Publié le: 24 janvier 2025

Une analyse lumineuse

La poste – Le Tribunal administratif fédéral oblige la PostCom et l’OFCOM à examiner de plus près les reprises que la Poste effectue en dehors de son mandat de service universel. Enfin une bonne nouvelle.

Les récents arrêts du Tribunal administratif fédéral (TAF) de novembre 2024 concernant les activités commerciales de La Poste Suisse dans les secteurs privés apportent un éclairage fondamental sur les questions de concurrence et de gouvernance économique. Ces décisions, qui confirment les demandes de nombreuses entreprises privées et rejoignent les préoccupations de l’usam, constituent une étape importante dans la définition des limites que les entreprises publiques doivent respecter lorsqu’elles opèrent en dehors de leur mission de service public.

Concurrence déloyale masquée

L’expansion commerciale de la Poste, à travers ses acquisitions d’entreprises actives dans le domaine de la gestion numérique (KLARA Business AG, devenue ePost Service AG) et de la publicité extérieure numérique (Livesystems AG), reflète une stratégie qui va bien au-delà des exigences de son mandat de service universel.

Les acquisitions de la Poste lui permettent de s’implanter dans des secteurs très concurrentiels où sont déjà présentes des entreprises privées comme Abacus Research SA, spécialisée dans les logiciels de gestion, et Goldbach Neo, acteur majeur de la publicité extérieure numérique. Celles-ci se sont retrouvées face à un acteur public qui bénéficiait de ressources et d’avantages structurels inaccessibles aux entreprises privées, mettant ainsi en péril la concurrence loyale.

dans une économie libérale, les entreprises publiques ont une responsabilité.

Face à cette situation, les deux entreprises privées ont déposé des plaintes séparées auprès de la Commission fédérale des postes (PostCom) et de l’Office fédéral de la communication (OFCOM). Ces dénonciations visaient à remettre en question la légitimité des activités économiques de la Poste dans ces secteurs, car elles n’avaient pas de base juridique suffisante et faussaient la concurrence.

Législation inadéquate et gouvernance laxiste

Les entreprises ont aussi demandé que les acquisitions de KLARA et de Livesystems soient annulées ou, à défaut, que des mesures concrètes soient prises pour rétablir des conditions de marché équitables.

Ni la PostCom ni l’OFCOM n’étaient toutefois disposés à examiner les plaintes. Les deux autorités ont justifié leur refus par le fait que les entreprises dénonciatrices n’avaient pas, selon elles, la qualité de partie dans cette affaire. Ce refus, perçu comme une esquive d’une question centrale, a incité les entreprises à saisir le Tribunal administratif fédéral.

L’enjeu pour les PME suisses

Dans ses arrêts, le TAF a précisé que si une entreprise privée présentait des arguments valables concernant l’absence de base juridique ou le non-respect des principes de neutralité concurrentielle par un organisme public, la qualité de partie ne pouvait pas lui être refusée. Cette décision marque un tournant, car elle oblige désormais la PostCom à reconsidérer les annonces et à analyser en profondeur si la Poste remplit les exigences constitutionnelles et légales dans ses activités privées.

Pour l’usam, ces jugements confirment une position exprimée depuis des années: l’expansion non réglementée des entreprises publiques sur les marchés privés menace directement les PME, qui constituent le noyau du tissu économique suisse.

Une invitation Ă  agir

Déjà confrontées aux défis de la mondialisation et de l’évolution technologique, les PME doivent en outre faire face à une concurrence déloyale de la part d’entités soutenues par les pouvoirs publics. Cette double contrainte affaiblit leur compétitivité et, en fin de compte, leur capacité à innover et à créer des emplois.

On entrave le dynamisme entrepreneurial et on limite les possibilités de croissance.

La situation est d’autant plus préoccupante que le cadre économique actuel exige une allocation efficace des ressources. En permettant aux entreprises publiques de monopoliser des marchés sur lesquels elles n’ont pas de mission légitime, on entrave le dynamisme entrepreneurial et on limite les possibilités de croissance du secteur privé.

Ces arrêts du TAF ne représentent qu’un premier pas dans la bonne direction. Il reste à voir si les autorités, notamment la PostCom et le Conseil fédéral, saisiront cette occasion pour introduire un véritable contrôle des activités privées des entreprises publiques. L’usam continuera dans tous les cas à défendre l’idée d’un cadre légal clair garantissant que chaque acteur économique joue à armes égales, sans abus de position dominante ni intervention injustifiée de l’État.

Préservation de l’intégrité

Il ne s’agit pas seulement de protéger les PME, mais aussi de préserver l’intégrité du marché suisse, un pilier essentiel de la prospérité du pays. Si ce cas concerne spécifiquement la Poste, il incarne une problématique plus large: la responsabilité des entreprises publiques dans une économie libérale. Et dans ce domaine, l’usam ne fera aucun compromis ...

Mikael Huber, usam

www.fair-ist-anders.ch/fr

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