Publié le: 10 septembre 2017

Les rentiers actuels discriminés

pv 2020 – Marco Chiesa, directeur d’un EMS, met en garde contre une AVS à deux vitesses.

Depuis douze ans, je dirige un EMS à Grono, dans la partie italophone du canton des Grisons. Dans cette fonction, j’ai eu l’occasion, au fil des années, d’apprendre à connaître personnellement et directement les parcours de vie, les souffrances et les joies de nombreuses personnes à la retraite hébergées dans notre établissement, et de les partager. Je me suis senti très fortement impliqué, y compris dans la situation financière de plusieurs de ces seniors.

La situation des personnes âgées n’est pas toujours simple. Les coûts augmentent en proportion de la hausse des besoins en soins. Et les économies qu’elles ont constituées pour leurs vieux jours sont souvent très vite épuisées, car les rentiers d’aujourd’hui ont vécu une partie de leur vie active à une époque où il n’existait pas encore de véritable prévoyance professionnelle et ils n’ont pas été non plus en mesure de se constituer un troisième pilier. Et pourtant ce sont les rentiers actuels qui ont posé les bases de notre prospérité et de nos assurances sociales. C’est grâce à eux que notre situation est aujourd’hui favorable. Il m’est d’autant plus difficile d’admettre que l’on en vienne aujourd’hui à pénaliser les rentiers actuels en leur imposant une réforme injuste de l’AVS et à vouloir faire d’eux des rentiers-parias.

Il est pour moi incompréhensible que nous témoignions du respect à l’égard de ces personnes tout en décidant de faire, en matière de prévoyance vieillesse, une «réforme pour la réforme» qui les obligera à payer sans obtenir un centime pour elles-mêmes. Seuls, en effet, les nouveaux retraités, c.-à-d. les personnes qui commenceront à percevoir une rente AVS à partir du 1er janvier 2018, profiteront d’un supplément de rente de 70 francs et du relèvement de la rente pour couple. Les rentiers actuels seront laissés pour compte. Et cela en dépit du fait que nombre d’entre eux, même lorsque – dans le meilleur des cas – ils disposaient d’une prévoyance professionnelle, sont partis à la retraite avec des taux de conversion plus bas et sans bénéficier d’aucune mesure d’atténuation des effets de la baisse. C’est là une injustice crasse et une discrimination de tous les rentiers actuels.

Non Ă  une AVS Ă  deux vitesses

En matière d’AVS, le principe intangible qui a toujours prévalu jusqu’ici était que des revenus comparables doivent aboutir à l’obtention de rentes équivalentes. C’est une nouveauté que les politiques veuillent maintenant des rentiers de deuxième classe auxquels seraient servies des rentes à bon marché. Les rentiers actuels seraient indubitablement les perdants de la réforme de la prévoyance vieillesse: avec un revenu inchangé, ils devraient payer davantage d’impôts à la consommation.

Menace de perte d’avantages

Les perdants, toutefois, ne seront pas seulement les rentiers actuels. Je connais, non seulement parmi les résidents de notre foyer, mais également parmi les seniors qui vivent encore dans leur maison, plusieurs personnes âgées qui sont tributaires de prestations complémentaires. Ce sont elles, précisément, qui sont le plus exposées à subir des pertes consécutives à cette réforme de l’AVS. Les personnes à la retraite qui ont aujourd’hui besoin de prestations complémentaires peuvent, par exemple, être exonérées de la redevance radio et télévision. Elles ont également droit à des réductions des primes d’assurance-maladie, du moins dans les limites de la prime moyenne au niveau cantonal ou régional. Pour certains des futurs rentiers, les 70 francs de rente additionnelle auront pour seul effet de faire passer leur revenu total juste au-dessus du seuil donnant droit à des prestations complémentaires et à des avantages. Eux aussi feront donc partie des perdants de la réforme de l’AVS.

Pour les bénéficiaires de prestations complémentaires: moins d’argent mais plus d’impôts

Pour les nouveaux bénéficiaires de prestations complémentaires, cette réforme causera une détérioration de leur situation sur le plan fiscal. Les 70 francs supplémentaires de rente AVS auront pour effet de réduire d’autant les prestations complémentaires auxquelles ils pourraient prétendre. Vu que les rentes AVS, à la différence des prestations complémentaires, sont imposables, les nouveaux bénéficiaires seront perdants: ils recevront exactement le même montant mais verront leurs impôts augmenter et auront moins d’argent à disposition à la fin du mois. De plus, eux aussi seront touchés par la hausse des taux de la TVA. La réforme de l’AVS proposée est une perfidie et une injustice car elle fait empirer la situation des plus démunis.

Engagez-vous avec moi contre une AVS à deux vitesses et contre la traîtrise dont seront victimes et les rentiers actuels et les personnes réellement dans le besoin. Le 24 septembre 2017, dites NON à la réforme injuste de l’AVS.

Marco Chiesa, conseiller national UDC/TI, directeur d'un EMS

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