Publié le: 4 mars 2022

L’électricité: la priorité cachée

COURANT – La menace de pénurie et de blackout électriques se précise. Tour d’horizon des solutions envisagées et des scénarios. Un modèle préconise de mettre sur pied un pool d’investisseurs pour assurer des solutions de stock­age.

Sans électricité, rien ne va plus. Au sens littéral du terme. Car la technologie de base probablement la plus importante aujourd’hui est la télécommunication. Sans électricité, les réseaux de communication s’effondrent, et avec eux tout ce qui permet à la Suisse de fonctionner. C’est justement cette situation de pénurie d’électricité qui menace de s’abattre sur notre réalité.

Selon l’Office fédéral de la protection de la population, la panne d’électricité, le «blackout», représente la plus grande menace pour la Suisse – plus dommageable encore que la pandémie et la guerre. Cela n’a rien d’étonnant, puisque sans électricité, non seulement il n’y a pas de lumière, mais les machines et les ordinateurs s’arrêtent aussi. Plus encore, le réseau de télécommunications s’effondre, et avec lui la police, la santé publique... tout, tout simplement. Il s’agit bien sûr d’un scénario extrême. Mais il illustre bien l’importance de l’électricité.

Selon l’Office fédéral de la protection de la population, le «blackout» est la plus grande menace pour la Suisse

Le calme apparent

Il est surprenant que malgré une telle importance, l’électricité soit si souvent négligée dans le débat public. Cela a brusquement changé en 2021 lorsque le conseiller fédéral Guy Parmelin a déclaré publiquement ce qui était évident: le risque de pénurie d’électricité est réel et augmente de jour en jour. Il a appelé les entreprises à se préparer. Car là aussi, il a parlé clairement. L’approvisionnement se fait en principe de manière autonome.

Depuis lors, le thème de l’électricité figure en bonne place sur la liste des priorités du Conseil fédéral et de l’opinion publique. Le problème est vite cerné: si rien ne change, la production d’électricité par les centrales nucléaires ne cesse de diminuer. Parallèlement, l’augmentation des capacités de production des énergies renouvelables est lente et faible. Et la demande d’électricité croît en raison de l’électrification. La pénurie se pointe à l’horizon. Celle-ci ne peut pas être comblée simplement par l’importation, car l’Europe se trouve − à l’heure actuelle − dans le même piège.

On se met à bouger

Il existe plusieurs approches pour pallier ce manque. L’une est politique et réglementaire. Il existe actuellement trois projets différents visant à renforcer la sécurité d’approvisionnement de la Suisse en électricité.

• Il y a tout d’abord la solution actuellement en discussion au Parlement. La loi sur l’approvisionnement en électricité et la loi sur l’énergie est adaptée pour développer les capacités de production d’électricité à partir d’énergies renouvelables.

• Ensuite, il y a un projet mis en consultation visant à apporter des adaptations en matière d’aménagement du territoire afin d’accélérer les procédures d’autorisation et de mise en œuvre de nouvelles installations de production d’énergie renouvelable.

• Et puis il y a un projet, qui est seulement mis en consultation, qui veut introduire des instruments ciblés contre une situation de pénurie. Ces instruments sont les réserves et les centrales à gaz.

Sprint final

Il est impossible de dire si ces projets conduiront à de véritables solutions. Même s’ils accélèrent l’augmentation des capacités de production d’électricité, il en faudra encore beaucoup plus pour répondre aux besoins futurs. Il serait donc indiqué de revenir à la neutralité technologique afin d’accélérer la construction de nouvelles centrales nucléaires. Cela permettrait de couvrir les besoins croissants tout en préservant le climat et les ressources.

il faut beaucoup plus de rapidité et surtout d’efficacité sil’on veut réduire le risque de black-out

Pour le court et le moyen terme, plusieurs idées sont lancées. L’une d’entre elles consiste à créer un pool d’investissement de gros et moyens consommateurs d’électricité afin de mettre en œuvre un système de réserves. Cela s’organiserait de la même manière que les réserves d’éthanol et d’autres produits soumis au stockage obligatoire. Cette solution s’avère bien plus proche de l’économie qu’un arsenal de nouvelles réglementations (assorties de subventions en plus).

Il est actuellement impossible de dire quelle solution s’imposera. Mais il faut beaucoup plus de rapidité et surtout d’efficacité, si l’on veut réduire le risque de black-out.

Henrique Schneider, usam

conseil fédéral

Adaptations à l’issue de la consultation

À l’issue de la consultation relative à la révision de la LEne, le Conseil fédéral a procédé à plusieurs adaptations du projet et a par ailleurs apporté un complément dans le domaine de la LApEl.

• Valeurs cibles pour le développement de la production d’électricité issue des énergies renouvelables (LEne): la valeur cible d’ici à 2035 est désormais fixée à 17 TWh (jusqu’ici 11,4 TWh). Pour 2050, la valeur cible est de 39 TWh (jusqu’ici 24,2 TWh). Les valeurs cibles pour le développement de la production d’électricité d’origine hydraulique restent inchangées (37,4 TWh d’ici à 2035; 38,6 TWh d’ici à 2050).

• Objectifs de consommation (LEne): les valeurs cibles concernant la consommation énergétique moyenne par habitant restent inchangées (43 % de moins en 2035 qu’en 2000, 53 % de moins en 2050). Il en va de même de la valeur cible portant sur la consommation moyenne d’électricité par habitant d’ici à 2035 (réduction de 13 % par rapport à 2000). En raison du renforcement nécessaire de l’électrification pour atteindre l’objectif «zéro émission nette», la valeur cible pour 2050 est assouplie (recul de 5 % contre 18 % jusqu’ici).

• Soutien au développement des centrales hydrauliques à accumulation (LApEl): pour garantir la sécurité de l’approvisionnement en électricité à long terme pendant les mois d’hiver, il est nécessaire d’introduire un instrument spécifiquement adapté à la situation suisse.

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