Publié le: 1 octobre 2021

Horizon Europe: il faut donner un signal clair!

La rupture en mai dernier des négociations sur un accord-cadre institutionnel avec l’Europe a plongé la Suisse dans une phase d’incertitudes vis-à-vis de son partenaire historique. Premier constat tangible, la Suisse n’est pas associée pleinement à Horizon Europe, programme-cadre de l’Union européenne pour la recherche et l’innovation (PCR), mais reste sur le strapontin des pays tiers jusqu’à nouvel avis. Ce statut exclut pour l’heure l’accès des chercheurs, des équipes et des entreprises innovantes à différents types de soutiens européens, mais aussi et surtout, à la possibilité de diriger des projets auxquels ils peuvent encore participer.

Cette situation a deux conséquences. La première est immédiate et financière: la Suisse doit financer directement les chercheurs concernés avec les fonds qui auraient été versés à l’UE en cas d’association. La deuxième est plus diffuse mais plus dommageable aussi: l’interdiction de diriger des projets relaie notre place scientifique suisse à un rôle subsidiaire. Une érosion lente dont les conséquences se paient sur le long terme. Il est donc crucial de renouer rapidement avec le statut de pays pleinement associé. Les chances restent entières. Cela passera toutefois par une clarification du rôle de la Suisse en tant que partenaire de l’Union européenne.

Pour la Commission européenne, la question de l’association pleine et entière de la Suisse aux programmes Horizon Europe ne peut être discutée séparément des autres considérations relatives à nos relations. Il y a là une différence de perception entre la Suisse et l’UE. Pour cette dernière, politiquement, les discussions ne peuvent faire abstraction du rôle que la Suisse entend jouer à l’avenir.

La question du milliard de cohésion en faveur de certains États membres de l’UE se pose dans ce contexte. Cette contribution fait partie de la dynamique de fonctionnement propre à l’UE. Chaque pays s’en acquitte. Libérer ce milliard sans condition revêt une importance plus symbolique que financière. C’est un signal donné démontrant la volonté de la Suisse de rester un partenaire fiable. Plusieurs domaines sont concernés par cette contribution, notamment la formation, la recherche et l’innovation. Ces fonds ne sont en effet pas versés aux budgets des pays ou à l’UE, mais directement à des projets. Le domaine de la formation professionnelle est par exemple particulièrement concerné.

Les programmes du paquet Horizon Europe 2021-2027 auxquels la Suisse n’a plus un accès complet couvrent toute la chaîne de création de valeur: de la recherche fondamentale à la commercialisation. Les PME sont donc aussi concernées. Un grand nombre d’instruments de financement sont prévus pour toutes les disciplines (santé, sécurité, numérisation, climat, énergie, transports, aéronautique et spatial, denrées alimentaires, ressources naturelles, agriculture, bioéconomie, sciences humaines et sociales…). Ils revêtent dès lors une importance cruciale pour la place scientifique mais aussi économique suisse. Ces programmes permettent de mener en Suisse des projets financés par l’UE, mais également de se mesurer à d’autres pays, de se constituer un réseau international et ainsi contribuer au développement de nos propres capacités d’innovation.

Pour l’industrie suisse, qui doit faire face à des coûts élevés, l’innovation reste le levier prioritaire lui permettant de rester compétitive sur le plan international. Rappelons que les PCR constituent la deuxième source de financement public de la recherche et l’innovation en Suisse, après le Fonds national suisse, et la première pour les PME. Une enquête menée en 2018 a révélé qu’entre 2003 et 2018, les participants suisses aux PCR ont publié environ 32 700 contributions (validées par leurs pairs) en lien avec leurs projets, déposé 2300 brevets et fondé 1000 entreprises. Avec à la clé, la création d’emplois. C’est donc tout un écosystème qui est concerné.

Notre prospérité en jeu. La Suisse n’a rien à gagner des incertitudes actuelles. La stabilité est nécessaire pour assurer que nos hautes écoles et nos entreprises maintiennent le niveau d’excellence indispensable à notre prospérité. Les pays européens restant nos partenaires privilégiés, tant économiques que scientifiques, un dénouement rapide de nos relations s’impose. Cela ne nous soustrait pas à notre obligation de développer d’autres partenariats, extra-européens, ni de renforcer nos pôles de recherches par tous les moyens afin d’attirer les meilleurs talents.

*Conseillère nationale (PLR/GE)

simone.demontmollin@parl.ch

Les plus consultés