Publié le: 5 mai 2017

«Valeur estimée: entre 300 à 500 millions»

urs gasche – Le conseiller national (PBD/BE), président du Conseil d’administration de BKW SA, s’exprime ici sur les mesures 
de soutien au secteur hydroélectrique et le rôle que l’Etat doit jouer sur les questions liées à l’approvisionnement énergétique.

Journal des arts et métiers: 
Que propose la Commission de 
l’énergie du Conseil national pour soutenir le secteur hydroélectrique?

n Urs Gasche: Si seulement je le savais précisément! Ce que je sais, je le dois aux journaux! Nous avons ainsi vu cette proposition de la part de six entreprises d’approvisionnement en électricité, qui souhaitaient que les PME et les ménages en particulier paient un surcoût pour l’approvisionnement de base. Avec cette prime, 500 à 700 millions de francs par année seraient encaissés par les producteurs souffrant du bas niveau des prix. Cette proposition a apparemment été rejetée et une autre voie recherchée pour soutenir les entreprises hydroélectriques existantes.

ENTREPRISE ÉLECTRIQUE: «elle NE DOIT PAS 
NéCESSAIREMENT 
DISPOSER de sa PROPRE production!»

Selon ce nouveau modèle, le client au bénéfice de l’approvisionnement de base serait obligé de payer au prix de revient du courant issu de l’hydroélectrique. La mise en œuvre n’est pas encore claire, mais on peut valoriser ce que les privés et les PME devraient payer entre 300 et 500 millions de francs.

Ce faisant, les entreprises hydro­électriques bénéficient de trois sources de subventions: la rente de monopole du service universel, la rétribution à prix coûtant (RPC) et maintenant cette prime. Comment jugez-vous ce nouveau privilège?

n Je n’irais pas aussi loin. Le terme de «rente de monopole» ne me semble pas adéquat. Il y a eu la volonté politique dans notre pays de faire en sorte que les clients de détail puissent acheter à des prix réglementés, qu’ils soient du même coup protégés du marché. Les producteurs sans clients dans l’approvisionnement de base ont pu profiter des prix élevés du marché, les autres non. Maintenant, la situation a changé. Les ventes sur le marché sont moins profitables car les prix sont très bas.

Quant à la rétribution, elle n’est pas une subvention pour des installations existantes, mais bien plutôt une incitation pour la construction de petites installations hydroélectriques. Cela dit, la grande hydroélectrique peut – si la Stratégie énergétique est adoptée – bénéficier d’une prime de marché pour les installations existantes non rentables et compter sur l’importante aide à l’investissement. Ce dernier point est à mon avis le seul qui fasse sens, car il ne s’agit que d’une incitation à investir efficacement dans le maintien et l’expansion de l’hydro­électrique.

Est-il encore possible aujourd’hui d’être «simplement» une entreprise électrique ou la dépendance à l’égard des subventions est-elle nécessaire?

n On peut être de nos jours une bonne entreprise électrique (EE) sans être producteur de courant. De nombreuses EE de notre pays achètent du courant en bourse et le vendent en réalisant un profit.

Que peut donc faire la politique pour aider le secteur hydroélectrique dans le respect des règles 
du marché?

n La question est mal posée. Ceci parce que nous mélangeons deux choses. Premièrement, l’Etat doit-il soutenir les EE qui se trouvent en difficulté financière? En second, voulons-nous sécuriser une certaine quantité de courant électrique produite dans le pays? Je pense que cela fait sens au plan économique de soutenir les EE qui ont des problèmes financiers. Cela à condition que celui qui participe, cela pourrait être la Confédération, puisse en tirer parti également lorsque les choses s’améliorent. Quant à l’assurance donnée par le législateur sur la production propre, elle fait sens aussi. Cela peut se faire au sens de l’économie de marché, en préparant cette production. Tout cela serait décrit dans une offre publique et remboursé, de manière analogue au secteur des assurance.

Pourquoi diaboliser les importations de courant? La Suisse importe bel et bien des denrées alimentaires, des automobiles, et ne s’en porte pas plus mal?

n Vous avez raison. Je ne crois pas non plus que l’on devrait diaboliser les importations de courant. La question, toutefois, consiste à savoir si nous voulons prendre le risque de nous retrouver sans courant au cas où la quantité importée ne suffirait pas. Comme par exemple si la France arrêtait quelques centrales nucléaires ou si l’Allemagne redécouvrait soudainement toute la problématique sur le CO2 et par voie de conséquence supprimait un certain nombre de centrales à charbon.

Interview: 
Gerhard Enggist

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