Publié le: 12 mai 2023

Maîtrise des dépenses, les risques

FINANCES FÉDÉRALES – La Confédération est endettée comme jamais auparavant. La pandémie, le sauvetage d’Axpo et les crédits de liquidités pour le Credit Suisse montrent qu’aucune amélioration n’est en vue. Et comme la lutte contre l’inflation n’est pas terminée, on voit à quel point les finances fédérales seront encore mises sous pression.

La dette de la Confédération a atteint 120 milliards de francs en 2022. Les niveaux les plus importants d’endettement en temps de paix, car normalement c’est notamment l’état de guerre qui génère des dépenses phénoménales. Cependant, le train des dépenses ne semble pas se ralentir. Il y a eu la pandémie avec les aides aux entreprises, puis le mécanisme de sauvetage pour soutenir le producteur d’électricité Axpo – et désormais les crédits pour assurer les liquidités de Credit Suisse.

La Confédération doit aussi résoudre un autre problème avec les prêts de trésorerie qui sont mis à la disposition des CFF. Elle s’y attelle et c’est correct de le faire maintenant. Il vaut mieux tard que jamais. Notons toutefois, que ces avances financières ne sont pas comptabilisées dans le frein à l’endettement. Il faut savoir que les CFF sont endettés de 11 milliards de francs.

D’une ampleur considérable

Les CFF peuvent recourir aux prêts de trésorerie de la Confédération. Cela n’affecte pas directement les finances fédérales et ne rentrent pas en ligne de compte pour le frein à l’endettement. Le problème, c’est que ces prêts de trésorerie ont commencé à prendre des proportions importantes. De presque insignifiants en 2008, ces prêts se montent à près de 4,45 milliards de francs (4 milliards à long terme et 450 millions à court terme). Ces lignes de crédit échappent totalement au frein à l’endettement. Les prêts accordés au CFF par la Trésorerie fédérale sont continuellement renouvelés. Il s’agit donc d’une augmentation de la dette brute de la Confédération, hors frein à l’endettement. La question se pose de savoir s’il y aura bientôt d’autres problèmes où la Confédération devra intervenir et fournir des liquidités ou des aides. L’histoire montre que le rythme des vaches grasses puis des vaches maigres ne s’est jamais arrêté. La Confédération devrait absolument chercher à remettre la main sur ses dépenses pour maîtriser leurs évolutions, sinon la réactivité financière des autorités ne sera plus donnée. Or, les crises ont montré qu’il faut disposer d’une réserve financière pour pouvoir agir sans augmenter les coûts de son action. En effet, l’augmentation de la dette signifie également une hausse du service de la dette. Il est clair que le service de la dette de la Confédération s’est largement réduit avec les taux d’intérêts négatifs. Au point même que cela rapportait de l’argent à la Confédération d’émettre des titres de dettes avec les taux d’intérêts négatifs.

L’usam est convaincue que la remontée des taux d’intérêts va amener un lot de mauvaises surprises à des pans de l’économie qui se sont développés et malheureusement habitués à des taux d’intérêts trop bas pour le prix du loyer de l’argent. Concrètement, les taux d’intérêts bas ont soutenu des investissements qui ne s’avèreront pas rentables avec des taux d’intérêts plus élevés. Il est déjà possible de voir que les banques régionales se retrouvent sous une énorme pression entre les crédits qu’ils ont accordés à taux bas alors qu’elles se retrouvent maintenant face à des lignes de refinancement dont les taux augmentent. La lutte contre l’inflation n’étant pas encore totalement gagnée, il y a fort à parier que de fortes pressions risquent de s’exercer sur la Confédération.

Dans ce contexte, il est d’autant plus regrettable d’entendre s’élever des voix dans l’administration fédérale qui plébiscitent une augmentation de l’endettement de la Suisse pour répondre à des dépenses supplémentaires comme avec la reconstruction de l’Ukraine. L’argument étant que la Suisse ne serait pas autant endettée que les autres pays. Il est impératif de compter l’endettement total de la Suisse en additionnant aussi la dette privée. Dans ce cas, la Suisse se retrouve dans le même ordre de grandeur que les autres pays.

Mikael Huber, usam

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