OUI à la suppression de la valeur locative
Protection des données, le monstre bureaucratique de trop
Elle est partout. Elle s’insinue dans tout ce qui fonctionne, pour que ça ne fonctionne plus. On l’invoque toujours avec de bonnes intentions. La protection des données est devenue le projet de ceux qui n’en avaient pas, de ceux qui cherchaient un moyen de casser les pieds aux autres.
Dans un postulat, un député valaisan clamait son amour pour WhatsApp: «Un outil extrêmement utile et pratique!» Pour finalement proposer de l’interdire. Récemment, un adulte expliquait à d’autres adultes qu’au nom de directives très officielles, l’application était désormais bannie des discussions entre ces mêmes adultes.
À Genève, toujours au nom de cette fichue protection des données, on a retiré Microsoft Office des écoles pour le remplacer par un logiciel que personne n’utilise. La protection des données est sauve, mais l’employabilité des enfants est sacrifiée sur l’autel de la conformité. Qui s’inquiète que les futurs citoyens soient incapables d’utiliser les outils du monde du travail? Qu’on leur donne des Smacky! Qu’ils apprennent la sténo!
L’absurdité bureaucratique atteint des sommets. Le Préposé fédéral à la protection des données a décrété qu’un propriétaire n’a plus le droit de demander à un futur locataire ses fiches de salaire ou même son état civil. Autrement dit, on interdit à celui qui s’apprête à confier son bien à un inconnu de vérifier si ce dernier a les moyens de payer. Faut-il bientôt tirer à la courte paille pour choisir son locataire, au nom du respect de la vie privée?
Infantilisante, la protection des données nous privera, pour notre bien, des prochaines versions de ChatGPT et des iPhones. Après les sempiternels «Acceptez-vous les cookies?», nous voilà désormais protégés contre les technologies modernes, contre un monde plus pratique, contre le progrès. En un autre temps, ces grands principes nous auraient préservés de la roue et du feu.
Les exemples ne s’arrêtent pas là . Récemment, j’ai décidé d’ouvrir un dossier électronique du patient (DEP). J’imaginais naïvement disposer d’un outil efficace pour échanger avec tous les médecins, pharmacies, assurances-maladie et hôpitaux que je serais amené à consulter. Quelle erreur! Le DEP n’est pas un outil pratique, c’est une bureaucratie numérique, une machine à cliquer frénétiquement sur des autorisations, un labyrinthe administratif où chaque fournisseur de prestations doit être validé individuellement pour consulter ou transmettre des données. Une usine à gaz si infernale qu’il est presque garanti que, le jour où l’on aura besoin d’une information vitale, elle sera bloquée quelque part entre un formulaire mal rempli et un consentement oublié.
Encore une fois, on préfère protéger mes données plutôt que ma santé. Mais bon sang! Si je le veux, pourquoi ne puis-je pas autoriser tout le corps médical à accéder librement aux résultats de ma dernière prise de sang ou aux comptes rendus de mes opérations? À force de vouloir sanctuariser des données, on oublie que leur utilité première est d’être accessibles aux bonnes personnes, au bon moment. La protection des données, c’est aussi une fabrique à paranoïaques: on nous a tellement répété que nos informations allaient être volées, piratées, revendues, que beaucoup finissent par voir un complot derrière chaque formulaire. À ce rythme, certains refuseront bientôt qu’un médecin note leur groupe sanguin, de peur que Big Brother ne leur vole leur ADN.
Si le seul outil que vous avez est un marteau, tout problème vous apparaîtra comme un clou. Les seules personnes autorisées à parler de protection des données sont évidemment les spécialistes du domaine. Ces avocats et informaticiens ne voient dans l’ordinateur que le risque gargantuesque de données volées, tout comme les écologistes les plus radicaux ne voient dans la voiture que ses émissions de carbone.
On oublie au passage que ces prophètes de la fin de la vie privée ont fait de la protection des données un business juteux qui ne rapporte rien à la société, mais coûte énormément à tous les citoyens – en temps, en énervement et en espèces sonnantes et trébuchantes.
Sur le fond, la protection des données, telle qu’elle est conçue sur notre continent, repose sur une absurdité philosophique dont personne ne veut débattre. Une question simple suffit pourtant à mettre à nu cette imposture: une donnée que vous avez volontairement transmise vous appartient-elle encore ? La LPD prétend que oui, mais cette réponse toute faite ne tient pas la route.
Il fut un temps où personne ne se posait la question. Ce que les autres savaient de nous leur appartenait. Si j’achète tous les matins un paquet de cigarettes au kiosque du quartier, le buraliste, les passants, les autres clients savent que je fume. Cette information, aussi sensible soit-elle (et si mon nom et mon prénom sont considérés comme sensibles, alors celle-ci relève carrément du secret d’État), ne m’appartient plus une fois sortie de ma sphère privée. Et jusqu’à récemment, aucune loi ne me protégeait contre le fait que mon voisin s’en serve pour en glisser un mot à ma femme ou pour me juger en silence.
Désormais, nous vivons dans un monde où la loi nous promet un contrôle absolu sur ce que les autres savent de nous. Or, cette idée est un contresens total. La liberté, c’est aussi celle de se faire une opinion sur quelqu’un, et, par extension, de le profiler. La LPD ne s’y trompe d’ailleurs pas: elle épargne les personnes privées, mais impose ses contraintes absurdes aux entreprises, quintessence de l’immoralité dans notre monde moderne.
Au fond, toute cette mascarade repose sur une erreur fondamentale: nos données ne nous appartiennent pas. Ce que vous savez sur moi vous appartient. Ce que je vous ai dit à mon sujet, que vous soyez mon voisin de palier, un lecteur du Journal des arts et métiers ou d’un réseau social, vous appartient aussi. Certes, quelques dispositions légales me protègent contre des abus manifestes, et nous pouvons contractuellement convenir que certaines informations restent confidentielles – c’est d’ailleurs inscrit dans la loi pour les avocats et les médecins. Mais l’idée même que tout ce que je dis ou fais puisse rester sous mon contrôle est une illusion aussi ridicule qu’ingérable.
Comme les partisans des mots de passe à douze caractères spéciaux, ils incarnent à mes yeux le cinquième cavalier de l’Apocalypse: ces sachants persuadés que leur mission sur cette planète est de faire notre bien malgré nous, mais qui le font assez mal en définitive.
*Conseiller national (PLR/VS)
philippe@blorange.com
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