Publié le: 9 décembre 2022

De grosses incertitudes pour les entreprises romandes

Cette fin d’année se caractérise par un contraste marqué entre la situation économique et les craintes des entreprises, comme de la population. Sur le terrain de l’emploi, la situation n’a jamais été aussi bonne. Malgré des prévisions clairement à la baisse, la marche des affaires est jugée satisfaisante. La compétitivité du pays demeure bonne et sa capacité d’innovation, excellente.

Face à ce tableau réjouissant, divers facteurs inquiètent. Le conflit en Ukraine continue de perturber les chaînes d’approvisionnement, tout en provoquant une crise humanitaire en Europe. Avec l’interruption des livraisons de gaz russe, ce conflit fait craindre des coupures énergétiques à la fin de l’hiver. Les conséquences de ces interruptions peuvent être terriblement dommageables pour toute la chaîne d’approvisionnement, indépendamment du secteur ou de la taille de l’entreprise.

La conséquence tangible et immédiate des perturbations secouant le marché de l’énergie est une augmentation massive de son prix, augmentation qui menace d’asphyxie un nombre considérable d’entreprises, PME en tête. Et l’on peut comprendre les appels à des mesures d’aide transitoires pour passer ce qui est une nouvelle crise, même si cela ne devrait pas devenir une habitude.

Les mesures annoncées en l’état sont fort sommaires, en dépit de progrès notoires dans la sécurisation de l’approvisionnement. Elles devraient céder la place à un mécanisme plus large, incluant la planification des éventuelles coupures et des aides pour les entreprises.

La FER Genève, comme l’usam, ont fait des propositions en ce sens. L’ensemble des tensions qui traversent actuellement le monde ont comme conséquence une reprise de l’inflation, l’Arlésienne des vingt dernières années. Elle est en Suisse moins importante que chez nos voisins, en raison notamment de la force du franc suisse. C’est en soi une excellente nouvelle, mais cette force peut constituer une faiblesse dans une économie tournée pour moitié vers l’exportation.

Devant la flambée des prix, la compensation intégrale du renchérissement est devenue le sujet principal des discussions entre partenaires sociaux. Les syndicats ont sorti l’artillerie lourde avec des demandes d’augmentation des salaires de 5 %, sans distinction du type d’entreprise ou du secteur d’activité. Ils tendent la corde à coups d’interruptions de travail dont la légalité est parfois douteuse. Du côté des entreprises, il n’est pourtant pas contesté qu’il faille offrir une certaine compensation, mais à la condition de mesurer la situation de la branche et de procéder à un arbitrage entre maintien de l’emploi et préservation du pouvoir d’achat.

Quel que soit le résultat des négociations paritaires, la rareté de la main d’œuvre, dont se plaignent beaucoup d’entreprises, pèsera aussi dans cette discussion. Elle jouera en faveur des salariés et, au vu de l’évolution démographique à venir, pèsera dorénavant sur les entreprises.

En toile de fond, le changement climatique se manifeste à vive allure. La sécheresse de cet été a perturbé la production d’énergie, ainsi que le trafic fluvial des marchandises, et posé la question de l’approvisionnement en eau. La poursuite d’activités touristiques essentielles pour des régions comme la moyenne montagne est clairement sur la table.

Les entreprises sont ainsi confrontées à des défis immédiats, comme l’inflation, les flux d’énergie et la raréfaction des matières premières, mais aussi à des questions qui ne recevront de réponses qu’à moyen et long terme.

Dans un environnement durablement instable depuis le Covid, l’objectif principal demeure de conserver des conditions-cadre compétitives, qu’il s’agisse d’infrastructure, d’éducation, d’ouverture vers l’étranger, en particulier avec l’Union européenne, de fiscalité, de relations sociales et de sécurité au sens large.

Lorsque l’incertitude grandit, il peut être tentant de recourir à des recettes simplistes, remettant en cause l’ensemble de nos institutions pour leur préférer des dérives autocratiques porteuses de prétendus remèdes. L’activisme climatique en est l’une des manifestations les plus récentes. Il faut s’en garder si l’on veut affronter les défis d’un monde de plus en plus complexe, avec le souci de garantir la prospérité au plus grand nombre et ne pas faire sombrer les valeurs libérales et démocratiques auxquels nous sommes toutes et tous attachés.

*Directeur général FER Genève

www.fer-ge.ch

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