Publié le: 14 avril 2023

l’édito

Prudence avec le terme «historique»!

Derrière nous, une semaine de session spéciale sur le Credit Suisse au Parlement fédéral. Un grounding jugé «historique». Mais il ne sera pas ici question de votes furieux, de dénigrements personnels et de revendications populistes au National. Nous allons plutôt nous concentrer une nouvelle fois sur la prévoyance professionnelle LPP. Une réforme ratée aux conséquences importantes pour le monde du travail. Pendant près de quatre ans, l’usam a exercé un lobbying intensif – principalement en coulisses.

Retour en arrière. C’est lors de la dernière session que la réforme de la LPP a été adoptée. De gauche à droite, tous étaient unanimes: le taux de conversion minimal devait être abaissé. L’administration fédérale estimait la redistribution des jeunes aux vieux à environ cinq milliards de francs par an. C’est contraire au système et inacceptable.

C’est là qu’intervient le compromis raté des partenaires sociaux. Il était porté par l’Union patronale suisse, l’Union syndicale suisse et Travail Suisse. La conférence de presse spéciale de juillet 2019 fut qualifiée d’«historique». Aujourd’hui, ce n’est plus qu’une date.

L’usam participant aux négociations déclarait alors à ce sujet dans sa consultation: «Nous n’avons pris nos distances avec ce compromis que lorsque les trois autres partenaires sociaux ont expliqué sans équivoque que pour eux, seule entrait en ligne de compte une proposition comprenant un développement marqué des prestations avec une redistribution à grande échelle financée elle-même par des pourcentages salariaux.» Dans la foulée, l’usam s’est déclarée prête à accepter des «mesures d’atténuation appropriées» ou des «coûts supplémentaires supportables». Une extension globale des prestations serait en revanche combattue. L’usam est restée fidèle à cette ligne validée par sa propre stratégie.

La critique seule n’étant pas d’une grande efficacité, l’usam a présenté dès 2019 sa propre solution, qui aurait généré environ un milliard de francs de coûts supplémentaires de moins que le compromis des partenaires sociaux. Mais le Conseil fédéral a repris avec empressement ce dernier, qui n’aurait pas manqué d’entraîner une augmentation des charges salariales dans les entreprises. Pire encore, une nouvelle redistribution directe aurait été intégrée dans le deuxième pilier. Il n’est pas surprenant que la gauche soutienne cette idée, mais qu’une organisation faîtière de l’économie l’ait trouvée à son goût, c’est très étonnant. Personne n’a été surpris de voir cette organisation jouer au «spectateur au bord du terrain» pendant que le débat au Parlement tournait au désastre. On n’a pas vu que cette solution des partenaires sociaux ait été capable de réunir la moindre majorité sous la Coupole. Le projet du Conseil fédéral n’aura même pas survécu à l’examen par la première chambre.

Cela posé, le projet de LPP adopté par le Parlement n’est pas non plus convaincant dans sa forme actuelle: coûts annuels supplémentaires élevés de plus de deux milliards de francs avec des conséquences négatives. Sans oublier des coûts supplémentaires disproportionnés pour les personnes travaillant à temps partiel et les bas salaires. Il est fort probable qu’un vote référendaire aura lieu début mars de l’année prochaine. Il sera intéressant d’observer qui, parmi les partis favorables, mènera alors la campagne de votation. Et il sera tout aussi intéressant de voir comment le terme «historique» sera utilisé.

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