Publié le: 28 mars 2014

«â€‰Les acteurs les plus faibles payeraient la note. »

SINISTRE – L’hôtellerie et la restauration subi­raient de plein fouet les 
effets pervers d’un 
salaire minimum imposé par l’Etat : bon nombre d’établissements 
devraient fermer.

L’exploitation d’un restaurant est gourmande en personnel : cuisiniers, aides de cuisine, serveurs, barmen et beaucoup d’autres employés sont indispensables pour offrir un service irréprochable, satisfaire la clientèle et assurer une offre attractive. Sur l’ensemble des coûts, dans le secteur de l’hôtellerie-restauration, les salaires font la part du lion : 48,5% du chiffre d’affaires. Les marges sont faibles, la concurrence brutale. Nombre d’établissements ne survivraient pas à un salaire minimum légal qui serait un record international.

Les survivants – établissements 
de luxe ou auberges de village – de­v­raient supprimer des emplois et 
licencier du personnel.

Plus de 5200 francs par mois

« L’initiative sur les salaires minimums exige que l’on verse à une aide temporaire non qualifiée, sans expé­rience ni compétences linguistiques un salaire horaire de 26,95 francs, y compris suppléments de vacances et 13e salaire, ce qui équivaut à 5200 francs par mois. Peu d’entreprises peuvent se le permettre. » Hannes Jaisli, directeur adjoint de l’organisation faîtière GastroSuisse, en est convaincu : « L’initiative sur les salaires minimums dévastera le secteur. » Selon lui, il ne suffit pas d’introduire le self-service dans un restaurant pour reprendre le contrôle des coûts. Il faudrait aussi réduire l’effectif du personnel. De plus, la clientèle ne l’accepterait pas. « Pour un restaurateur, complète Jaisli, ra­tionaliser ne sera possible qu’en achetant davantage de produits finis à des fournisseurs externes et en réduisant sa propre production, le fait-maison » Soit en général l’exact opposé de ce que le client souhaite …

Premières victimes : les employés

Dans l’hôtellerie-restauration, la concurrence est extrême. Les clients sont très sensibles aux changements de prix. Il ne sera guère possible de répercuter sur eux l’explosion des coûts résultant de cette initiative. « Le prix d’un café ou de la bière pression est quasiment une affaire d’Etat. Dans un village, un restaurateur qui commence à majorer ses prix de quelques centimes voit très vite son chiffre d’affaires baisser. Raison pour la­quelle, selon Jaisli, ce sont les employés qui, dans la plupart des cas, feraient les frais de cette initiative.»

La fin d’un partenariat 
social qui a fait ses preuves

L’importance du personnel dans l’hôtellerie et la restauration est confirmée depuis des décennies par un partenariat social intact. Représentant 200 000 à 250 000 employés, la plus importante convention collec­tive de travail (CCT), celle de l’hôtellerie et de la restauration, a vu son champ d’application s’étendre régulièrement au cours des 25 dernières années. Une CCT est le résultat de négociations longues et intenses. Des experts des deux parties déterminent conjointement quels salaires peuvent raisonnablement être payés dans un secteur économique donné. Dans l’actuelle CCT de l’hôtellerie-restauration, les partenaires sociaux sont convenus d’un salaire minimum de 18,72 francs. Cette CCT prévoit en outre des conditions intéressantes, telles que le 13e salaire et 5 semaines de vacances.

L’initiative sur les salaires minimums est une attaque de front contre ce partenariat social efficace et bien réglé : « Un salaire minimum imposé par l’Etat remettrait en question le partenariat social, mais aussi la CCT en vigueur et ses avantages, notamment la semaine de vacances supplémentaire, les indemnités et le 13e salaire », affirme Jaisli. « Si l’initiative passe, le dialogue des partenaires sociaux sera remplacé par un diktat 
de l’Etat ne laissant aucune place 
au compromis, au détriment des 
employeurs autant que des salariés. Non seulement personne n’y gagne, mais tout le monde y perd. » Les plus vulnérables en feront les frais.

L’hôtellerie et la restauration remplissent aussi une fonction sociale précieuse, car elles offrent du travail aux personnes qui ont du mal à s’intégrer au marché de l’emploi. Les travailleurs peu qualifiés, les étrangers, les jeunes et les employés à temps partiel y sont en proportion plus importante que dans les autres secteurs de l’économie. En 2008, sur le total des personnes actives occupées qui 
étaient sans formation, près d’une sur dix travaillait dans l’hôtellerie et la restauration. Ce secteur et ses employés seront les premiers à subir de plein fouet les effets négatifs de l’initiative sur les salaires minimums.

« Cette initiative 
condamne les 
bistrots à une mort certaine. »

«Réduire les effectifs, donc réduire tout ce qui est fait-maison. »

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