Publié le: 5 mars 2021

«Et si l’on réduisait le salaire des fonctionnaires?»

TÉMOIGNAGE – Bruno Balmelli est à la tête de cinq magasins de sports à Lugano, Balmelli Sport. Ses propos, recueillis début février, sont accablants.

Au Tessin, les commerces de détail souffrent d’asphyxie. A la tête de Balmelli Sport à Lugano, Bruno Balmelli possède cinq magasins. Sur les 40 employés que compte cette maison, seuls 5 travaillent et ce sont les membres de sa famille. «Actuellement, toutes les ventes sont bloquées, les stocks sont pleins à ras bord et la seule chose que nous pouvons faire, c’est les services sur les skis et les vélos.»

Son témoignage est accablant: «Nous sommes écrasés par les frais, il faut payer les salaires – nous versons la différence de 20% (RHT: 80%) à nos employés et je dois me contenter d’un salaire vraiment minimal! Il y a les loyers des magasins à payer, par endroit jusqu’à 20 000 francs par mois. Nous avons réussi à contenir nos pertes en 2020 à 100 000 francs mais cette année, les chutes de chiffre d’affaires s’élèvent déjà à –70% dans certaines filiales.»

Autour de lui, les petits commerçants souffrent atrocement. «On voit les maladies psychiques en forte recrudescence, beaucoup d’entre eux vont s’arrêter, cela ne peut pas continuer comme ça, c’est de la folie complète et la qualité de vie en Suisse est menacée. Comme si cela ne suffisait pas, depuis quelques jours, les frontières sont ouvertes et le tourisme de consommation a repris de plus belle.»

Un problème structurel

Pour Bruno Balmelli, le problème est structurel: «Nous vendons des chaussures suisses dans notre magasin. Les mêmes chaussures sont vendues en Italie avec une réduction de 20% et aux Etats-Unis à 50% du prix. Nous devons réfléchir à ce que nous faisons dans ce pays, car à cela s’ajoute la TVA et tout le reste. Je paye 900 francs de caisse maladie alors qu’un salarié de l’autre côté de la frontière gagne 1100 euros par mois!

Une vague de faillites annoncées

L’avenir est bouché: «On nous a dit que le nombre de faillites en 2020 était en baisse. Mais cette année, je pense qu’elles risquent d’augmenter de 50% à 60%, c’est ce que j’observe autour de moi. Nous autres commerçants avons dû investir pour nous adapter aux nouvelles règles en vigueur mais c’est comme si nous avions jeté notre argent par les fenêtres puisque toute l’économie est à nouveau bloquée!»

Travailler la planche Ă  billets

Que faire? «Je pense que nous devrons travailler à plus long terme sur la valeur du franc. Lorsque l’euro a chuté, la BNS l’a soutenu à 1,20 pour 1 franc suisse. Maintenant, il faut descendre ce rapport à 1,50 et faire tourner la planche à billet parce que la qualité de vie en Suisse est menacée! Je ne vois pas d’autres solutions.»

Augmentation des impĂ´ts

Bruno Balmelli ne perd pas le sourire: «On devrait réduire de moitié les salaires des fonctionnaires à Berne, juste pour qu’ils se rendent compte de ce que cela fait, de devoir tourner avec 1200 francs sur deux mois. Nous continuons à payer nos impôts et que ces derniers risquent fort d’augmenter l’année prochaine!» Une réouverture semblait possible lors du bouclage de cette édition.

François Othenin-Girard

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