Publié le: 6 octobre 2023

lE NEZ DANS LE DICO

La différence entreminutie et méticulosité

Depuis aussi longtemps que je m’en souvienne, les personnes de mon entourage m’ont qualifiée de personne méticuleuse ou minutieuse – quand elles voulaient être sympathiques avec moi. Il faut dire que si on veut me trouver des antécédents familiaux, on est servi! Avec un grand-père mécanicien automobile, un autre mécanicien de précision et un père technicien, un oncle ingénieur en mécanique et un frère automaticien, le moins que l’on puisse dire, c’est que la minutie ainsi que la méticulosité sont inscrites dans l’ADN des mâles de ma famille (au même titre que l’huile de lubrification des machines).

Dès ma plus tendre adolescence, j’ai donc effectué du contrôle qualité en suivant avec beaucoup d’application les consignes rigoureuses de mon père. Puis peu à peu, les pièces que je tenais entre mes mains se sont métamorphosées en mots, enregistrés, transcrits, corrigés, analysés, ou encore traduits. Et c’est avec toute la même minutie et méticulosité requises que je les recherche, sélectionne, travaille, modifie pour garantir la qualité du texte que je construis pour mes chroniques.

Par curiosité – une autre de mes innombrables qualités – j’ai recherché des offres d’emploi contenant les mots-clés minutieux et méticuleux pour vérifier la pertinence de mon histoire familiale dans cette chronique. Du fact-checking pur et simple en somme. Existe-t-il réellement une différence entre la minutie et la méticulosité?

Place au «haul» de ce que j’ai trouvé! Deux fois oui: les postes de travail demandant de la minutie et de la méticulosité concernent le plus souvent l’industrie horlogère et tout ce qui a trait à la mécanique de précision, mais aussi le domaine du bâtiment, plus précisément les métiers de ce qu’on appelle les «finitions», à savoir les carreleurs et peintres dont on apprécie le «travail bien fait».

Petit voyage dans le temps avec le Dictionnaire historique de la langue française: méticulosité est le nom commun féminin dérivé de l’adjectif méticuleux. Au 16e siècle, cet adjectif provenant du latin meticulosus «craintif, timide», reste rare en français. Ce n’est qu’au 19e siècle que ce mot prend le sens d’«empreint de scrupules» en parlant d’une personne, puis au sens moderne de «qui a le goût du petit détail». Ce n’est qu’ensuite que le mot a servi à qualifier un acte, un comportement ou encore un travail qui est le fruit d’un esprit minutieux.

Méticulosité est attesté également au 19e siècle en restant rare – ce que confirme le Larousse en ligne en l’évaluant comme littéraire. De nos jours, faire preuve de méticulosité signifie «apporter beaucoup d’attention, de soin à ce que l’on fait».

Minutie, quant à elle, est un nom féminin emprunté du 17e siècle au latin minutia «petite parcelle, poussière». À cette époque, ce mot désignait uniquement «un petit détail qui ne mérite pas qu’on s’y arrête». Nous avons conservé ce sens, mais l’avons relégué à un usage littéraire.

Au 18e siècle, minutie a pris le sens commun et moderne que nous connaissons à ce jour: «attention accordée aux détails». L’histoire de ces deux mots est donc très étroitement entrelacée. Aujourd’hui, être «méticuleux» signifie apporter beaucoup de soin et d’attention à ce que l’on fait, tandis qu’être «minutieux» signifie s’attacher avec minutie à des détails, ou fait avec un grand scrupule, une grande attention.

La différence entre ces deux mots est donc infinitésimale selon moi; et il faudrait être extrêmement minutieuse pour affirmer qu’elle existe réellement.

Laura Di Lullo

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