Publié le: 8 novembre 2019

Y a-t-il un pilote dans cet avion?

administration fédérale – Le Conseil fédéral met en consultation la loi fédérale sur des allégements administratifs et des mesures destinées à soulager les finances fédérales. Il n’a pas fixé d’objectif d’économies, car il s’agit de réformes structurelles dont les effets ne sont pas immédiats.

La Confédération doit examiner régulièrement ses tâches et la manière dont celles-ci sont exécutées, ainsi que leur organisation administrative. Au début de la législature 2015-2019, le Conseil fédéral a ainsi décidé d’entreprendre des réformes structurelles de l’ensemble des tâches relevant de la Confédération. Il entendait par là aussi bien réaliser des gains d’efficacité qu’atténuer l’affectation de certaines dépenses. Outre les mesures visant à réaliser des gains d’efficacité dans le bâtiment et le génie civil, dans le secteur informatique et dans les publications, qui ont généré des économies d’environ 50 millions, le Conseil fédéral a adopté en août 2018 un ensemble de 35 projets ou mandats d’examen concrets. Il n’y a aucun besoin de légiférer pour la grande majorité de ces mesures.

RĂ©formes structurelles

Toutefois, certains projets exigent de modifier des lois fédérales en vigueur. Ces projets sont soumis aux Chambres fédérales dans un acte modificateur unique. Les cinq mesures requérant des modifications de lois concernent des domaines d’activité très différents. Elles ont pour objet une réduction de l’indexation de l’apport au fonds d’infra­structure ferroviaire (FIF), l’introduction de forfaits dans le domaine de la surveillance des télécommunications dans le but d’augmenter le taux de couverture des coûts, la nouvelle réglementation applicable au financement de la collecte d’informations géographiques, l’obligation faite aux offices octroyant des subventions d’établir des plans de contrôle écrits, ainsi que la création d’une base légale relative à la taxation du tabac par appréciation.

Parmi ces cinq mesures, l’allégement financier le plus important devrait venir de la croissance plus lente de l’apport au FIF. L’indexation de l’apport fédéral au FIF sera dorénavant basée sur l’indice suisse des prix à la consommation (IPC) au lieu de l’être sur l’indice du renchérissement de la construction ferroviaire (IRF). Toutefois, l’écart entre ces deux indices s’est réduit, ce qui diminuera le potentiel d’économie. Une économie de plus de 100 millions en dix ans est attendue par le Conseil fédéral. Toutes ces mesures soulageront les finances publiques de manière globale. Le montant exact n’est toutefois pas connu, car il dépendra fortement de l’évolution du renchérissement. Dans le cadre du message relatif au compte d’Etat, le Conseil fédéral fera un rapport annuel sur l’application des réformes structurelles.

Si toutes les mesure d’allégement proposées font du sens, l’ambition de contrôler les finances fédérales est assez faible. Le Conseil fédéral devrait développer une véritable stratégie dans sa politique budgétaire. Il y a fort à parier que les recettes budgétées seront moins bonnes (du fait des nombreuses réformes à venir, des potentiels facteurs d’incertitude liés au contexte international ou encore des coûts nécessaires et inévitables dans les domaines de la santé et des soins), les dépenses doivent être mieux maîtrisées.

En plus du respect du mécanisme du frein à l’endettement, le Conseil fédéral doit se responsabiliser et opérer à très brève échéance une remise en question de la politique des finances publiques et donc anticiper une réduction des dépenses. Pour y parvenir, il faut un pilote dans l’avion. Il faut mettre en place un plan d’actions, un engagement (vis-à-vis du Parlement) permettant une meilleure gestion des finances fédérales et un appareil étatique plus efficient (intra et inter départements et entre la Confédération et les cantons). Plutôt que de viser des baisses spécifiques d’effectifs, le Conseil fédéral devrait s’employer à examiner la productivité de tous les départements et la réelle nécessité de certaines tâches afin de proposer des mesures permettant de faire des économies substantielles sur les dépenses annuelles récurrentes. Cet examen permettrait de fixer, par la suite, des orientations stratégiques et des actions concrètes, telles que la suppression des doubles-emplois, l’abandon de certaines tâches, la valorisation des prestations étatiques de qualité et la création de synergies dans les départements et entre les départements. Le respect du fédéralisme (donc du frein à la centralisation des compétences toujours plus rampante de la Confédération) aurait également un impact positif sur l’efficience des services cantonaux (prestations de qualité puisque proches de la réalité locale) et permettrait de supprimer des postes au sein de la Confédération (suppression de tâches incombant par la suite aux cantons).

Une chose est sûre: pour avoir des finances saines, il faudra compter avec une meilleure maîtrise des dépenses et inévitablement avec des réductions de dépenses. Les réformes structurelles proposées par le Conseil fédéral ne sont qu’un début, une bonne tentative. Mais, inévitablement, le Conseil fédéral devra tôt ou tard développer une stratégie globale et durable.

Alexa Krattinger, usam

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