Publié le: 4 novembre 2016

Libre et majeur, souvent vacciné!

PRéVENTION – La proposition d’un groupe de députés neuchâtelois de lancer un impôt fédéral sur le sucre n’est pas seulement inutile. Elle démontre aussi un irrespect total envers le consommateur adulte, doté de bon sens et responsable de son comportement.

S’inspirant des domaines de l’alcool et du tabac, des députés neuchâtelois proposent – sous la forme d’un décret au Parlement cantonal – d’introduire une taxe sur le sucre au niveau fédéral. Cette proposition devra d’abord être traitée en commission au plan cantonal avant d’être lancée au plénum. Elle attise un débat de longue date sur l’arbitraire, l’inefficacité et surtout l’inutilité d’une telle taxe.

Apprendre des erreurs des autres

En Europe, la Hongrie, la Finlande et la France prélèvent déjà un impôt sur la graisse ou le sucre. Les recettes fiscales font certes le bonheur des ministres des finances. Toutefois, elles n’ont pas eu l’effet souhaité sur les habitudes de consommation. Le Danemark a d’ailleurs abandonné sa taxe sur le sucre, sur les soft drinks, datant de 1930, ainsi que celle sur les graisses, cela 15 mois à peine après l’avoir introduite. Elles ont démontré n’avoir aucun effect bénéfique mesurable sur la santé. Par contre, elles ont causé de sévère dégâts économiques.

La taxe sur le sucre a en effet conduit à une augmentation des prix pour les consommateurs, ce qui les a poussés à traverser les frontières à la recherche de produits moins onéreux en Suède ou en Allemagne. Outre un tourisme d’achat grandissant, la taxe a incité les entreprises à délocaliser une partie de leur production hors du territoire danois et causé ainsi des pertes d’emplois. De plus, l’administration a estimé une perte de près de 40 millions d’euros de recettes TVA due à la vente illégale de soft drinks.

L’éducation et non l’imposition

Dans ce contexte, ne serait-il pas préférable de valoriser la responsabilité personnelle des consommateurs, plutôt que de stigmatiser certains produits? Un sondage «Alimentation et activité physique» réalisé par l’agence GFS à Berne a démontré que dans la lutte contre le surpoids, la responsabilité individuelle prime clairement sur les mesures étatiques. Les citoyennes et citoyens suisses estiment être en mesure de prendre leurs décisions de consommation en toute autonomie. «L’enseignement du sport et la diététique, par exemple, devraient occuper davantage de place dans le programme scolaire, selon le conseiller national Lorenz Hess (BE/PBD). Pourtant, ces enseignements sont souvent biffés. C’est regrettable, car on manque ainsi une chance unique de transmettre aux enfants le goût du mouvement et les connaissances de base en matière d’alimentation.»

Vers une démarche volontaire

En été, l’administration fédérale a pris contact avec l’industrie alimentaire afin de lui proposer la signature d’un accord soi-disant «volontaire». Celui-ci stipule que l’entreprise s’engage «volontairement» à vérifier le taux de sucre dans ses denrées alimentaire et à mettre en place un plan en vue de diminuer le taux de sucre ajouté dans ses produits.

Chez les boulangers confiseurs, une telle proposition suscite tout sauf de l’enthousiasme. «Au cours des dernières années, nous avons déjà été ciblé par diverses attaques sous la forme de nouvelles lois et simultanément confronté à une administration qui agit sous le faux prétexte de faire de la prévention, lance Urs Wellauer, directeur élu de l’Association suisse des boulangers confiseurs (SBC). En plus, le législateur essaie de nous décourager et de dresser face à nous des obstacles inutiles et dommageables pour notre activité. Après avoir échoué dans le cadre de la loi sur la prévention, il essaie maintenant de revenir à la charge avec des mesures de remplacement.» Urs Wellauer se souvient lui aussi de l’exemple du Danemark qui a fait marche arrière avec son impôt sur la graisse. «Cela démontre leur incapacité à remplacer ces produits. Ces atteintes extérieures sont complètement injustifiées en regard du style de vie que nous adoptons.»

Certes, le sucre et mauvais en trop grosse quantité est dommageable pour la santé. Mais chacun d’entre nous peut en gérer sa consommation. Il faut donc enfin mettre un terme à la mise sous tutelle des adultes majeurs et vaccinés en inventant des régulations paternalistes inutiles. Le consommateur n’a pas besoin d’être protégé contre lui-même, car, fort heureusement, il se trouve être libre, majeur et responsable.

Hélène Noirjean, responsable aménagement du territoire, agriculture et commerce.

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