Publié le: 13 mai 2022

Les PME restent à la barre!

SWISS ACCELERATOR – Après l’abandon de l’accord-cadre, la Confédération souhaite promouvoir elle-même les innovations. Elle ne devrait pas le faire. Une politique industrielle dirigiste est la dernière chose dont notre pays a besoin aujourd’hui.

Depuis l’échec de l’Accord institutionnel entre la Suisse et l’Union européenne (UE), les autorités fédérales veulent se réorganiser pour donner d’elles-mêmes des aides au financement qui auparavant étaient récoltées dans un fond ou programme-cadre de l’UE, puis redistribuées aux entreprises suisses. Vu que la Suisse porte maintenant le statut de pays tiers non associé au programme-cadre de l’UE «Horizon Europe», elle ne peut plus participer aux politiques industrielles de l’UE. Les pauvres PME et les start-up suisses ne peuvent soumettre aucune demande d’aide de financement avec le «EIC Accelerator».

C’est dire si elles ont des projets qui convainquent les investisseurs! Soit, ce programme permettait aux soi-disant meilleurs innovateurs de décocher des aides pour développer et lancer sur le marché des innovations qui changeraient la donne. Nous attendons encore les grands pas en matière d’innovation. Les aides financières étaient fournies soit pour les investissements sous forme d’actions ou de crédits convertibles, soit pour les coûts d’activités de présentation des développements comme les essais, les prototypes, les normes, la propriété intellectuelle.

Un tiers du financement

Les autorités fédérales ont pourtant décidé d’accélérer le pas et de prendre le relais en proposant maintenant leur politique industrielle: le Swiss Accelerator géré par Innosuisse. Innosuisse est l’agence suisse pour l’encouragement de l’innovation. Les financements ont été approuvés par le Parlement et l’entrée en vigueur s’est faite le 15 avril 2022. Innosuisse pourrait donc soutenir des start-up et des PME innovantes en disposant d’une plus grande flexibilité, puisqu’elle aura la possibilité d’apporter des aides dans une fourchette de 40 à 60 % au coût total d’un projet d’innovation. Les conditions d’admission stipulent que l’offre ne s’adresse qu’aux start-up et aux PME avec un numéro d’identification d’entreprise suisse, qu’il faut avoir son siège en Suisse et avoir moins de 250 emplois à temps plein. De plus, les PME innovantes doivent pouvoir disposer de moyens financiers pour au moins 30 % des coût du projet. L’objectif est de déposer un projet qui puisse être rapidement commercialisable. Les demandes devraient être soumises entre le 19 avril et le 10 mai 2022.

Politique industrielle dirigiste?

Mais est-ce vraiment à la politique de décider et de soutenir des projets d’entreprises qui seraient vraisemblablement innovants et rapidement commercialisables? Le marché privé se saisirait rapidement de tels projets alléchants pour les investisseurs. Pourquoi les autorités fédérales veulent suivre l’UE sur ce plan? Se retrouve-t-on comme dans l’après-guerre des années 1950 et 1960 avec la mise en place d’une politique industrielle? Même des économistes comme Barry Eichengreen ont montré qu’historiquement, l’État peut à la rigueur aider à organiser un rattrapage technologique, mais qu’il lui est impossible de pouvoir pousser les innovations.

Pourquoi la Suisse veut alors absolument développer les innovations des entreprises? Le message derrière tout cela n’est malheureusement pas celui de l’innovation, mais du dirigisme pour une économie innovationnelle au seul niveau idéologique. Il est plutôt question de soutenir tous les projets de refonte idéo-écologique de la société. Ce n’est pas dire que l’économie privée ne fasse rien. La plupart des innovations qui permettent de ménager le poids de notre empreinte technologique sur l’environnement proviennent des entreprises privées.

Le problème, c’est que l’État se saisisse d’un chapitre de la réalité économique et politique qui ne le concerne vraiment pas. Sa charge normale est l’établissement de conditions-cadres optimales pour le développement économique et social de ses citoyens, ce qui suppose la liberté économique, une justice impartiale mais surtout un bannissement de l’intervention étatique.

Le Swiss Accelerator serait donc un premier pas en direction d’une politique industrielle que l’Union suisse des arts et métiers se doit de repousser avec véhémence. Le marché saura soutenir les innovations qui changeront réellement la donne. L’État ne dispose pas des compétences pour cela.

Mikael Huber, usam

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