Publié le: 2 juin 2023

Avec courage et un brin de nostalgie

ASSOCIATION SUISSE DE MARCHÉ – Après une pandémie qui a menacé son existence et un saut générationnel, le secteur retrouve son essor. Peter Hutter, le nouveau président, veut faire souffler un vent de fraîcheur en recrutant de nouveaux membres et en ancrant plus fortement l’association au plan politique.

L’odeur des amandes grillées, la barbe à papa, les rampes lumineuses, les ballons multicolores, les rires joyeux des enfants, les stands de marché colorés et une bouchée de pain d’épices sucré – impossible de résumer d’un trait l’ensemble des stimulations sensorielles que l’on ressent au marché et à la fête foraine. Une ambiance inégalable qui ne peut qu’être vécue en présentiel.

APRÈS LA PANDéMIE, LES GENS ONT LITTÉRALEMENT pris d’assaut LES MARCHÉS et les fêtes foraines.

Aucune App au monde ne peut remplacer le vent qui souffle dans les cheveux quand on se lance dans un tour en carrousel. «Après cette pandémie, les gens ont littéralement pris d’assaut les marchés et les fêtes foraines», confirme Peter Hutter, président de l’Association suisse des marchés (ASM). Le Rhénan chevauche la tête de l’association depuis le début de l’année. À ses yeux, le recrutement de nouveaux membres, le renforcement des sections ainsi que l’ancrage politique de l’association professionnelle figurent en tête des priorités.

Sans oublier les grands défis

La branche tire bien sûr parti de la pression mise sur le commerce de détail local par les grands distributeurs, les chaînes et le commerce en ligne. «C’est une niche qui représente souvent une chance de survie pour nos membres, explique notre interlocuteur. Si le marchand de chaussures du coin a dû mettre la clé sous le paillasson, celui qui dispose d’un stand au marché une ou deux journées par mois a encore toutes ses chances.»

La tendance à proposer davantage de produits alimentaires et de nourriture sur les marchés s’observe de manière nette. «Nous le constatons aussi chez les nouveaux membres.» Le secteur se considère comme un complément par rapport au commerce stationnaire. Les bistrots locaux profitent des marchés, qui oserait le nier? Les terrasses sont pleines le jour du marché. Et quand le marché dure quelques jours, cela booste les nuitées. D’autres retombées sont avérées: les visiteurs redécouvrent souvent certains commerces stationnaires le jour du marché.

les marchés profitent à tout le monde, au commerce stationnaire et au commerce en ligne.

«Nous considérons que les marchés profitent à tout le monde, au commerce stationnaire et au commerce en ligne.» Dans les stands, en effet, nombreux sont ceux qui ne considèrent pas Internet comme une concurrence, mais entretiennent leur propre canal de distribution «online».

Mais le marché est avant tout un instrument qui permet de stimuler les sens. «Les odeurs, les couleurs, plus ou moins tout s’offre au toucher, au goût, au plaisir visuel et au commentaire. Aucun écran ne peut remplacer cela. Et puis, cela permet de faire de belles rencontres», relève notre interlocuteur.

Collaboration interne au secteur

La pandémie a laissé des cicatrices encore visibles et profondes. De nombreux membres ont survécu au cours d’années difficiles et avec des problèmes de liquidités. Suite à cette crise, une génération est partie à la retraite. Et pour certains qui faisaient du commerce sur les marchés leur deuxième activité, il a fallu chercher une source de revenus plus sûre. «Nombre d’entre eux ne sont pas revenus.» Mais ce changement de génération offre aussi de nouvelles perspectives à tout le secteur. «Nous encourageons les plus jeunes à gagner leur vie sur le marché et nous voulons être un lien entre les vendeurs des commerces du marché et les éventuels créateurs d’entreprise», explique Peter Hutter. Moins de fournisseurs et plus d’emplacements, c’est une chance pour les nouveaux venus de se construire dans ce secteur plutôt concurrentiel. «Il fut un temps où les listes d’attente étaient longues. Nous n’oublions pas que c’était il n’y a pas si longtemps que ça», sourit Peter Hutter.

Le grand engagement de l’ASM au service de ses membres pendant la pandémie a renforcé la solidarité entre celle-ci et les autorités du marché et motive encore davantage la collaboration au sein de la branche.

Un bien culturel à valoriser

Au plan politique, la branche a une demande claire: «Nous ne sommes en aucun cas un modèle en voie de disparition et nous souhaitons être reconnus et promus avec toute l’insistance possible auprès des politiques comme un bien culturel séculaire. Il y a encore des choses à faire et nous devons y travailler intensivement», souligne Peter Hutter.

De même, la frénésie réglementaire doit impérativement être limitée. «Les prescriptions ne cessent d’augmenter et avec elles le temps que nous devons passer au bureau.» Le commerce de marché est le deuxième plus ancien métier du monde et, malgré toutes les difficultés, il s’est étonnamment bien adapté aux changements actuels. «C’est pourquoi le plus grand défi est de ne pas se laisser aller et de continuer à rendre le marché attractif.»

Peter Hutter envisage l’avenir de manière positive. C’est dans la nature de cette branche de passionnés. Les marchés, les fêtes foraines et les expositions s’adaptent à l’évolution actuelle de la société et de la clientèle – sans oublier que les visiteurs valorisent aussi une certaine dose de nostalgie ou de kitsch.

L’énorme boom des marchés de Noël, qui ont tous lieu en plein air, en est une démonstration flagrante. Ce fut le cas en pleine pandémie et c’est encore plus vrai depuis le retour à la normalité.

Corinne Remund

adaptation: JAM

www.marktverband.ch

(disp. seulement en allemand)

coup de projecteurMille jours de marché

L’ASM dans les marchés et les fêtes foraines

Il y a 113 ans, les marchands dépendaient des transporteurs et des chemins de fer pour acheminer leurs marchandises sur les marchés. À un moment donné, les coûts de transports se sont envolés et certains acteurs ont décidé d’affronter ensemble cette situation. C’est ainsi qu’est née l’Association suisse des marchés (ASM). Elle a été créée le 17 juin 1910. La mission première de l’association est de donner à ses membres un visage public – auprès des autorités, en politique et face à la concurrence d’autres secteurs. Pour ce faire, elle a créé un réseau avec d’autres associations, fédérations, organisations et institutions diverses et variées.

Mille jours de marché

Dans ses activités, les prises de position sur les projets de lois et d’ordonnances qui impactent directement les commerçants du marché font aussi partie de ses attributions, tout comme la préservation du bien culturel qu’est le marché. Autre phénomène à relever: de plus en plus de polices locales ont été dissoutes ou intégrées aux polices cantonales. Pour certaines d’entre elles, c’est encore une musique d’avenir. Tout cela peut parfois entraîner certains manques dans l’organisation locale des marchés, puisque celle-ci est l’affaire des communes. Surtout compte tenu de l’ampleur du phénomène: en tout, près de 1000 jours de marché sont organisés chaque année par l’association ou avec la collaboration directe de l’association pour les commerçants du marché.

L’association regroupe environ 600 membres actifs. Il s’agit de microentrepreneurs, de PME et de propriétaires de SA ou de Sàrl. Environ 15 000 personnes sont actives dans cette branche, qu’il s’agisse d’entreprises diverses, de fournisseurs de biens, ou de services. Le marché des marchandises génère à lui seul un chiffre d’affaires annuel d’environ 330 millions de francs. Si l’on ajoute les entreprises de vente au détail, cela représente plus d’un milliard de francs.CR/JAM

Les plus consultés