pour l’économie. L’usam est prête à assumer sa part à ces charges supplémentaires, à la condition toutefois que l’AVS soit assainie de façon durable. Il est hors de question de la transformer en un puits sans fond.

Quel sujet vous tient tout particulièrement à cœur et pourquoi?

n Céline Amaudruz: Si vous le permettez, je reviendrais sur le premier et le dernier sujets évoqués à la réponse précédente. La sortie du nucléaire est un défi majeur susceptible de peser lourdement sur l’attractivité de la place industrielle suisse, la question de Prévoyance 2020 donnera une indication claire sur la façon dont nous envisageons la solidarité intergénérationnelle.

n Isabelle Moret: Sans aucun doute la révision de la prévoyance vieillesse. Un thème de société qui nous touche tous. Un jour ou l’autre, nous atteindrons cette étape de la vie. Mais cette révision a aussi un impact sur les personnes actives et la santé économique du pays. Par exemple, un relèvement trop important des cotisations salariales pourrait faire grimper le taux de chômage. Trouver des équilibres gagnants sans creuser le fond AVS est donc essentiel!

n Jean-René Fournier: Comme ancien responsable des finances cantonales et membre de la Commission des finances du Conseil des Etats, je suis particulièrement attentif au programme de stabilisation des finances 2017-2019. De la réussite de ce programme vont dépendre nos capacités et nos marges de manœuvres dans de nombreux domaines: mise en œuvre de la réforme fiscale des entreprises 3e volet, maintien d’une péréquation financière intercantonale performante et surtout garante du bon fonctionnement de notre Etat confédéral, développement de notre politique d’investissement et maintien d’une fiscalité et d’une parafiscalité supportable par les contribuables.

n Ignazio Cassis: La prévoyance vieillesse, car il s’agit ni plus ni moins que d’assurer les rentes pour nos enfants. Il est regrettable que certains ne prennent pas leur responsabilité et préfèrent recourir au principe de l’arrosoir à des fins opportunistes et populistes. La prévoyance vieillesse est LE dossier de politique interne qui est le plus proche des citoyens. Il faut le traiter très délicatement. Nous voulons maintenir le niveau actuel des rentes, démasquer les fausses promesses et les cadeaux empoisonnés des autres partis. Les défis financiers sont nombreux et il n’est pas étonnant que l’AVS ait enregistré un déficit de 579 millions de francs en 2015. Ce déficit de l’AVS s’élèvera à presque 8 milliards de francs annuels d’ici 2030. C’est la population plus jeune qui paye cette facture aujourd’hui et qui craint de ne pas toucher un jour ses propres rentes. Il est donc incontestablement nécessaire de réformer les deux piliers. Cependant, je ne vois aucune intention de la gauche à faire des compromis. Au lieu de réformer, le PS et les syndicats souhaitent augmenter l’AVS. C’est absurde et dangereux.

Comment vivez-vous ce glissement Ă  droite du Parlement?

n Ignazio Cassis: Les médias adorent ce terme de «glissement à droite», qu’ils ont inventé. Mais il est faux, puisque le Conseil des Etats n’a pas du tout glissé. Il est intéressant de constater que les mêmes médias ne parlent pas du «glissement à droite du peuple» qui a élu ce Parlement!

n Céline Amaudruz: Il est encore tôt pour tirer des conclusions, mais on constate déjà que lorsque les partis bourgeois s’entendent, ils arrivent à contrer la gauche, qui vit particulière­ment mal cette nouvelle situation. Le travail de l’UDC s’en trouve facilité, car la constitution de majorités s’effectue moins souvent à notre détriment mais à celui du Parti socialiste, chose qui me convient fort bien.

n Isabelle Moret: Très bien! Ce glissement à droite est l’expression de la volonté populaire. Du coup, il est naturel de mener notre politique, en particulier en faveur de l’emploi et de conditions-cadres facilitant le développement des entreprises, en particulier les PME, qui font déjà face aux défis du franc fort. L’emploi et la croissance, les clés d’une Suisse qui gagne!

n Jean-René Fournier: Je le vis très bien. Contrairement à ce que l’on lit trop souvent dans la presse, il n’y a pas un bloc «monoculturé» et unicellulaire à droite qui imposerait sa pensée unique à une gauche pluriculturelle et divisée. Ce glissement à droite a mis en évidence l’importance du centre droit qui exerce un effet de pondération responsable particulièrement bienvenu et pousse à une plus grande réflexion.

Interview: François Othenin-Girard

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