Publié le: 8 juillet 2016

Sans contrainte ni heures supplémentaires

détail – Le commerce en ligne ne ferme jamais ses portes et le shopping frontalier gagne en ­popularité. Il faut bien plus de flexibilité dans les horaires d’ouverture des magasins en Suisse.

«En six mois, l’Allemagne a réussi à assouplir les horaires d’ouverture des magasins», dit l’économiste allemand Clemens Fuest en ajoutant: «La Suisse y travaille depuis 2011! Or si l’Allemagne devient plus flexible politiquement que la Suisse, c’est que quelque chose ne tourne vraiment pas rond…» La Suisse peine à arrondir le cadre légal des heures d’ouverture des magasins à cause d’un scepticisme aux motivations obscures. Sauf pour les syndicats qui craignent un allongement du temps de travail. Mais le projet de loi, examiné en ce moment par le Parlement, ne le prévoit pas. Reste une poignée d’entreprises qui redoutent une augmentation des coûts même si, justement, cette loi est l’une des rares à réduire les coûts de réglementation.

Pour le commerce de détail, la loi fédérale sur les heures d’ouverture des magasins (LOMag) autorise des plages d’ouverture de 6 à 20 heures du lundi au vendredi et de 6 à 19 heures le samedi. Le dimanche ainsi que le travail de soir et de nuit ne sont pas touchés. La loi ne prévoit aucune obligation d’ouverture sur la plage complète autorisée ni d’augmentation de la durée du travail. Elle veut une plus grande souplesse entrepreneuriale et laisse chaque commerce libre de déterminer ses horaires dans les limites susmentionnées.

Economiquement sensé

Une étude de GfK Switzerland montre les effets dommageables du tourisme d’achat: en 2012 déjà, le volume d’achat s’élevait à 8,9 milliards de francs, 10 milliards en 2013 et on l’estime désormais à 12 milliards suite à la décision de la BNS, en janvier 2015, qui a accéléré cette dynamique. Certes, la LOMag ne va pas décourager d’un seul coup le tourisme d’achat, mais la Suisse doit regagner en compétitivité et ce projet accroît effectivement la compétitivité du commerce de détail.

C’est aussi un besoin urgent, car les consommateurs ont changé leurs habitudes d’achat: non seulement ils achètent au-delà des frontières, mais également «online». Or le commerce online n’a pas d’horaire et le shopping frontalier offre une grande diversité. Les modes de vie ont changé et les consommateurs apprécient cette flexibilité. L’allongement des heures d’ouverture accompagne cette évolution.

Juridiquement irréprochable

La loi sur le travail (LTr) reste inchangée, car elle permet, en semaine, d’ouvrir librement un commerce de 6 à 23 heures et en réglemente les temps de repos. La LOMag ne change donc rien à la LTr, demeurant socialement acceptable et assurant une complète protection des travailleurs. Comme aujourd’hui déjà, la durée de travail hebdomadaire reste indépendante des heures d’ouverture. Seule la période de travail pourrait changer légèrement, mais cet aménagement du temps de travail est souvent apprécié voire réclamé par les employés. En effet, certains souhaitent par exemple travailler plus tard pour se libérer la matinée. En outre, les heures de travail en soirée et les samedis sont particulièrement recherchées par les travailleurs à temps partiel (revenu d’appoint) et étudiants. A cette plus grande liberté individuelle s’ajoute une plus grande liberté d’entreprise – après tout un droit constitutionnel – puisque chaque détaillant peut ajuster ses horaires d’ouverture au contexte régional et, surtout, aux besoins de la clientèle locale. Ainsi, une épicerie de quartier dans une zone de passage peut ajuster ses heures d’ouverture en fonction de la demande – par exemple la tranche de 17 à 20 heures – et ainsi optimiser son bilan.

C’est du gagnant-gagnant!

Répétons-le, l’autorisation nationale d’ouverture de 6 à 20 heures (de 6 à 19 heures le samedi) n’est pas contraignante, car aucune entreprise n’est obligée de l’appliquer entièrement. Mais elle offre plus de souplesse pour que chaque commerce s’adapte aux spécificités économiques, culturelles et géographiques de la Suisse.

Ainsi la LOMag augmente simultanément la liberté horaire de l’entreprise et abaisse les coûts de réglementation. Cette loi apporte l’indispensable flexibilité à la place économique suisse. Et face à ses voisins, la Suisse ne peut pas traîner la patte… Sc

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