Publié le: 3 juillet 2020

Bonnes nouvelles de Champéry!

jram – Après ces mois difficiles, le plaisir de se retrouver en altitude pour de beaux échanges. Parmi les invités, le conseiller fédéral Alain Berset, de nombreux parlementaires de tous bords, des responsables d’entreprises.

Les Journées romandes des arts et métiers (JRAM) à Champéry ont eu lieu les jeudi 25 et vendredi 26 juin, dans une sorte d’allégresse de se retrouver. Voici quelques extraits de ces beaux échanges.

Allocution d’ouverture

André Berdoz, vice-président usam.

«Je vous souhaite la bienvenue à Champéry, nous sortons d’une crise qui a secoué nos habitudes. Cette édition est extraordinaire parce qu’elle a lieu. Merci à tous de respecter les mesures de protection. Je vous souhaite une belle journée!»

«Les défis de la prévoyance professionnelle» par Alain Berset, conseiller fédéral et invité d’honneur.

«C’est un grand plaisir de revenir ici. Je suis venu comme parlementaire, puis comme conseiller fédéral en 2013. En revanche, c’est la première fois que je me désinfecte les mains à la poire! Gustave Flaubert a dit: «On arrive à faire de belles choses à force de patience et de longueur de temps.» De la patience, il en faut aussi pour réformer l’AVS et la prévoyance, défi majeur pour la Suisse et l’économie. Des assurances bien financées, solides, fiables sont synonymes de sécurité et de prospérité économique – ce dont nous avons besoin. A la fin, il faudra une majorité au Parlement et lors de la votation populaire.»

«L’élément financement est important: le très fort ralentissement économique actuel fait suite à une mauvaise année boursière. Nous ne sommes pas une île. Nous avons évité un lockdown et globalement notre économie a continué à fonctionner. L’usam a montré que la productivité s’était même améliorée: il y a donc aussi des éléments positifs. Pour le 2e pilier, nous avons un accord partiel auquel l’usam n’adhère pas. Nous travaillons beaucoup là-dessus et je vous propose d’entrer en dialogue. Menons cette discussion ensemble, je suis naturellement ouvert!»

Débat: «Prévoyons autrement!»

SB: Samuel Bendahan, conseiller national (PS/VD); JG: Johanna Gapany, conseillère aux Etats (PLR/FR);

FR: Fabio Regazzi, conseiller national (PDC/TI); HUB: Hans-Ulrich Bigler, directeur de l’usam.

JG: «Tous ici, nous avons un point commun. Nous avons des doutes sur le système de retraite. Si nous voulons continuer avec la solidarité intergénérationnelle et les trois piliers, nous devons redonner la confiance aux jeunes générations.»

FR: «Le défi est énorme et nous avons connu des échecs sur ce thème. Le projet actuel mélange la donne des trois piliers. C’est un aspect critiquable. Le projet de l’usam va dans la bonne direction. On peut le corriger, mais il ne faut pas abandonner le principe des trois piliers.»

HUB: «Nous proposons une autre solution. L’urgence est énorme, on ne doit pas accepter le fait que les jeunes financent les rentes pour les vieux. Les trois piliers sont menacés si on commence de les mélanger.»

JG: «Il est important de travailler les trois piliers ensemble et de ne pas les confronter. On a certaines lacunes, le premier pilier de toute urgence puis le deuxième pilier également. Et pour le 3e pilier, nous devrons sensibiliser la population. Donnons les moyens de bien vivre car nous vivrons plus longtemps.»

SB: «Qu’est-ce que cela signifie de s’attacher à un système, celui trois piliers, si d’autres solutions qui améliorent le système sont meilleures? Ce n’est pas une religion. Soyons créatifs. Si une autre solution est possible, pourquoi pas?»

JG: «L’exotisme dans la prévoyance professionnelle, cela ne donne jamais rien de bon. Le système de manière générale n’est pas mauvais, mais le marché du travail a changé et il faut adapter les deux premiers piliers, sans tout cham­bouler.»

FR: «Réalisme, c’est le mot clé. On a cherché à contenter tout le monde. On risque de ne satisfaire personne. Il faut donc baisser le taux de conversion. On peut le laisser à 6%. La réforme proposée coûte 3 milliards.»

HUB: «Notre proposition date d’il y a un an. Après la consultation, nous avons trouvé un compromis. Nous entrons en matière sur la déduction de coordination. Il faut tenir compte des bas salaires. Dans la proposition des syndicats et de l’Union patronale, un point est inacceptable: financer avec une différence de cotisation. Cela se traduirait par un problème de compétitivité. Avec notre solution, cela coûte environ deux milliards.»

«La valeur des PME, en temps de pandémie!» AK: Alexa Krattinger, responsable de la politique fiscale et financière, usam; HS: Henrique Schneider, directeur adjoint de l’usam; JHB: Jean-Hugues Busslinger, Centre patronal.

AK: «Laurence Parisod avait presque enflammé la scène avec sa PME attitude ici il y a deux ans. La voix des PME doit se faire entendre à Berne. Voici les tendances où les PME se démarquent: elles croissent plus, offrent deux tiers des emplois et 70% des apprentissages. Les PME valorisent les collaborateurs seniors et 32% des dirigeants sont des femmes. Cette tendance sera plus forte à l’avenir. Un tiers des PME sont actives dans le commerce extérieur. Pour la place financière, elles représentent plus de 90% et sont des petites et moyennes entreprises. Quel est le défi démographique? Continuer à engager, à former et à innover!»

«Durant cette crise sanitaire, l’usam a compté sur une équipe de choc. Et obtenu les intérêts à zéro pourcent. Et ce fut ensuite le bras de fer avec la grande distribution. Nous avons eu beaucoup d’échanges, des conférences téléphoniques de trente personnes. Puis, nous avons lancé le smart restart, pour donner un signal de retour à la normale. Le concept a obtenu l’aval du Parlement. Puis un programme d’action à trois piliers: alléger les charges sur les entreprises. Renforcer les conditions-cadres – et remédier au dommage. Enfin, le renoncement systématique à de nouvelles charges pour les entreprises. Dernier volet, la revitalisation de l’économie: politique budgétaire saine, ne pas reporter les charges sur les prochaines générations.»

HS: «Je veux partager avec vous deux histoires cachées. Deux aspects ont surgi durant cette crise. D’abord sur le cautionnement. En mars, on pensait que 80 000 ou 100 000 entreprises seraient touchées. Nous avons parlé avec le Département des finances à plusieurs niveaux. Une aide était acceptable mais nous ne voulions pas de casco concrète, mais une aide remboursable seulement pour les liquidités. Au début, la Confédération voulait une aide basée sur le bénéfice. L’usam s’y est opposée, pour nous il suffisait de montrer que la PME était touchée par les mesures du Conseil fédéral.»

«La deuxième histoire cachée, c’est l’augmentation nette de la productivité durant cette période, de 8% à 20% au premier semestre en 2020. Ce constat est sidérant, étonnant, stupéfiant: c’est une explosion de la productivité comme nous n’en avons jamais connue!

Pourquoi? Les économistes n’ont pas de réponse. A court terme, c’est dû à la déréglementation. La plupart des administrations ont proposé plus de souplesse. Les entreprises se sont aussi montrées plus ouvertes face aux nouvelles technologies. Au final, l’usam estime que l’on peut apprendre de tout cela: en revitalisant le marché intérieur avec un droit du travail assoupli et une réduction des coûts réglementaires. Et en poursuivant la numérisation. Le télétravail n’est pas un monstre, c’est une aide qui nous permettra d’augmenter notre productivité. Cela dit, notre expérience porte sur deux mois.»

JHB: «Quelques enseignements pour les futures crises ou de prochaines vagues. Quelques constats politiques: parmi les forces, notre tissu économique est résistant, résilient, nos atouts sont la formation professionnelle, l’innovation, un marché du travail souple et ouvert, qu’il faut éviter de scléroser. Et des conditions-cadres attractives, structures souples, locales, réactives. Côté faiblesses, nous étions pour une aide d’urgence et non pour une compensation intégrale du chiffre d’affaires. On ne peut pas attendre cela d’une autorité! Je souligne l’importance d’avoir de bons rapports avec les autorités cantonales, ce ne fut pas le cas dans le canton de Vaud Le risque, c’est qu’une fois étatisé, il est difficile d’en sortir. Il faut remettre l’Etat dans son rôle de subsidiarité. J’ai observé durant cette période, l’affaiblissement de la responsabilité individuelle, l’envie d’avoir des règles de plus en plus précises: tout cela évite de se prendre en main. On l’a vu particulièrement en Suisse romande. Il y a aussi la tentation de se prémunir contre tous les risques. On peut toujours avoir ceinture et bretelle, mais ce n’est pas comme cela que l’économie progresse!»

Propos recueillis par

François Othenin-Girard

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