Publié le: 14 août 2020

Le rôle socio-économique de la femme

FRAIS DE GARDE – La hausse de la déduction des frais de garde aide à la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, relève Alexa Krattinger. Et donc renforce le rôle de la femme dans l’économie et la société.

Le «capital humain» chez les femmes est aujourd’hui encore largement sous-exploité. Si la parité hommes-femmes dans la formation présente des progrès indéniables, font encore défaut pour les femmes et mères de famille l’accès au marché, à des métiers ou, plus encore, à des postes de direction/conseils d’administration. Les choix d’entrer sur le marché du travail, de s’y épanouir, de fonder une entreprise ou encore d’accéder à un poste de direction favorisent la compétitivité et la croissance de l’économie suisse. La liberté de choix et la liberté entrepreneuriale des mères (et des pères) doivent donc être rendues possibles.

En améliorant la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, les qualifications des femmes sont mieux reconnues et les chances d’accès à des postes clés et d’ascension hiérarchique sont plus grandes dans tous les domaines. Aujourd’hui, la crise sanitaire est plus que révélatrice du rôle que jouent les femmes dans l’économie en Suisse et de l’importance des structures d’accueil de jour leur permettant de se rendre sur leur lieu de travail et de remplir leur cahier des charges. Si l’on se concentre sur l’évolution du rôle économique à proprement parler de la femme, c’est sans conteste le niveau de formation qui conditionne largement en amont les potentiels d’accès au marché du travail, de consolidation et de perfectionnement des compétences. Les femmes avec une formation d’une haute école spécialisée ou universitaire ne devraient pas être confrontées à autant de freins à l’entrée sur le marché du travail et dans l’ascension hiérarchique.

Un deuxième revenu nécessaire

Et, pourtant, trop souvent, les femmes qualifiées sont contraintes de réduire leur taux d’activité. Le coût élevé et la rareté des structures de garde des enfants sont les freins les plus fréquents. Inévitablement, en réduisant le taux d’activité, c’est généralement l’homme qui a un temps plein et donc le revenu principal; la mère apporte le deuxième revenu. Si le deuxième revenu a pu être considéré à une époque comme un appoint ou de l’argent de poche, aujourd’hui, le deuxième revenu est plus que nécessaire pour couvrir les nombreuses charges incombant à l’entretien d’un ménage. En créant de meilleures conditions-cadre, la proportion de cadres féminins pourrait avoir de nombreux effets dynamiques et bénéfiques sur la productivité globale de l’économie. L’amélioration de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale devrait rendre possible le choix combiné de vouloir travailler et avoir des enfants.

Parcours chaotique

De manière générale, pour les mères, le fait d’avoir un revenu engendre inévitablement des frais de garde par des tiers (crèche, maman de jour, accueil extra-scolaire notamment). Le fait que ces frais ne puissent être déduits totalement ou que de manière très partielle biaise le comporte­ment de la main-d’œuvre. Ce biais se retrouve le plus souvent chez la mère, qui renonce à entrer sur le marché du travail ou réduit son taux d’occupation. S’ensuit une suite de conséquences regrettables pour le parcours professionnel de ces mères. Non seulement, elles ne travaillent pas dans la mesure de leurs compétences/leur capital humain, mais elles perdent aussi des opportunités de consolider et de renforcer leurs potentiels. C’est un gâchis à l’échelle individuelle et à l’échelle de la collectivité. La mère, qui a investi du temps et des moyens dans sa formation, n’est pas ou peu employée pour sa juste compétence. Au niveau de la collectivité, ce sont des investisse­ments en formation qui ne rendent pas le bénéfice escompté sur le marché du travail, et ce sont bien évidemment des dépenses en termes de formation notamment au travers d’impôts pour l’ensemble des contribuables. La formation des futures mères doit être un investissement sur le long terme à l’échelle de l’individu mais aussi à l’échelle de la collectivité.

Ne jamais renoncer!

Une femme ne devrait pas renoncer à ses ambitions professionnelles. En plus de l’expérience professionnelle, le fait d’être présent sur le marché du travail à un taux d’occupation important ou à plein temps influence une multitude d’autres facteurs. La consolidation des connaissances, l’ouverture à d’autres formations durant l’activité professionnelle, la socialisation, le fait de pouvoir cotiser pour sa prévoyance professionnelle, de rentabiliser tout simplement ses études, l’autonomie financière, la nécessité financière d’un deuxième revenu, ou encore la réalisation de soi vécue dans un cadre professionnel.

Suite logique et légitime

Permettre de mieux concilier la vie familiale et la vie professionnelle encouragerait les femmes ayant des enfants à rentabiliser leur capital humain. Cet élan permettrait aussi par effet de mimétisme d’encourager les jeunes femmes (et futures mères) à être qualifiées (à choisir une bonne formation) et à pouvoir concilier plus facilement vie professionnelle et vie familiale. Si la proportion des femmes aux postes de direction a augmenté ces dernières années, la poursuite de l’amélioration de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale doit rester une priorité. En augmentant cette déduction des frais de garde/déduction général, cela permettrait de diversifier encore plus les postes de direction ou de conseils d’administration dans tous les domaines et formes d’entreprises. Il n’y aurait donc pas besoin de devoir passer par des quotas pour les directions ou les conseils d’administration, puisque cela serait une suite logique et légitime dans le parcours des femmes qualifiées sur le marché du travail.

Alexa Krattinger, usam

www.oui-pour-les-familles.ch

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