Publié le: 8 avril 2016

Le mot (suédois) de la prévention

SANTé PUBLIQUE – L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) s’obstine à maintenir l’interdiction de la vente du «snus» sur la base d’arguments idéologiques totalement infondés. Par ailleurs, le tabac à mâcher est également pris pour cible par les autorités.

Le snus (prononcez «sneusse») est une pâte de tabac humide façonnée en boulette ou conditionnée dans un petit sachet que l’on glisse entre la lèvre et la gencive. Il a du succès auprès de nombreux fumeurs comme alternative à la cigarette, plus nocive. Son succès est même tel qu’il suscite une chasse aux sorcières que l’OFSP veut désormais imposer aux chimistes cantonaux et à la douane. Alors que le Parlement s’apprête à discuter une levée de l’interdiction de la vente du snus, cette manœuvre semble pour le moins douteuse.

La Suède, un vent de liberté 
depuis deux siècles

Si la loi suisse proscrit la vente de snus sur sol helvétique depuis 1995, le consommateur peut néanmoins importer sa marchandise pour consommation personnelle. De plus, un nombre croissant de produits du tabac à mâcher, tolérés par la loi, ont fait leur apparition sur le marché. En 10 ans, les importations de produits du tabac à priser ou à mâcher sont passées de moins de 20 tonnes à plus de 135 tonnes. Celles en provenance de Suède, royaume du snus, se sont même multipliées par 50, passant d’à peine une tonne en 2006 à près de 50 tonnes en 2015. C’est notamment grâce à Internet, que les amateurs de snus trouvent leur bonheur et importent leur produit principalement de Suède, pays où le snus est en vente libre et où il est consommé depuis plus de deux siècles.

Pourtant, le Conseil fédéral ignore purement et simplement les changements dans le comportement des consommateurs au cours des dernières années et s’obstine à maintenir l’interdiction de la vente de snus sur la base d’arguments idéologiques et infondés. La croissance des importations de snus pour un usage personnel, dépoussiérant le snus de son image de produit marginal, témoigne clairement d’un intérêt des consommateurs pour ce produit et démontre la nécessité d’adapter la législation en conséquence.

Sans aucune justification

L’abrogation de son interdiction est actuellement éminemment actuelle puisqu’elle sera discutée au Parlement dans le cadre de la nouvelle loi sur les produits du tabac. Or, parallèlement à la procédure législative en cours, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) veut édicter une directive stipulant un renforcement de l’interdiction de vente de tabac à mâcher jugé trop semblable au snus à l’intention des chimistes cantonaux et de la douane. En plus, d’interdire le snus sans aucune justification de santé publique, de discriminer le commerce suisse, de bafouer le principe de proportionnalité, voilà que le Conseil fédéral laisse un Office fédéral porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs…

Notre Administration fédérale semble oublier que le snus est un produit du tabac bien moins nocif que la cigarette, sans parler du fait qu’il ne provoque pas de fumée passive. Durant ces dernières années, plusieurs études scientifiques ont démontré que la consommation de tabac sans fumée à basse teneur en nitrosamine, connu en Suède sous le nom de snus, présente un risque sanitaire d’au moins 90% inférieur à celui de la consommation de cigarettes conventionnelles. D’ailleurs la Suède, où la vente de snus est permise et où une personne sur quatre consomme du snus, connait le taux de fumeurs de loin le plus bas en Europe (11% selon Eurobarometer).

Contrôler l’âge ou interdire?

Le facteur économique n’est pas à sous-estimer. L’interdiction actuelle d’un tel produit discrimine inutilement toute la chaine de distribution domestique, des fabricants, en passant par les grossistes et jusqu’aux détaillants, et prive des milliers de consommateurs adultes de la possibilité d’acheter du snus en Suisse. Le snus doit être considéré comme une alternative légale aux autres produits du tabac sans fumée disponibles dans le commerce suisse. L’abolition de son interdiction permettrait de plus un contrôle efficace de l’âge lors de l’achat de snus et assurerait ainsi une meilleure protection des mineurs.

«La Suède connait le taux de fumeurs le plus bas en Europe. 
et de loin!»

Le fait que le Conseil fédéral et l’OFSP souhaitent maintenir l’interdiction de la commercialisation de ce produit est idéologiquement motivé et ne peut pas se justifier par des motifs de protection de la santé publique. L’interdiction de commercialiser le snus doit être levée en Suisse. Alors qu’une initiative parlementaire allant dans ce sens faisait l’unanimité au sein de la Commission de santé du Conseil national en 2014 et que le sujet est à l’ordre du jour dans le cadre de la nouvelle loi sur les produits du tabac, un raidissement dans l’application de la législation actuelle, bientôt obsolète, semble pour le moins inopportun.

Hélène Noirjean, usam

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