Publié le: 9 août 2024

L’ancien analyste devenu pèlerin

trajectoire – Pierre Cloux, qui est déjà intervenu dans nos colonnes, apprivoise depuis plusieurs années

une nouvelle activité. Après avoir bouclé son fonds de placement, le Swiss Equity Discovery Fund, cet ancien analyste

s’est reconverti et arpente les sentiers creux et les chemins de rencontre. Patience, persévérance sont aussi de mise.

En octobre 2021, peu après que j’eus pris la décision de fermer mon Swiss Equity Discovery Fund et de me retirer de la gestion de fonds, la Russie a commencé à déplacer des troupes et des équipements militaires vers sa frontière avec l’Ukraine, ravivant les craintes d’un conflit potentiel après les manifestations de l’Euromaïdan en 2014. En décembre, les responsables du renseignement américain ont averti que la Russie pourrait préparer une invasion pour le début de l’année 2022. Le 24 février, à 4 heures du matin, le monde s’est réveillé de ce mauvais rêve pour découvrir une réalité effrayante. Nous n’étions pas encore sortis de la pandémie de Covid-19 lorsque la Russie de Poutine est entrée en Ukraine et a commencé à larguer des bombes sur sa capitale, Kiev.

«Un spectacle déchirant»

Au printemps 2022, j’étais occupé à écrire mon livre sur l’investissement (baptisé «CHF12.27»), mais la guerre en Ukraine me touchait. Je me demandais comment nous, en Europe, avions pu nous mettre à nouveau dans un tel pétrin. Je voulais faire quelque chose, contribuer d’une manière ou d’une autre. L’idée m’est venue d’entreprendre un pèlerinage et de collecter des fonds pour quelques organisations caritatives.

En juillet, j’ai fait une pause dans «CHF12.27», j’ai préparé mon sac à dos et mes bâtons de randonnée et j’ai pris l’avion pour Cracovie, où j’ai retrouvé Hilde et Hubert, mes amis pèlerins. Notre objectif était d’atteindre la frontière ukrainienne à pied, en parcourant une distance de 320 km en 13 jours.

Lorsque nous sommes arrivés dans la ville frontalière de Przemyšl, nous avons vu des femmes et des enfants ukrainiens s’enfuir, paniqués, à bord de trains bondés en direction de l’ouest. C’était un spectacle déchirant.

C’est là que, témoin de cette tragédie, ma conscience s’est réveillée et m’a poussé à faire quelque chose de concret, à prendre position contre cette guerre qui s’est installée à nos portes. C’est-à-dire travailler pour la paix.

«Je marcherai jusqu’à Kiev»

Mais pour moi, travailler pour la paix, c’est être en paix. Et j’ai trouvé la paix en marchant vers la frontière ukrainienne. Sur notre chemin, nous avons croisé de magnifiques églises en bois (ou «tserkvas»), des monuments classés au patrimoine culturel mondial de l’UNESCO.

Je me suis promis que, lorsque le conflit dans cette partie du monde prendra fin – et il prendra fin un jour –, je marcherai jusqu’à Kiev pour visiter les nombreuses autres églises séculaires disséminées dans l’ouest de l’Ukraine. Vous pouvez dire que je suis un rêveur. Mais je suis aussi un marcheur. Donc, pour moi, travailler pour la paix signifie marcher pour la paix.

«En passant par Haïfa»

Comme si j’avais encore des doutes sur cette vocation soudaine qui est la mienne, le 7 octobre a eu lieu l’attaque du Hamas contre Israël et le massacre de civils, suivis de la réponse brutale du gouvernement israélien de Netanyahou.

Ce conflit, qui est toujours en cours, a confirmé toutes mes craintes. Quelques mois plus tôt, en février 2023, j’arrivais au terme de mon pèlerinage à Jérusalem, que j’avais entamé plusieurs années auparavant depuis ma ville natale. Dicle, mon amie pèlerin et Turque, et moi-même sommes partis à pied d’Akko, en passant par Haïfa, Nazareth, la mer de Galilée et la vallée du Jourdain, jusqu’à Jérusalem-Est, en traversant la Cisjordanie. Aujourd’hui, il n’est plus possible d’entreprendre un tel voyage, ce qui me rend à la fois triste et indigné.

«Halte prévue à Auschwitz»

J’ai déjà fait quelques pas vers ce nouvel emploi. J’ai déjà traversé à pied mon pays d’origine et atteint la ville autrichienne d’Innsbruck. Je dois maintenant atteindre l’ancienne capitale polonaise, Cracovie. Le 10 juillet, je prendrai mon sac à dos et mes bâtons de randonnée, je me rendrai à Vienne et je me mettrai en route pour parcourir les 400 km qui me mèneront à Cracovie au plus tard au début du mois d’août, en prévoyant une halte à Auschwitz-Birkenau en cours de route.

Chers amis, permettez-moi de vous faire part de deux convictions:

1. Prendre parti dans un conflit entre des personnes est inutile.

2. Quand la guerre éclate, l’humanité est toujours perdante.

Maintenant, si vous voulez participer à ma démarche, vous pouvez m’accompagner pendant quelques jours, auquel cas je vous enverrai mon chemin de pèlerinage. Mais rien ne vous y oblige. Je serais surtout heureux d’entendre vos réflexions et vos préoccupations sur la situation du monde d’aujourd’hui.

Comme le disait John Lennon: «Vous pouvez dire que je suis un rêveur, mais je ne suis pas le seul. J’espère qu’un jour vous nous rejoindrez, et que le monde vivra comme un seul homme.»

Pierre Cloux

(texte rédigé en juin 2024)

pierre.cloux@googlemail.com

Un article paru dans le JAM

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