Journal des arts et métiers: Vous avez été pendant dix ans le directeur de la plus grande fonda­tion de prévoyance du 2e pilier, dont le bilan atteint aujourd’hui quelque 6 milliards de francs. Etes-vous préparé au temps de 
la retraite?

Erhard Burri: Oui, je le suis. Après tout, on ne devient pas une personne de 65 ans du jour au lendemain. Il y a déjà plus d’un an que j’ai commencé à préparer la relève avec mon président et le conseil de fondation. Et maintenant j’ai des plans très concrets pour les années qui viennent.

«LE SUCCÈS À COURT TERME N’A JAMAIS ÉTÉ NOTRE BUT.»

... à savoir?

Travailler à la mi-journée, essentiellement au niveau stratégique, dans l’entreprise de conseil que j’ai fondée à cet effet. Mais votre question au sujet de ma préparation est justifiée. Car, sur le plan émotionnel, il ne m’a pas suffi, bien entendu, d’inscrire quelques notes à mon agenda pour régler ma retraite de directeur de proparis.

Et que ferez-vous des 50 pour cent restants?

Je consacrerai beaucoup plus de temps à ma famille; je retrouverai mes loisirs d’antan, comme la musique et l’aéromodélisme. Sans ou­blier mes «anciennes amours», mon américaine de rêve, une Pontiac de 1987…

Quels sont les événements et les jalons qui ont marqué vos dix années à la tête de proparis?

Dans les années 2004 et 2005, il y a eu deux choses: d’abord, la première révision de la LPP, qui a fortement ébranlé la structure formelle de proparis. Par décret de l’Etat, le conseil de fondation a dû dissoudre d’un coup l’assemblée de fondation, or­gane suprême. Mais la transition a très bien réussi, et cela en premier lieu parce que les compétences vraiment essentielles des caisses affiliées ont pu être maintenues.

Le second élément a été le démarrage d’un projet informatique stratégiquement décisif: le développement de notre propre solution logicielle, sous l’appellation AKIS-Net/BV. Les caisses de pensions affiliées et le secrétariat de proparis ont joué les rôles clés, de concert avec la société productrice Mathys & Scheitlin AG. Autre événement marquant durant cette période: la conclusion de quatre générations de contrats d’assurance de base et d’assurance d’association avec nos partenaires des assurances privées.

A quoi tient le succès ininterrompu de proparis depuis 1957?

Le facteur primordial est la perspective à long terme selon des critères de développement durable. Même si la tentation de gains rapides est toujours présente, les responsables ont sciemment renoncé à toute mesure consistant à faire miroiter un succès à court terme.

En d’autres termes, qu’est-ce qui pourrait à l’avenir faire obstacle au succès de proparis?

Pour nous, l’arrogance et l’exubérance seraient mauvaises conseillères. La pérennité du succès de proparis durera aussi longtemps que la volonté des partenaires assurera la cohésion de l’ensemble. Dans ce contexte, l’idée de «communauté» signifie que les intérêts personnels doivent quelquefois s’effacer devant le bien commun. Tous n’en ont pas toujours été comblés et ravis; mais au final, nous avons réussi ensemble une œuvre commune.

«LE BIEN COMMUN ­PRIME SUR L’INTÉRÊT PERSONNEL.»

Quel conseil donneriez-vous à votre successeur?

Je me garderai bien de lui donner des conseils. La composition de ce mot, en allemand – Rat-Schlag! – suffirait à m’en dissuader! De plus, mon successeur, Michael Krähenbühl, est un professionnel qui développera ses propres idées. C’est là justement la chance qu’offre un passage de flambeau. Nous échangerons certainement des connaissances et des informations au sujet de proparis. Mais l’expérience n’a de valeur que pour celui qui l’a faite lui-même.

N’est-ce pas là un excès 
de modestie?

Je ne le pense pas. Il y a assez de chefs d’entreprise ou de soi-disant managers et autres CEO qui se prennent pour le centre du monde et qui ne savent même pas comment fonctionne vraiment leur propre petit biotope…

Interview: Gerhard Enggist

LIEN

www.proparis.ch