«L’argument principal de Keller-Sutter contre l’initiative des Jeunes socialistes s’effondre.» Tel était le titre d’un article paru récemment dans la presse dominicale. Et voici le point: la mise en garde de la ministre des Finances selon laquelle l’initiative des Jeunes socialistes (JS) sur l’impôt sur les successions à hauteur de 50% pourrait coûter plus qu’elle ne rapporterait se fonde sur des «bases de données insuffisantes». Les personnes imposées au forfait et leur fortune mondiale ne seraient pas prises en compte. Même si «seulement» huit personnes sur dix imposées au forfait quittaient le pays à cause de l’impôt US, les recettes fiscales de l’imposition des deux personnes restantes seraient si élevées que l’État en profiterait globalement.
Cette thèse abrupte a un défaut. Elle oublie de préciser que toutes les recettes de l’impôt des jeunes travailleurs seraient affectées. Selon le texte de l’initiative, les recettes ne pourraient être utilisées que «pour la lutte socialement équitable contre la crise climatique et pour la restructuration de l’économie globale nécessaire». Cela signifie: ni pour la sécurité sociale, ni pour la police, ni pour les pompiers, ni pour l’armée. Mais seulement pour des «projets en faveur du climat», entonnent les bonsaï-socialistes sur leur site.
Personne n’en profiterait. Même si l’impôt des JS permettait de faire main basse sur la fortune mondiale des personnes imposées au forfait, il ne comblerait pas les trous que l’initiative creuserait dans les caisses des communes, des cantons et de la Confédération. Des trous qui apparaîtraient parce que des entreprises familiales et des particuliers fortunés transféreraient leur domicile à l’étranger. Les dommages seraient énormes. Les pertes fiscales se compteraient en milliards. Si on passe sous silence l’affectation de cet impôt, on ne peut pas en prendre toute la mesure. En investissant tous les fonds dans la «transformation de l’économie globale», on peut oublier le financement de tâches publiques importantes comme la sécurité, la formation, la recherche, la santé, etc.
Aux PME de payer la note! Si des contribuables importants partent, la charge fiscale augmente pour ceux qui restent. Contrairement aux multinationales, les PME ne peuvent pas optimiser leur charge fiscale par des restructurations internationales. Les pertes fiscales seraient donc répercutées sur la classe moyenne, les artisans, les PME et leurs collaborateurs. Avec une charge fiscale qui exploserait.
«Faire la une», est-ce essentiel? La ligne de démarcation entre journalisme et campagne politique est souvent floue. En l’occurence, on voit sur quoi s’appuie cet article fondé sur une «base de données insuffisante»: il est accompagné d’une interview d’un économiste de gauche controversé qui vante l’initiative des JS et affirme que «les impôts pourraient être réduits pour la population active». Il s’agit d’un Français qui se pare du titre de directeur de l’«Observatoire européen de la fiscalité» et que le journal qualifie d’«économiste vedette». Et qui n’est ni plus ni moins aux dernières nouvelles qu’un fonctionnaire de l’UE osant mettre son grain de sel dans la politique suisse. Apparemment, les initiants et leurs sympathisants dans les salles de rédaction ne disposent pas de sources plus crédibles. Au final, il n’en a pas fallu plus pour faire un «gros titre».