Publié le: 5 avril 2024

Encore du potentiel RH pour les seniors

marché du travail – Daniel Wüthrich, directeur de la filiale biennoise d’OK Job, commente le ralentissement bien perceptible dans le placement de personnel fixe et temporaire. Il faudra selon lui davantage recruter à l’étranger.

JAM: Qu’avez-vous observé au cours des dernières années?

Daniel Wüthrich: À Bienne, nous sommes spécialisés dans l’industrie, la technique, l’industrie horlogère et le tertiaire. Depuis une année, nous nous occupons aussi du bâtiment. Notre équipe compte quatre personnes et le marché couvre la région de Bienne et du Seeland jusqu’au Landeron, à Lyss et à Granges. Je suis arrivé dans l’entreprise en 2018. Après une pandémie vraiment critique, la reprise s’est fait sentir dès juin 2022: d’abord dans l’industrie, la technique, les machines. De juillet 2022 à novembre 2023, nos affaires ont repris du nerf à cause du manque de personnel qualifié. Une période dans l’ensemble assez bonne, car de nombreux acteurs voulaient construire de nouvelles équipes et engager des collaborateurs.

Quid de la période actuelle ?

Dès novembre dernier, nous avons senti une baisse de la demande sur le marché du travail. Cela s’est ensuite stabilisé à un bas niveau. En janvier, le ralentissement est devenu nettement perceptible. Certains clients se demandent s’ils vont remplacer des gens qui partent. Personne ne croyait à l’hypothèse d’un ralentissement en 2024, mais il faut voir la réalité en face: ce coup de frein va durer une bonne partie de l’année et en tout cas jusqu’en automne.

La pénurie incite-t-elleles entreprises à privilégier les temporaires au lieu des fixes?

Je constate qu’elle frappe autant le marché des temporaires que celui des fixes. Dans la construction, la demande concerne désormais presque exclusivement les temporaires. La marge de manœuvre est limitée.

Qu’observez-vous dans les comportements?

Ce qui me frappe, c’est que les entreprises attendent très longtemps avant de prendre une décision. L’état d’esprit des gens qui cherchent un emploi a bien changé. Une tendance se confirme: en seize ans de métier, je n’avais jamais vu les gens réfléchir aussi longtemps avant d’accepter une proposition. La question du salaire n’est pas reléguée au second plan: elle devient de plus en plus importante.

Une autre réflexion, c’est que la tendance à engager des seniors ne s’est pas vraiment concrétisée. Le réflexe des employeurs reste malgré tout de chercher d’abord quelqu’un de plus jeune. Puis, à défaut, on se tourne vers des profils de personnes plus âgées. Du côté de la mixité entre femmes et hommes, nous sommes sur le bon chemin.

Comment qualifieriez-vous votre relation aux ORP?

Nous travaillons beaucoup avec les ORP, bien sûr parce que nous sommes obligés d’annoncer certains postes de travail. Mais aussi parce que finalement nous tirons tous à la même corde et que le fait d’avoir des contacts directs permet parfois de dénicher le talent qui manque à une entreprise.

Ă€ quoi les RH devront-ellesfaire attention?

Le recrutement devra davantage se faire dans les pays limitrophes. Certains secteurs mériteront plus d’attention comme la technique, le bâtiment, l’hôtellerie-restauration et le médical. Je serai très attentif au secteur technique, à celui des machines et à l’industrie – des domaines particulièrement exposés à la force du franc et à l’évolution des exportations. Nous vivons avec ce problème du franc fort depuis plusieurs années et cela va se prolonger. Je prévois aussi de nouvelles délocalisations au cours des cinq à dix prochaines années, avec des conflits sociaux à la clé.

François Othenin-Girard

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