Hasard ou timing parfait? Au début de la période estivale, une «lettre nationale suisse» a fait le tour du microcosme politique. «Dans toute l’Europe, affirme ce document reçu par e-mail, les forces populistes de droite se mobilisent de plus en plus contre l’égalité des sexes.»

L’objectif de cette campagne, qui se déroule à l’échelle européenne, soutenue par «Horizon Europe» et, en Suisse, par le Secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation (SEFRI), est le suivant: «Afin de pouvoir contrer efficacement les discours populistes de droite, les autres partis politiques ont besoin de données empiriques fiables.» Une lettre qui, diffusée par l’équipe «Untwist» de l’Université de Berne, constitue selon cette dernière «une ressource empirique actuelle pour les partis politiques, les institutions publiques, les organisations de la société civile, les chercheurs et les professionnels des médias qui s’intéressent à l’opinion publique et aux questions liées au genre en Suisse».

La lettre a été envoyée par Emma Olivia Pala, assistante au Centre interdisciplinaire pour la recherche sur le genre de l’Université de Berne. Elle se décrit comme «chercheuse transféministe et queer, pronoms: elle/la». Et précise: «Si vous jugez cette lettre pertinente, nous vous serions reconnaissants de la diffuser dans vos réseaux ou d’intégrer ses conclusions dans vos activités.» Une chaîne militante à caractère politique.

En mode autosuggéré

Le projet européen «Untwist society» part du principe qu’il existe une société déformée qu’il convient de redresser. Des antennes existent en Allemagne, au Danemark, en Grande-Bretagne, en Espagne, en Hongrie et en Suisse. Alors qu’ici, l’objectif est de «mieux comprendre les perspectives des principaux groupes d’électeurs, y compris les partisans des partis populistes de droite», en anglais, la formulation est plus aiguisée: «Policy recommendations to regain ‹losers of feminism› as mainstream voters.» Il faut ramener les «perdants du féminisme» dans le giron des électeurs.

En Suisse, plusieurs questions se posent: les électeurs de l’UDC doivent-ils être rééduqués pour redevenir des électeurs du PS ou du Centre – pardon: des votants? Une tentative de guérison politique? Mais faut-il vraiment utiliser l’argent des contribuables pour atteindre un tel objectif? Dans la foulée, on nous explique pourquoi la Suisse et ses nombreux eurosceptiques doivent bénéficier d’une éducation européenne. Selon les militants d’«Untwist», les électeurs de droite doivent être rapprochés des «valeurs fondamentales de l’UE». Sous la houlette d’une troupe d’éclaireurs issus des tours d’ivoire de l’UE – et de ceux qui aspirent à le devenir. Ceux qui y croient seront sauvés. Et ceux qui n’y croient pas devront au moins contribuer financièrement à cette égalitarisme indescriptible au service de la transformation de la société de haut en bas.

Gerhard Enggist