Publié le: 7 septembre 2018

En visite chez Dudu à Neuche

balade – L’exposition présentée à Neuchâtel montre la manière dont l’écrivain Friedrich Dürrenmatt a réagi 
et agi face aux évènements politiques et changements sociétaux de 1968. Suggestions sur la manière de s’y rendre.

Deux manières de se rendre chez Friedrich Dürrenmatt, c’est-à-dire dans le musée qui honore sa mémoire. La première est frontale, comme il sied à un auteur qui empoignait les problématiques et les situations. Depuis la Gare de Neuchâtel, attaquer en grimpant. Emprunter la passerelle qui l’enjambe, ou le tunnel situé un peu plus loin. Franchir le Faubourg de la Gare. Enjamber quelques rampes d’escalier jusqu’à la Rue du Rocher, qu’il faut suivre quelques centaines de mètres. Tournez à droite dès que vous apercevrez la Chapelle de l’Ermitage et suivez le Chemin du Pertuis-du-Sault. Au croisement, prenez ensuite à droite, Rue Charles-Knapp.

Vous arrivez au Jardin botanique de Neuchâtel. Suivant la température intérieure ou extérieure du randonneur, une halte est possible, voire souhaitable pour reprendre ses esprits. Pour la suite de la visite, poursuivez quelques encâblures le long de Charles-Knapp.

Prenez le funiculaire

Une variante consiste à démarrer à la place Pury au pied de la statue du grand homme qui semble exhorter ses concitoyens. Suivez son regard et avancez-vous le long des rues de la vieille ville en remontant l’ancien cours du Seyon – dont on voit le tracé sur les pavés. S’arrêter pour croquer quelques pavés du Château chez Walder, la très neuchâteloise confiserie, boire une chope au Cardinal en passant, rue des Moulins. Poursuivez jusqu’à ce que la rue fasse un coude et vous apercevrez le funiculaire du Plan. Comme dans un jeu de l’oie, ce petit véhicule jaune vous emmènera directement jusqu’à la rue Charles-Knapp (1855-1921).

Ce Monsieur Charles-Knapp

À moins que l’intérêt pour Charles Knapp (1855-1921) vous incite à grimper sur la colline située en face du funiculaire. Ce serait un joli détour, nul doute qu’il vaudrait la peine. Car c’est là que se trouve le Musée d’ethnographie, précisément sur cette colline qui prolonge la 
superbe Collégiale et le Château (cantonal). Le musée nous apprend qu’en 1903, «Charles Knapp fut nommé conservateur du Musée ethnographique de la ville de Neuchâtel. L’année suivante, il dirigeait le transfert des collections dans la villa, léguée dans ce but à la ville par James Ferdinand de Pury».

Cela vaut bien un nom de rue, puisque «en juin 1914, le 1er Congrès international d’ethnographie et d’ethnologie se réunit à Neuchâtel. Fort de sa compétence à compléter les collections du musée, Charles Knapp peut à cette occasion montrer plus de 10 000 objets.»

Enfin arrivé chez Dürrenmatt

Chez «Dudu», cédons un instant la parole au curateur de cette exposition: «2018 marque le 50e anniversaire de Mai 68 et du Printemps de Prague. Le vent de contestation qui a soufflé dans le monde entier, de Paris à San Francisco en passant par Tokyo, mais aussi par la Suisse, a marqué en profondeur la société et les arts jusqu’à aujourd’hui. L’exposition présente la manière dont Friedrich Dürrenmatt, alors écrivain internationalement reconnu de 47 ans, a réagi et agi face à ces évènements politiques et changements sociétaux majeurs.»

L’auteur avait organisé au Théâtre de Bâle une manifestation contre la répression du Printemps de Prague, à laquelle des écrivains renommés tels que Peter Bichsel, Max Frisch ou Günter Grass avaient pris part.

Quel regard Friedrich Dürrenmatt portait-il sur les révoltes d’étudiants? Si ces thèmes vous parlent, ne manquez pas de découvrir dans cette expo son légendaire sens de la provocation légendaire. Comment? En offrant le Grand Prix littéraire du canton de Berne 1969, qu’il venait de gagner, à trois anti-conformistes. Et aussi, de manière plus surprenante, qu’il s’était lié d’amitié avec «Frozen Tino», le fondateur des Hells Angels suisses. Petit coucou en passant à nos amis motards!

Il y a aussi la vue

Sinon, allez voir le paysage, car il est unique. Un panorama unique sur la ville de Neuchâtel, le Plateau, les Alpes, si le temps s’y prête. Sa maison plantée dans la forêt est un unicum, petit coup de griffe génial. D’où peut-être cette citation qu’on lui attribue, à tort et un peu à travers aussi. Comme si les Neuchâtelois n’avaient envie de garder que ce souvenir de lui. Citation en substance, bien sûr: «Neuchâtel, mes amis, n’est pas cette belle jeune fille qui se regarde dans le miroir qu’est le lac. C’est une atroce vieille femme.» Peut-être voulait-il dire qu’elle était atrocement conservatrice, figée dans ses habitudes et tournant le dos au beau paysage qui s’offre à elle. Mais dans ce cas pourquoi regarderait-elle la montagne, si ce n’est pour jeter un regard de 
reproche – voir de dédain – vers le Haut de ce si joli canton? On rigole…

François Othenin-Girard

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