L’objet fédéral sur lequel les Suisses voteront vraisemblablement en novembre vise à faire coïncider l’offre avec les besoins en mobilité de la population (et non l’inverse!). En outre, il ne s’agit pas d’augmenter les capacités tous azimuts, mais d’élargir quelques tronçons saturés. Les maîtres mots sont ici la proportionnalité et l’«économicité» (...).
Face Ă cette situation, il est crucial que la Suisse cesse de rester les bras ballants.
L’un des tronçons concerne notre région. Il s’agit de l’élargissement de 2×2 à 2×3 voies de l’A1 entre Nyon et Le Vengeron (GE). Au fil des ans, ce tronçon est devenu un goulet d’étranglement. En effet, les infrastructures routières n’ont pas suivi l’évolution des besoins du bassin qu’elles desservent. Rappelons que l’autoroute A1 Lausanne–Genève a été planifiée dans les années 1950. Depuis son inauguration en 1964, elle n’a guère évolué, alors même que la population de la région a beaucoup crû.
Ainsi, la Suisse ne comptait que 5,3 millions d’habitants au début des années 1960 alors qu’elle en compte aujourd’hui plus de 9 millions (+70 %!). Quant au canton de Vaud, sa population a quasiment doublé durant le même laps de temps (+100 %!). Enfin, le district de Nyon, qui est le premier visé par ce projet d’élargissement, a vu sa population plus que tripler en passant de 29 000 à 107 000 habitants (+270 %!).
Sans surprise, les besoins en mobilité ont donc beaucoup augmenté dans la région et, désormais, le tronçon Nyon–Le Vengeron ne répond plus à la demande et risque la saturation. En effet, il voit passer environ 90 000 véhicules par jour, alors que l’A1 entre Lausanne et Genève n’était prévue que pour 20 000 véhicules par jour. Selon l’Office fédéral des routes (Ofrou), l’axe Nyon–Bardonnex (GE) est l’un des axes les plus saturés de Suisse (niveau 3/3), ce qui est jugé comme préoccupant.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que les prévisions démographiques laissent entrevoir la poursuite des dynamiques actuelles, avec comme corollaire de nouvelles dégradations des conditions de circulation. L’Ofrou prévoit ainsi une augmentation de la demande de mobilité de +11 % pour le transport de personnes et de +31 % pour le transport de marchandises d’ici à 2050.
Notons à cet égard que cette évolution est due à la croissance de la population, mais aussi à l’augmentation tendancielle de la consommation de loisirs liée à la baisse du temps de travail. Face à cette situation, il est crucial que la Suisse cesse de rester les bras ballants. Nos enfants et nos petits-enfants ont aussi le droit de bénéficier d’infrastructures de transports efficaces. Il en va certes de la prospérité économique de ce pays... mais aussi de justice intergénérationnelle.
Sans l’élimination de ces goulets routiers, le niveau de congestion va se renforcer et causer des dommages irréversibles à l’économie et en premier lieu aux consommateurs qui paieront leurs produits beaucoup plus chers en bout de chaîne en raison d’une accumulation de coûts de transport élevés. Rappelons que les embouteillages entraînent des pertes de temps qui ont un coût cumulé estimé à 1180 millions de francs en 2019 pour les seules routes nationales (OFS). Cette situation nuit de plus en plus à la qualité de vie dans les villages, crée des ralentissements, perturbe la chaîne d’approvisionnement, mais surtout provoque de l’insécurité routière (concurrence exacerbée entre les modes de transport sur une chaussée réduite: automobiles, piétons, vélos...).
Garder ce trafic sur une autoroute adaptée permettra de décongestionner le réseau annexe, de redonner de la tranquillité aux régions affectées par le trafic de transit et, enfin, d’améliorer la sécurité de tous les usagers de la route.
Christophe Reymond,
directeur général, Centre patronal