Publié le: 4 septembre 2020

En attendant la fin des gros monstres

NUMÉRIQUE – De la même manière qu’une monnaie a de la valeur parce qu’elle est acceptée, la valorisation des géants du secteur est fonction de la tolérance de leurs utilisateurs. Cela pourrait changer. Réflexions de Mikael Huber, responsable de ce thème à l’usam.

Le numérique a le vent en poupe. Certains parlent d’un défi à saisir – à mon avis à tort, parce qu’à l’avenir, le vrai défi sera plutôt de vouloir s’en passer! Une fois de plus, l’avancée technologique révèle à quel point nous pouvons rester attachés à des fonctionnements analogues, stables et rassurants.

«comme l’argent dans notre poche, les gafam n’ont de valeur que parce qu’elles sont acceptées par les utilisateurs.»

Non, le numérique est une opportunité évidente qui transformera avant tout ces fonctionnements stables pour les accélérer et les rendre moins chronophages. Des gains de compétitivité sont à la porte, et surtout moins de perte de temps en paperasserie. La route est ainsi toute tracée pour passer à une phase d’accélération avec les inévitables dangers à éviter.

Cinq puissants monopoleurs

Mais qu’en est-il aujourd’hui? Il est souvent fait référence – à outrance d’ailleurs – aux NATU (Netflix, Airbnb, Tesla, Uber) et surtout aux GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft), ces cinq titans qui se partagent le marché du numérique. La question se pose donc: où se situent les PME dans tout cette transformation digitale? Comment feront-elles face à ces plate-formes numériques géantes?

D’après Hans-Ulrich Bigler et Henrique Schneider, directeur et directeur adjoint de l’usam et co-auteurs de «Wert der KMU» (malheureusement pas encore disponible en français, nda) – plus de PME, c’est aussi plus de diversité, ce qui conduit à plus de création de richesses, mais c’est aussi plus de division du travail et donc plus de procédés et d’interfaces. Or la numérisation est un vecteur de simplification des procédés et interfaces. Cela devrait donc favoriser, pour des PME si diverses, un accès à ce marché numérique. En théorie!

Imposé au consommateur

Pour l’instant, le grand problème du numérique consiste en l’accaparation monopolistique de quelques plate-formes, notamment par les GAFAM. Ces géants du numérique, pour être efficaces, supposent un maximum d’interconnexions et donc d’utilisateurs.

Le principe devient tel qu’il s’impose aux consommateurs. Ce que je choisis comme média social correspond non pas à ce qui me convient exactement, mais parce que c’est le plus répandu, c’est-à-dire l’accep­tation du plus grand nombre. C’est le même problème que la monnaie. L’argent que nous avons dans notre poche n’a pas de valeur intrinsèque, mais seulement une valeur du fait qu’il est accepté par tous et imposé par la loi comme valeur. Les GAFAM jouent des mêmes avantages: leur valeur réside dans le fait que leur utilisation est acceptée par le plus grand nombre.

Le prochain pas devrait être de concevoir des conditions-cadres qui évitent la prédation de ces géants et favorisent les compatibilités mutuelles des interfaces du numérique.

Si la situation actuelle semble avoir conduit à la transformation numérique avec une sorte de concentration monopolistique grâce à une agrégation des processus par le numérique, il y a fort à parier que le numérique va pouvoir absorber une complexification croissante des processus.

Les monopoles vont alors être défiés par les possibilités numériques. A leur tour, ces dernières permettront l’intégration croissante d’autres services développés par les PME. Avec plus de diversité, il y aura encore plus de richesses à partager.

Mikael Huber, usam

Les plus consultés