Lancée sous le slogan attrayant de l’égalité parentale et du bien-être familial, l’initiative populaire pour un congé parental paritaire soulève des enjeux bien plus complexes qu’elle ne le laisse entendre. Derrière les intentions louables – favoriser l’implication des deux parents, soutenir le développement de l’enfant, promouvoir l’égalité professionnelle – se cachent des conséquences économiques et sociales préoccupantes.
L’initiative a pour but l’introduction d’un congé familial de 18 semaines pour les mères et de 18 semaines pour les pères, soit un total de 36 semaines. À première vue, cela semble généreux. Mais à quel prix?
Actuellement, la Suisse garantit 14 semaines de congé maternité et 2 semaines de congé paternité, financés par les allocations pour perte de gain (APG). Étendre ce modèle à un congé parental de plusieurs mois représenterait une charge financière directe de plusieurs milliards de francs.
La pénurie de main-d’œuvre qualifiée s’aggrave
Cette extension pèserait lourdement sur les cotisations salariales, en pleine période d’incertitude pour nos assurances sociales: l’AVS doit être assainie, l’AI est encore endettée à hauteur de 10,3 milliards de francs.
Au-delà des coûts directs, les effets indirects sur les entreprises – notamment les PME – sont largement sous-estimés. Remplacer un collaborateur absent pendant plusieurs mois, réorganiser les équipes, gérer les pertes de productivité: pour les petites structures, souvent sans service RH dédié, ces charges sont tout sauf anecdotiques. Rappelons que 9% des entreprises suisses comptent moins de 20 employés. Pour elles, une telle mesure représenterait un risque concret pour la viabilité économique et la compétitivité.
À cela s’ajoute une réalité particulièrement préoccupante: la pénurie croissante de main-d’œuvre qualifiée. Dans de nombreux secteurs, chaque poste compte, et prolonger les absences au nom d’un congé parental long complique davantage le recrutement, fragilise la planification à long terme et accentue les tensions sur le marché du travail. La perte temporaire – voire définitive – de compétences clés freine l’innovation, ralentit les projets et nuit à la réactivité des entreprises dans un environnement déjà instable.
Au Parlement, d’autres mesures de soutien aux familles sont déjà à l’étude, comme l’augmentation des allocations familiales ou le financement partiel de l’accueil extrafamilial par les employeurs. L’accumulation de ces propositions provoque une hausse continue des charges sociales. Le problème central réside dans l’augmentation du coût du travail, qui réduit la compétitivité des entreprises, exerce une pression à la baisse sur les salaires nets et rend le marché de l’emploi moins dynamique. En bout de chaîne, c’est notre prospérité économique qui est en jeu.
Des alternatives plus durables
La conciliation entre vie professionnelle et vie familiale ne passe pas nécessairement par un congé étatique long et rigide. Aujourd’hui déjà , de nombreux modèles flexibles existent: télétravail, horaires adaptables, voire congés ponctuels. Ces solutions, souvent plus adaptées aux réalités individuelles et aux contraintes économiques, mériteraient d’être renforcées.
L’initiative pour un congé parental paritaire se veut progressiste et équitable. Mais elle repose sur une logique de promesse sans ancrage dans les réalités économiques. Son adoption risquerait d’ouvrir une brèche dans la stabilité de notre système social, d’affaiblir les PME, d’aggraver la pénurie de main-d’œuvre qualifiée et de renchérir le coût du travail. C’est la prospérité de notre pays qui en subirait les conséquences. Il est temps de faire preuve de responsabilité et de rejeter cette initiative
Simon Schnyder, usam