La Suisse face à un défi: pour moderniser le parc immobilier et les infrastructures, les propriétaires privés et les entreprises doivent investir. Mais pour construire, il faut une sécurité de planification et des moyens financiers. En tant que président de la SSE, l’association faîtière de la construction, je soutiens les conditions-cadres qui permettent aux maîtres d’ouvrage privés, aux PME ainsi et aux propriétaires d’investir dans l’avenir. Dans la rénovation énergétique, dans le logement, dans l’immobilier commercial. C’est là que réside le danger.
Les hypothèques plus chères, les investissements plus difficiles
L’augmentation prévue des exigences en matière de fonds propres pour les banques, proposée actuellement par le Conseil fédéral, pourrait avoir des conséquences négatives considérables, bien au-delà du monde financier. Le marché hypothécaire serait particulièrement touché. Et partant, les personnes et les entreprises qui souhaitent construire ou moderniser un bien.
Premier prêteur hypothécaire de Suisse, UBS gère des hypothèques pour un montant d’environ 280 milliards de francs, soit un quart du marché total. Si elle est contrainte de détenir beaucoup plus de fonds propres, ses coûts de capital augmenteront. Et cela ne restera pas sans conséquences: comme dans tous les secteurs, ces coûts seront répercutés sur la clientèle.
Pas d’initiatives isolées au détriment de la compétitivité
Les hypothèques deviendraient plus chères et les crédits moins faciles à obtenir. Le logement est rare et la Suisse a introduit début 2025 les exigences internationales de la réforme dite «Bâle III Final» – plus rapidement que de nombreux autres pays. Mais viser désormais un renforcement supplémentaire au-delà du niveau exigé au niveau international va trop loin. Cela affaiblit notre compétitivité et se répercute sur le marché hypothécaire.
Les PME et les petites banques sont aussi sous pression
En imposant des exigences excessives aux banques, nous augmentons le risque qu’un investisseur étranger profite d’une crise pour faire une bonne affaire. Si une grande banque suisse était rachetée par un groupe étranger – en cas d’affaiblissement –, un bénéfice d’environ 30 milliards de francs serait envisageable. Cet argent partirait à l’étranger. Et la banque ne serait plus suisse. Un scénario que nous devons éviter. Les petites banques, auxquelles de nombreuses PME et maîtres d’ouvrage font appel pour leurs financements, seraient aussi touchées. Leurs possibilités d’octroi de crédits sont de toute façon limitées par les exigences en matière de bilan et les prescriptions de liquidités. Si les hypothèques devenaient plus difficiles ou plus coûteuses chez UBS et que les clients se tournaient en masse vers les banques régionales, les coûts de financement augmenteraient dans ces dernières, ce qui détériorerait les conditions de crédit. Or nous en ressentons déjà les effets aujourd’hui: la croissance du crédit en Suisse ralentit. La pression sur le logement est énorme et le parc immobilier a un besoin urgent de rénovation, c’est extrêmement dangereux.
La Suisse n’est pas un pays d’extrêmes. Notre succès repose sur des solutions appropriées, le pragmatisme et une vision à long terme. Les exigences proposées par le Conseil fédéral sont contre-productives dans la pratique. Une analyse du marché hypothécaire le montre clairement: personne ne profite d’un nouveau durcissement. Au contraire, les propriétaires devraient payer plus cher leurs hypothèques et les investissements dans des logements dont le besoin se fait urgemment sentir seraient freinés. Cela aggraverait encore la pénurie de logements. Un mauvais service rendu à la population et à l’économie. De telles conséquences ne devraient guère rencontrer l’adhésion en Suisse.
Une Suisse confiante et moderne
Pour construire, il faut pouvoir mettre toute sa confiance dans des conditions-cadres stables et des possibilités de financement équitables. Ce n’est qu’en préservant cet équilibre que nous pourrons relever ensemble les défis de l’avenir. Pour une économie forte. Pour des logements abordables. Et pour une Suisse moderne.
Hans Wicki, Conseiller aux États (PLR/NW) et président de la SSE