OUI à la suppression de la valeur locative
Le stand de tir du futur existe déjà!
STA et SDA – Gédale Senato, jeune entrepreneur suisse, a créé deux sociétés sœurs et élaboré en dix ans une technologie innovante pour les stands de tir, une solution unique en Europe et que «même les Américains nous envient.» Cette installation fonctionne déjà à Etoy, l’idée étant, sur la base de ce showcase, de s’adresser au marché mondial.
Gédale Senato, qui êtes-vous?
Je suis un ancien de l’EHL, de Hong Kong PolyU et de University of Houston, mais aussi le fondateur de Swiss Defense Solutions (SDS), une start-up vaudoise qui ambitionne en 2016 de révolutionner les stands de tir intérieurs. Celle-ci reçoit en 2017 un financement de 100’000 francs du SPEI, le Service de la promotion économique et de l’innovation. En 2021, fort de plusieurs brevets et d’une technologie novatrice reconnue à l’international, j’ai fondé une société sœur, sous le nom de Swiss Training Academy (STA). Celle-ci devient le premier Partenariat Public Privé (PPP) en Suisse, dans lequel une entreprise privée à but lucratif est codétenue par un corps de police, ici Police Région Morges (PRM).
Comment ce PPP a-t-il été créé?
Suite à la votation du conseil inter-communal morgien, la PRM est autorisée par le législateur à rentrer au capital de la société Swiss Training Academy SA à hauteur de 300’000 francs, dans le but d’accéder au centre de formation le plus moderne de Suisse, à moindre coût, et de convertir, un jour, les dividendes reçus en heures d’utilisation du centre ultramoderne. Une solution pragmatique typiquement suisse, dans la lignée des PPP helvétiques dans l’énergie, l’urbanisme ou les télécommunications. Le but pour le législateur a été de fournir une formation d’excellence au plus proche de la réalité à ses agents, qui sont garants de la protection de la population, tout en profitant des investissements privés dans l’entreprise. Le canton de Vaud, abrite donc deux pépites uniques en Europe, à une époque ou la sécurité redevient une préoccupation majeure, pour la première fois depuis la fin de la guerre froide.
Quel est votre mode de fonctionnement?
Alors que les stands de tir institutionnels sont rarement utilisés les soirs et week-ends et que les stands privés à vocation commerciale sont sous-exploités durant la semaine, la Swiss Training Academy (STA) est exploitée six à sept jours sur sept, dix à quatorze heures par jour, grâce au cumul de deux segments d’utilisateurs: les professionnels, et les amateurs.
À chacun ses horaires de prédilection: durant la semaine, nous accueillons ce que nous appelons les primo-intervenants, les policiers en uniforme, les acteurs armés de la sécurité privée et, parfois, des membres d’unités suisses ou étrangères – ces derniers en collaboration avec le DFAE et le DDPS. Nous accueillons aussi beaucoup de privés en semaine, qui viennent pour un cours particulier en journée afin de se vider la tête et d’avoir un moment à eux. Le centre est ouvert aux particuliers et aux amateurs de tir dynamique, qu’ils soient débutants ou plus expérimentés. Nous fonctionnons comme un club privé, dès lors nous ne recevons que sur rendez-vous et après un contact préalable. Nous assumons d’effectuer un «tri», ce qui assure la qualité de l’expérience. Toutes nos activités, à la fois les cours collectifs, les sorties d’entreprise, les ateliers de teambuilding et les cours privés, sont encadrées par nos instructeurs spécialisés, qui sont recrutés sur leur savoir-faire, mais surtout pour leurs qualités humaines et pédagogiques.
Qui trouve-t-on du côté de l’actionnariat privé?
Dans l’actionnariat figurent aussi certaines personnes privées qui ont saisi l’opportunité d’investir dans ce secteur porteur, aux barrières à l’entrée fortes, donc dans un environnement faiblement concurrentiel. Le marché est porteur – en particulier dans la période qui s’ouvre: en Europe, plus d’un million de policiers nécessitent une formation armée réaliste et adaptée au nouveau contexte sécuritaire, leur permettant de réaliser dans les conditions adaptées la mission qui leur est confiée par l’autorité politique, en tant que «primo-intervenants».
C’est la mission qui doit dicter les moyens et non pas l’inverse. La population veut pouvoir compter sur sa police et soutenir celle-ci. Les agents risquent leur vie au quotidien: ils méritent de disposer d’infrastructures modernes, polyvalentes et sécurisées. C’est ce que nous offrons. Même des spécialistes américains ayant visité nos locaux nous envient notre technologique.
De quels avantages parle-t-on au plan technologique?
Nous offrons une direction de tir à 360° à balles réelles, cumulée à une sécurité sphérique au sol, aux murs et au plafond, qui absorbent les balles sans danger pour les tireurs. Autre avantage, la modularité de l’espace permet de configurer des situations réalistes et de manière dynamique, telle que des appartements, pièces, couloirs afin d’offrir des mises en contexte réalistes pour des situations de type crise conjugale violente, prise d’otages ou attentats. Ou sur un plan plus léger, simplement des parcours ludiques de tir dynamique.
La dimension durable enfin est au cœur du projet?
Nous sommes une vraie cleantech: 100% des balles tirées dans notre centre sont recyclées, il n’y a aucune pollution au plomb, ni pour l’utilisateur, ni pour l’environnement. En plus, nous avons une installation photovoltaïque puissante générant près de 60’000 KWh par année, couplée à plus d’une tonne de batteries lithium de dernière génération. Cela permet de maximiser le rendement solaire en donnant une réelle cohérence à l’installation.
Cette puissance est nécessaire, car notre centre est ventilé aux standards des salles blanches, avec un renouvellement de l’air complet toutes les 90 secondes et une filtration HEPA. Ceci est indispensable pour protéger nos formateurs et les utilisateurs qui nous font confiance. Leur sécurité physique et sanitaire est une priorité qui ne peut faire l’objet d’aucune économie. Cet investissement solaire sera d’ailleurs rentabilisé en moins de cinq années compte tenu de notre autoconsommation, avec une durée de vie estimée à au moins vingt ans. La démarche est cohérente de bout en bout, sur le plan sanitaire, environnemental, organisationnel, technique, et économique.
Comment l’idée de ce projet vous est-elle venue?
C’est en 2016 que le projet est né. Les stands de tir intérieurs n’ont fait l’objet d’aucune innovation majeure depuis les années 1980. Le retard était immense et l’opportunité, réelle – en Suisse comme ailleurs. Je vous résume à grands traits un projet entrepreneurial passablement complexe portant sur presque une décennie d’engagement quotidien. Swiss Defence Solutions (SDS) avait développé une solution remarquable et validée par les professionnels. Malgré cela, elle avait besoin de pouvoir démontrer ses compétences avec des références.
C’est en participant à un appel d’offres en Suisse portant sur un contrat de plus de 30 millions de francs que nous avons compris que nous devions faire la preuve de ce que nous avancions – à grande échelle et non pas sur un simple démonstrateur. L’institution a rejeté notre participation, bien que nous fussions compétitifs sur le plan économique et très nettement supérieurs sur le plan technique, car elle ne voulait pas être la première utilisatrice. Elle a préféré une solution vieille de plusieurs décennies, mais éprouvée.
C’est ainsi que la Swiss Training Academy (STA) est née. Le canton de Vaud a donc accueilli un nouveau stand de tir indoor pour la première fois depuis 34 ans, le dernier datant du début des années 1990.
Comment avez-vous affronté le contexte législatif complexe?
Il fut à la hauteur de ce que l’on peut imaginer. Et il nous a fallu de l’endurance, de la patience et de la collégialité: en effet, les lois et règlements aux trois niveaux, communal, cantonal et fédéral, sans oublier les cahiers des charges spéciaux de la police fédérale, la SUVA, l’établissement cantonal d’assurance (ECA Vaud), en plus des normes environnementales, se chevauchent et se contredisent parfois.
C’est grâce à la culture typiquement suisse, ou les autorités et les acteurs économiques travaillent ensemble et non pas en opposition, que le projet a pu voir le jour en un temps record: moins de trois années entre l’idée initiale et l’inauguration, en passant par la levée de fonds, la planification, le permis de construire et la construction en elle-même. Dans un autre pays européen, cela aurait été objectivement impossible. Pourvu que ce rapport constructif, collégial et bienveillant entre les autorités et le secteur privé perdure! C’est une force unique de notre culture, créatrice d’emplois.
Que sait-on sur les utilisateurs qui fréquentent le centre?
Je dirais qu’il y a environ 30% de professionnels et 70% de particuliers très hétérogènes. Tous les spectres de la société sont représentés, de 18 à 84 ans, avec toute la diversité de la société suisse d’aujourd’hui, à la fois locale et internationale. Tous unis par l’envie de passer un bon moment, et de repartir avec le sourire. Contrairement aux préjugés, les tireurs sont dans toutes les catégories sociales, dans tous les métiers, et les femmes y sont de plus en plus nombreuses aussi. Nous avons d’ailleurs lancé les soirées «Ladies Night» qui leur sont réservées, avec un succès au rendez-vous.
Et la concurrence?
C’est un domaine en pleine expansion et il y a des projets à Zurich et à ailleurs, mais de manière parfaitement biaisée. Je dirais, tout en assumant un certain biais, qu’aucun d’entre eux ne dispose de notre niveau d’innovation, de technologie, de savoir-faire et de compétences 360° à balles réelles. En Europe, la volonté d’investir dans la sécurité est avérée, avec plus de 1000 milliards d’euros annoncés entre l’UE et l’Allemagne. Nous avons la technologie pour y répondre tout en continuant à créer des emplois dans notre canton. Néanmoins, cela sera déterminé par nos autorités, qui règlementent et contrôlent toute activité internationale liée à la sécurité, dans le cadre de la loi sur les prestations de sécurité privées (LPSP) et du contrôle à l’exportation du SECO. À ce niveau, nous n’avons pas notre mot à dire. Cela fait partie du package de la neutralité suisse et de son interprétation actuelle, sujet d’ailleurs de nombreux débats.
Pour la suite, quels sont vos objectifs?
Sur le plan local, nous développer en Suisse alémanique avec notre technologie et se mettre au service de l’armée suisse et d’autres corps de police, notre modèle ayant désormais une reconnaissance forte. Notre but est aussi d’identifier des partenariats et des investisseurs pour pouvoir répliquer notre académie ailleurs, potentiellement à l’international, avec un savoir-faire technique et opérationnel, prêt à être répliqué clé en main.
Financièrement, comment se porte la société?
Sans trop entrer dans les détails, nous avons été break-even après sept mois et notre revenu en 2024 a augmenté de 50% par rapport à 2023. En tant que directeur, malgré une demande dépassant nos capacités, ma priorité est de grandir de manière maîtrisée, en mettant au premier plan la qualité et l’expérience de nos utilisateurs. Il faut savoir accompagner la croissance de manière patiente. Les résultats financiers sont une conséquence naturelle d’un travail bien fait, avec une fidélité à nos valeurs et à notre promesse de marque. Les finances ne sont jamais une fin en soi.
Qu’avez-vous retenu de votre formation à l’École hôtelière de Lausanne (EHL)?
J’y ai tout appris! À la fin de la journée, les savoir-faire, qu’ils soient économiques, financiers, législatifs, juridiques, techniques, ou opérationnels, sont toujours nécessaires et jamais suffisants. La vraie différence est sur le plan humain. À la fois externe, avec nos clients, partenaires, fournisseurs, ou interlocuteurs, mais aussi interne, à travers une culture d’entreprise qui doit être incarnée au quotidien, avec exemplarité, discipline, intégrité et humilité. Un haut niveau de professionnalisme et d’exigences est insuffisant à mes yeux, s’il n’est pas complété par une culture solidaire, bienveillante, motivante et cohérente. Nous sommes une équipe passionnée, au service d’autres passionnés.
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