Publié le: 13 mai 2022

Galop réglementaire de la Finma

RISQUES CLIMATIQUES – L’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Finma) oblige les banques et les assurances à faire état de leurs risques climatiques. Elle accepte ainsi que les établissements financiers fassent pression sur leur clientèle. Mais cette pratique est pourtant dépourvue de base légale.

En 2021, l’autorité de surveillance des marchés financiers a révisé ses circulaires 2016/1 «Publication – banques» et 2016/2 «Publication – assureurs (Public Disclosure)». Elle y réglemente la publication des risques dits climatiques. La Finma cite comme base légale pour ces adaptations l’ordonnance sur les banques et l’ordonnance sur les fonds propres, ainsi que la loi sur la surveillance des assurances et l’ordonnance sur la surveillance des assurances.

Ce que l’autorité, déjà connue pour ses escapades réglementaires, ne dit pas, c’est qu’aucune des bases qu’elle cite ne lui donne la légiti-mité nécessaire pour introduire une toute nouvelle catégorie de risques. Surtout si les établissements régulés par la Finma répercutent immédiatement cette régulation sur leurs clients.

Le mécanisme est pourtant simple à saisir. La Finma invente la nouvelle catégorie de risques «risques climatiques». Elle réglemente via une circulaire que les banques et les assurances doivent chiffrer et rapporter leurs risques climatiques. Pour leur part, ces établissements savent que s’ils divulguent des risques élevés, ils seront contraints par la Finma de prendre des mesures. Ils commencent donc d’eux-mêmes à réduire les risques. Cela signifie qu’ils orientent leurs clients pour qu’ils mesurent eux-mêmes les risques climatiques et les évitent. Cela peut même aller jusqu’à empêcher les clients présentant des risques climatiques – par exemple l’industrie manufacturière – d’obtenir des crédits.

Un contenu erroné

Sur le fond aussi, le galop réglementaire de la Finma est tout simplement faux. En Suisse, il n’existe pas de reconnaissance démocratiquement légitimée de la catégorie des «risques climatiques». C’est même le contraire qui est vrai. Les bases citées par la Finma – en majorité des ordonnances et non des lois – ne mentionnent pas cette catégorie de risques. Les documents de référence ne se prononcent pas non plus sur cette catégorie de risques.

De plus, ne l’oublions pas, le peuple a rejeté la loi sur le CO2. Ce texte contenait bien certaines réglementations pour la place financière qui auraient pu servir de critères de référence pour la reconnaissance des risques climatiques. Mais la loi a été rejetée – et ces critères de référence n’ont donc pas non plus passé le cap de la volonté populaire. De plus, les méthodologies d’identification, de mesure et de mitigation (atténuation) – c’est-à-dire de divulgation – des risques climatiques ne sont pas encore très poussées. Une obligation de divulguer les risques climatiques alors que les méthodologies ne sont pas encore éprouvées s’avère donc contre-productive.

Sans aucune légitimité

En outre, la démarche de la Finma n’est pas appropriée. L’introduction d’une toute nouvelle catégorie de risques, qui n’a pas été discutée au Parlement dans le cadre des lois de surveillance et de réglementation correspondantes, est une réglementation matérielle au niveau de la loi. Or la Finma n’a pas le droit de le faire.

Il est particulièrement problématique que cette institution introduise ici une réglementation qui concerne l’économie réelle – dont les représentants n’ont pas été consultés au préalable. Ainsi, l’autorité de surveillance financière réglemente sans base légale et sans connaître les effets de sa propre réglementation dans la pratique. En ces temps de «greenwashing», le fait que la Finma indique avoir consulté des banques et des assurances représente tout sauf un gage de qualité!

Poser des limites

Il faut sans cesse stopper la Finma qui, dans sa frénésie réglementaire, se complaît dans son rôle de cavalier seul et réglemente à tout va, sans tenir compte de la base légale. L’Union suisse des arts et métiers (usam) a déjà pu l’arrêter à plusieurs reprises, en collaboration avec d’autres associations de PME et les partis bourgeois du Parlement. Le moment est venu de montrer une fois de plus à la Finma où se situent les limites à ne pas franchir.

Henrique Schneider, usam

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