Publié le: 7 juillet 2023

Combler les lacunes avant de se lancer

profils d’exigence – L’adéquation entre les compétences scolaires et les exigences de l’apprentissage professionnel doit être améliorée. Certains instruments comme les «grilles de compétences bernoises» ou les «Mindsteps» permettent aux jeunes de combler les lacunes. Les premiers projets partiels dans les cantons de Berne et de Soleure montrent des retours positifs.

Le choix d’un métier ainsi que le passage de l’école obligatoire à la formation initiale sont des processus individuels dans lesquels de nombreuses pièces du puzzle doivent s’emboîter: les intérêts et la motivation personnels des élèves, leurs aptitudes scolaires et pratiques, leurs compétences méthodologiques, sociales et personnelles ainsi que leur environnement familial influencent le choix professionnel.

Grâce à des instruments d’exercice comme les grilles de compétences, les élèves peuvent identifier les exigences scolaires des métiers envisagés et combler les manques encore existants au cours de la neuvième année scolaire. «Il est important que ces lacunes puissent ensuite être comblées de sorte que l’entrée dans la formation professionnelle initiale puisse se faire au mieux. Et au final, l’apprentissage peut être achevé avec plus de succès», explique Michèle Lisibach, responsable de la formation professionnelle à l’usam.

Pour que les élèves acquièrent les ressources et les compétences indispensables dans le monde d’aujourd’hui et qu’ils soient équipés pour répondre aux exigences futures, les écoles primaires doivent aussi développer une compréhension du monde du travail actuel. Les enseignants des écoles professionnelles devraient dans cette optique se familiariser avec ce qui est fait à l’école obligatoire et en tenir compte dans leur planification. «Les acteurs des deux niveaux de formation doivent savoir où se situent leurs points d’ancrage», relève Karin Rüfenacht, responsable de la formation professionnelle au Secrétariat général de la CDIP. Un point de référence commun aux deux domaines de formation est fourni par l’orientation compétences. Celle-ci se retrouve aussi bien dans le programme d’enseignement (Lehrplan 21) que dans toutes les ordonnances sur la formation des formations professionnelles initiales.

«Les profils d’exigences et les grilles de compétences offrent la possibilité de réorienter la transmission des connaissances et la collaboration entre les différents niveaux scolaires», ajoute Karin Rüfenacht. Le projet «anforderungsprofile.ch: schulische Instrumente für die Berufswahl und - vorbereitung» (profils d’exigences.ch: instruments scolaires pour le choix et la préparation d’une profession) émanant de la Conférence des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) se situe à l’interface entre les profils d’exigences existants du monde professionnel et les compétences de l’école obligatoire. Concrètement, il s’agit d’optimiser la transition entre le degré secondaire I et le degré secondaire II de la formation professionnelle. Il est en effet nécessaire de faire le lien entre ses propres compétences scolaires et les exigences des apprentissages professionnels.

«Il est important pour les élèves de connaître leur niveau de performance personnel afin de pouvoir développer de manière autonome leurs possibilités de développement scolaire en vue de la profession souhaitée», ajoute Karin Rüfenacht. Le moteur fondamental de cette «construction de ponts» entre le secondaire I et les écoles professionnelles est l’objectif de la Confédération et des cantons en matière de politique de formation, à savoir que 95 % de tous les jeunes adultes disposent d’un diplôme du secondaire II à l’âge de 25 ans.

«Il est indispensable d’associer les OrTra au projet.»

Pour atteindre cet objectif, la préparation au choix professionnel revêt une importance centrale: en plus des bilans de compétences, des stages d’initiation, les contrôles (non) commerciaux, les bulletins scolaires et les entretiens, un autre instrument est nécessaire: le lien entre les profils d’exigences existants et établis et le choix et la préparation à la formation professionnelle initiale. C’est ce que confirme Michèle Lisibach: «Il est important qu’un lien soit établi entre les capacités et les acquis de l’école obligatoire et les exigences de l’entreprise et de l’école professionnelle.»

Et c’est là qu’interviennent des instruments de soutien comme les «grilles de compétences bernoises» et les «Mindsteps». «Ils sont d’une grande aide, car ils montrent aux jeunes le chemin de la formation initiale en soutenant le développement des compétences requises», complète Michèle Lisibach.

Premières expériences positives par Berne et Soleure

Cinq cantons pilotes ont été invités à participer à ce projet partiel d’instruments avancés pour les profils d’exigences. En plus de Berne, Soleure y participe aussi. Les retours – au centre de formation professionnelle BBZ d’Olten – semblent positifs. «Nos expériences montrent que la grille de compétences est un instrument utile, estime Daniel Hofer, recteur de l’école professionnelle santé-social du BBZ Olten. La grille de compétences offre un aperçu complet des exigences en mathématiques et de la première langue allemande. Elle contient aussi des modèles d’exercices spécifiques pour améliorer ces deux compétences.»

Dans ce cadre, Soleure déploie en plus ce que l’on appelle des «Mindsteps». Cet instrument est une collection numérique d’environ 25 000 tâches pour l’allemand, les mathématiques, l’anglais et le français. Le concept et la théorie des tests de «Mindsteps» se basent sur les «Checks» de l’espace de formation de la Suisse du Nord-Ouest et les développent. La plateforme est centrée sur le principe de «rendre l’apprentissage visible», selon les conceptions du pédagogue néo-zélandais John Hattie. «Les tâches de ‹Mindsteps› couvrent les compétences jusqu’à la fin de l’école obligatoire et sont liées au programme scolaire (Lehrplan 21), ajoute Daniel Hofer, les élèves et les enseignants peuvent définir des tâches qui peuvent être résolues sur l’ordinateur indépendamment de l’endroit où ils se trouvent.» Les feedbacks sur les progrès d’apprentissage soutiennent les élèves dans leur processus d’apprentissage et permettent aux enseignants d’intervenir de manière ciblée.

Impliquer les OrTra

L’instrument «Grille de compétences bernoise» est mis à la disposition de tous les cantons intéressés dans le cadre du projet de la CDIP et déployé dans toute la Suisse. La condition préalable est une collaboration des services de l’enseignement obligatoire et de la formation professionnelle au sein d’un canton.

«Avec ce projet, nous mettons à la disposition de tous un instrument gratuit et non commercial qui relie de manière optimale les compétences du plan d’études de l’école obligatoire aux exigences scolaires des apprentissages professionnels», se réjouit Karin Rüfenacht. En regardant les offres commerciales de longue date telles que «Multicheck®» et «Basic Check®», la spécialiste de la formation estime que «finalement, les cantons sont libres de décider si et comment leurs propres tests de performance ou bilans de compétences sont proposés». «C’est le marché qui détermine quels tests sont utilisés comme instruments de mesure des performances, confirme Daniel Hofer, je suis d’avis que notre conception est très convaincante.»

Il faut impliquer les organisations régionales du monde du travail (OrTra). «Les partenaires se mettent d’accord sur un langage commun, es centres de formation régionaux sont intégrés dans le processus et reconnaissent le bien-fondé de l’instrument, précise Karin Rüfenacht. La recherche se poursuit et vise d’autres cantons potentiellement intéressés par la grille bernoise. Quelle sera la suite pour le projet soleurois baptisé AKM («Anforderungsprofile – Kompetenzraster – Mindsteps»)? La prochaine étape consistera à tester et à évaluer cet AKM à grande échelle dans les deux centres de formation professionnelle concernés (BBZ Olten et BBZ Solothurn-Grenchen), en impliquant 700 apprentis de différentes filières professionnelles. «Il est prévu d’organiser une manifestation commune aux deux BBZ avec les enseignants de l’école obligatoire et de présenter le projet pour mettre sur pied une collaboration», conclut Daniel Hofer. Corinne Remund

www.profilsdexigences.ch

grille de compétenceS bernoise en suisse latine

Adapter en s’abstenant de traduire

Les «grilles de compétences bernoises» doivent aussi être déployées dans la Suisse latine. Cela se fait sous l’égide de la partie francophone du canton de Berne et en collaboration avec la conférence régionale CIIP.

Le défi actuel réside dans le fait que les grilles de compétences ne peuvent pas être simplement traduites de l’allemand en français. Elles se basent sur le Plan d’études romand (PER) et non sur le Lehrplan 21. «Il faut donc une révision fondamentale du contenu et non pas une simple traduction», constate Karin Rüfenacht, responsable de la formation professionnelle au Secrétariat général de la CIIP. Et elle ajoute: «En Suisse latine, ce sont des instruments de soutien individuel et de comblement des lacunes qui sont demandés, plutôt que des instruments de test.»

L’attestation des compétences transversales, un instrument qui met en évidence les softskills personnels des élèves, est actuellement en cours de révision par la CIIP en vue d’une généralisation à l’ensemble de la Suisse. Il vise à «contrebalancer» les notes scolaires. CR

www.ciip.ch

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