Publié le: 1 juin 2018

Evitons le croc-en-jambe!

initiative monnaie pleine – L’usam a rejeté à l’unanimité cette proposition votée 
le 10 juin prochain. Du point de vue du parlement de l’association, le texte met en danger 
le fonctionnement du système de crédit et tend sérieusement à déstabiliser l’économie.

Rien que son intitulé en dit plutôt long! Le 10 juin, nous voterons l’initiative populaire «Pour une monnaie à l’abri des crises: émission monétaire uniquement par la Banque nationale! (Initiative Monnaie pleine)». Or si l’argent est un moyen de paiement, il ne peut pas être «plein» ou «vide» en soi. Sa valeur tient au fait qu’il est accepté. Plus il peut être utilisé largement, mieux l’économie se porte. Or c’est précisément cette acceptation que met dangereusement en danger l’initiative.

BNS: plus d’or, ni de titres

L’initiative «Monnaie pleine» propose en effet un nouveau cadre pour le système monétaire en Suisse. Premièrement, le nouvel article 99 de la Constitution fédérale viserait à donner de manière à la seule Banque nationale suisse (BNS) le monopole de l’émission de monnaie scripturale. Concrètement, cela signifie que les banques commerciales ne pourraient plus accorder de prêts.

«Les banques commerciales ne pourraient plus accorder de prêts.»

Deuxièmement, l’initiative exigerait un changement de politique ­monétaire. La BNS serait contrainte de créer de l’argent «sans dette», c’est-à-dire transférer de l’argent ­directement à la Confédération, aux cantons ou aux citoyens, sans acquérir en retour des actifs tels que des devises, de l’or ou des titres, comme c’est le cas aujourd’hui.

Crédits plus chers pour les PME

Si les banques ne peuvent plus utiliser les dépôts à vue pour les prêts, il est probable que les prêts seront plus difficiles à obtenir et auront tendance à être plus coûteux. Toutefois, il est particulièrement important pour les PME et les propriétaires potentiels d’obtenir des prêts facilement et rapidement.

Les initiateurs prévoient que la BNS peut intervenir en cas de problèmes de crédit. Cependant, cela détruirait un système financier qui fonctionne bien, qui est décentralisé et orienté vers le client. Cela entraînerait d’importantes pertes d’efficacité. Cette dépendance unilatérale à l’égard des décisions de la Banque nationale est déjà le prochain problème. L’émission de monnaie «sans dette» serait problématique du point de vue de la politique monétaire. La Banque nationale ne pourrait poursuivre sa politique monétaire que dans un seul sens, à savoir en augmentant constamment la masse monétaire. Quel piège sur le long terme! Une réduction deviendrait impossible. Tout cela créerait le danger d’une politisation de la politique monétaire – et donc une perte de crédibilité – de la BNS. A éviter...

Du côté du OUI?

Peu d’arguments parlent en faveur du texte. Les initiants visent une économie plus stable. Bien, mais aucune économie qui dépend d’un monopole politique – celui de la BNS, selon les initiants – n’est stable. Bien au contraire. Lorsqu’un acteur dispose de trop de pouvoir, ceux qui en sont dépourvus en souffrent.

De facto, la restriction de la base des transactions financières ne rend pas l’argent plus stable, mais plus instable. C’est comme dans la construction: une maison a besoin d’une fondation solide et ne peut se contenter d’un pilier unique. Les initiateurs veulent renforcer la colonne vertébrale, mais sapent ses fondations. Rien de positif ne peut sortir de cette idée.

Le parlement de l’usam a donc décidé sans opposition de recommander le vote négatif. Et le 10 juin prochain, le peuple le suivra probablement.

Henrique Schneider, usam

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