Publié le: 6 novembre 2015

PME, différencier le statut

services financiers – Pour faciliter l’accès aux marchés européens, la Suisse devrait adopter plus de 500 règlements sectoriels de l’UE et au prix d’énormes surcoûts.

A quoi ressemble la coopération institutionnelle entre la Suisse et l’Union européenne? Tendue... Afin de mieux négocier, le Conseil fédéral a ficelé un paquet où tous les futurs accords aux conséquences institutionnelles seraient négociés ensemble. Judicieux? Peut-être, mais le paquet est piégé sur un domaine au moins, le fameux «accord sur les services financiers» qui règlemente l’accès ­réciproque au marché.

Idée séduisante

Au premier abord, l’accord est tentant, car les banques suisses, gestionnaires de fortunes et tout acteur de la finance pourraient vendre leurs produits et prestations dans l’UE et inversement. De plus, qui dit plus grande concurrence, pense à une amélioration du rapport qualité-prix. Mais il y a un hic...

Enormes surcoûts

Ce hic, c’est évidemment la réglementation de l’UE. Car c’est plus de 500 règlements sectoriels que la Suisse serait obligée d’adopter unique­ment en droit des marchés financiers! A cela se grefferaient de nombreuses dispositions liées, par exemple, au droit de la concurrence, de l’aide juridique ou de la protection des consommateurs.

«LES PRESTATAIRES OPÉRANT UNIQUEMENT SUR LE TERRITOIRE NATIONAL DOIVENT ÊTRE SOUMIS À UNE RÉGLEMENTATION PLUS SIMPLE.»

Il en résulte deux problèmes. Primo, la compréhension de la politique de l’Etat suisse serait ébranlée, car ces réglementations ne se sont soutenues ni par le peuple, ni par ses représentants. Secundo, ces textes entraînent d’énormes surcoûts que chacun des prestataires de services financiers suisses devraient supporter.

Or – et c’est d’autant plus grave – ces coûts supplémentaires ne pourraient pas être absorbés par les PME des secteurs financiers. Si la Suisse endossait sans nuance l’ensemble de la réglementation de la finance de l’UE, les grandes banques bénéficieraient d’un gros avantage concurrentiel par rapport aux instituts bancaires nationaux et gestionnaires de fortune, bref de plus petits acteurs que l’UE ne veut d’ailleurs pas vraiment.

Différenciation, le mot d’ordre!

La Suisse a tendance à considérer l’UE comme un marché unique. Elle l’est effectivement, mais l’UE se définit avant comme une union réglementaire. Et c’est dans sa réglementation qu’elle y fonde sa légitimité. A l’égard de partenaires tels que la Suisse, elle trouve logique qu’ils épousent les réglementations de l’union.

Bien sûr, l’Union suisse des arts et métiers usam plaide en faveur de l’ouverture des marchés, mais l’accès aux marchés internationaux ne doit pas se payer au détriment de l’ensemble de notre place financière et de l’économie suisse. Alors que faire? D’abord, les avantages et coûts du paquet doivent être comparés à d’autres accords, car il s’agit de favoriser l’économie dans son ensemble et non de privilégier des institutions spécifiques. Ensuite, il faut développer la différenciation entre, d’un côté, les établissements cherchant un accès aux marchés de l’UE et pour lesquelles des opportunités doivent être créées, et de l’autre, les prestataires opérant uniquement à l’échelle nationale, soumis à une réglementation suisse plus simple leur assurant des conditions équitables. En conclusion, l’accord pour les prestations des services financiers doit tenir compte des différents modèles commerciaux, en particulier les PME de la finance.

Par ces accords sur les services financiers, l’UE essaie d’attirer la Suisse qui, en contrepartie, devrait accepter son intégration institutionnelle par la réglementation. Or cela n’est pas acceptable! Ici, un positionnement clair de la Suisse est impératif et une différentiation du statut des PME s’avère indispensable.

Henrique Schneider, usam

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