Publié le: 10 novembre 2017

Désolé, le Conseil fédéral se contredit

VIGNETTE ÉLECTRONIQUE – Si l’usam rejette toute gestion fiscale de contrôle du trafic, elle est particulièrement sceptique envers l’introduction de la vignette autoroutière électronique. Elle ouvrirait la voie au très controversé projet de «mobility pricing».

Le Conseil fédéral veut la «e-vignette», mais son argumentation est pour le moins contradictoire. Dans le paragraphe sur les mesures rejetées de son rapport explicatif, il souligne explicitement que «en raison de son montant peu élevé et de son caractère forfaitaire, la redevance pour l’utilisation des routes nationales ne se prête pas à la poursuite d’objectifs de gestion du trafic». Or, en même temps, il poursuit ses tentatives pour imposer le «mobility pricing», alias péage urbain.

La consultation de la révision totale de la loi sur la vignette autoroutière (LVA) vient de s’achever. Le projet du Conseil fédéral est d’abandonner la vignette autocollante, lancée en 1985, pour adopter la vignette électronique qui serait téléchargeable par Internet. Une fois le montant de la redevance payé, la plaque d’immatriculation serait mémorisée dans une base de données pour la durée de la validité correspondante. Une procédure simplifiée serait proposée aux détenteurs indigènes via les services cantonaux des automobiles. Le projet reconduit le paiement de la redevance sous la forme d’un forfait annuel. Quant aux utilisateurs qui ne se seraient pas acquittés de la redevance, ils seraient amendés aussitôt l’infraction constatée.

Intention cachée

A première vue, la révision de la LVA est moderne, surfant sur la numérisation de l’information. Mais à y regarder de plus près, on devine qu’elle prépare le terrain au projet caché de «mobility pricing». En effet, la vignette électronique offrirait toutes les bases technologiques aux péages urbains et routiers ainsi qu’une mise en application d’autant plus facile. Voilà un «modernisme» que l’usam rejette.

En 2015 déjà, le Conseil fédéral a présenté un concept de tarification de la mobilité et, en 2016 et 2017, a publié deux rapports intitulés («Le Conseil fédéral demande une analyse d’efficacité cantonale pour ­approfondir la question de la tarification de la mobilité»). Selon lui, les usagers de la route empruntant souvent des tracés fréquentés aux heures d’affluence devraient payer davantage… Et pour mettre en application le concept de «mobility ­pricing», il faudrait une armada d’installations spéciales de contrôle, autrement dit des investissements colossaux.

«Dans les coulisses, ON HUME un PROJET DE MOBILITÉ TARIFÉe bien caché.»

Même si le projet prévoit une réduction des coûts d’exploitation, des investissements importants s’appliqueraient déjà à la vignette électronique, notamment par la mise en place de plus de 50 sites de contrôle répartis sur le réseau autoroutier. Toutefois, sur l’ensemble des plaques d’immatriculation scannées, on prévoit qu’environ 10% seront non-identifiables sur vidéo. Or vu les millions de véhicules transitant chaque année sur les autoroutes, ce taux impliquerait d’importants effectifs en personnel pour procéder aux vérifications ultérieures.

Protection des données?

Le texte de loi proposé délègue de grandes compétences aux Conseil fédéral et le formule même ouverte­ment. Par exemple, en ce qui concerne l’enregistrement des plaques d’immatriculation, donc par extension du détenteur du véhicule… Ce qui soulève la question sensible de la récolte des données et de leur utilisation. Pour sa part, l’usam rejette cette mesure de gestion fiscale du trafic et ne voit aucune nécessité d’agir en ce sens. Le système de vignettes autocollantes fonctionne parfaitement et leur contrôle aussi.

Dieter Kläy, 
mobilité, usam

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