Publié le: 9 février 2018

Dans la jungle des commissions

LOBBYISME proliférant – Une motion de Hans-Ulrich Bigler, directeur de l’usam et conseiller national (PLR/ZH), propose de supprimer les commissions qui ne sont pas nécessaires.

En Suisse, la politique n’est pas seule­ment politisée parmi les conseillers fédéraux, mais aussi au sein des quelque 150 commissions extraparlementaires. Une motion du directeur de l’usam, Hans-Ulrich Bigler, demande s’il est possible de mettre un peu d’ordre dans cette jungle. Avons-nous vraiment besoin de 150 groupes de discussion? Certaines commissions extraparlementaires font autorité, comme la Commission fédérale de l’électricité (ElCom), la Commission de la concurrence (Comco). Leurs tâches sont claires, elles disposent de ressources qui leur sont allouées et elles sont également 
responsables des résultats de leur 
travail. Ensuite, il y a les soi-disant 
organes directeurs, constitués en commission extraparlementaire, mais à la tête d’une entité fédérale, comme par exemple l’organe de direction de l’AVS. Toutefois, la grande majorité des commissions sont des «organes consultatifs». Ils traitent chacun d’un sujet spécifique. La Commission de l’armement, la Commission fédérale contre le racisme (CFR) et la Commission fédérale de la consommation (CFC) en sont des exemples. En théorie, ces comités conseillent l’administration fédérale dans son processus décisionnel.

Instrument de légitimation

En réalité, la plupart des commissions extraparlementaires servent de nos jours de canaux de lobbying pour les associations et autres parties intéressées. Les commissions permettent aux demandes individuelles d’être 
légitimées par le statut «traité en commission». De plus, la Confédération compense la participation à ces comités. De cette façon, la Berne fédérale paie même pour être lobbyisée.

Le meilleur exemple? La Commission de la politique économique du Secrétariat d’État à l’économie (Seco). Y participent les syndicats, les associations de protection des consommateurs et les associations d’employeurs, y compris l’usam. Ce sont tous des groupes de pression, qui font part de leurs préoccupations à cette Commission. Il ne s’agit donc pas de conseiller la Confédération, mais bien d’y affirmer ses propres intérêts.

Cette prolifération devient encore plus extrême lorsque l’on considère les 23 membres de la Commission consultative sur la coopération internationale au développement. Dans ce groupe, au sein duquel il est notamment question de la répartition des fonds liés au développement, on trouve dans le rôle de «conseillers» une vaste présence des organisations de développement. Ses membres sont donc avant tout les bénéficiaires de ces fonds. Il en va de même pour la Commission fédérale du cinéma (CFC) dont les rangs sont bien garnis. Là aussi, la double approche est évidente: les bénéficiaires des subventions «conseillent» le fournisseur de la subvention.

La motion demande que «le nombre de commissions extraparlementaires soit réduit d’un tiers par rapport à ce qui était nécessaire.» Le tollé des lobbyistes concernés a été à la hauteur des enjeux. Bien que la motion ait été adoptée par le Conseil national, elle a ensuite été rejetée par le Conseil des États. Mais effet il y a eu… La Commission économique du Conseil des États souhaite désormais se pencher sur la question. Elle entend passer en revue tous les groupes de discussion payés par la Confédération, un à un, et vérifier s’ils sont (encore) nécessaires. Cela devrait être fait en 2018. Le Conseil fédéral a déjà réagi. Bien entendu, l’échange d’informations a du bon et l’administration fédérale a besoin d’un point de vue extérieur. Mais certainement pas de 150 groupes de pression et de discussion payés par la Confédération. Quant aux discussions, il y en a pléthore…SC

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