Pandémie: en tirer la leçon
LOI SUR LES ÉPIDÉMIES – La prochaine révision doit renforcer le contrôle parlementaire, reconnaître le rôle central des partenaires sociaux, privilégier des mesures ciblées et pragmatiques. Et surtout, introduire un véritable mécanisme d’indemnisation.
L’expérience de la crise du COVID-19 a montré que la loi sur les épidémies était un instrument utile et nécessaire. En situation de crise, il faut agir vite, clarifier les responsabilités et coordonner les autorités. Mais cette même crise a aussi mis en lumière des lacunes de gouvernance et de proportionnalité, ainsi qu’une prise en compte insuffisante des réalités économiques. Après avoir mis en consultation un projet de révision partielle de la loi, le Conseil fédéral l’a transmis au Parlement.
Le projet contient des éléments clairement positifs. La numérisation est mieux structurée, les flux d’informations gagnent en cohérence et les instruments de surveillance sont renforcés. Pour les PME, la valeur ajoutée concrète se situe surtout là : la numérisation permet de réduire la charge administrative en évitant les saisies multiples et d’améliorer la qualité des données. Des informations plus fiables et disponibles à temps rendent possibles des mesures plus ciblées, avec nettement moins d’effets collatéraux pour l’économie.
Il faut se parler
Ces progrès techniques ne doivent toutefois pas masquer des faiblesses de fond. En situation particulière ou extraordinaire, le Conseil fédéral dispose de compétences très larges, sans qu’une délégation parlementaire spécialisée soit prévue pour contrôler rapidement l’activation, la prolongation ou la levée des mesures. Une plus grande implication du Parlement permettrait de renforcer la légitimité des décisions, en particulier lorsque celles-ci touchent directement à la liberté économique des entreprises et des citoyens.
L’expérience de la pandémie a également montré que les solutions les plus efficaces et les mieux acceptées venaient souvent des branches elles-mêmes, du terrain. Ce sont les entreprises, via leurs organisations faîtières, qui ont élaboré des plans de protection concrets et applicables, adaptés aux spécificités de chaque secteur.
Les partenaires sociaux doivent donc être associés de manière systématique à la préparation et à la gestion des crises. Ils apportent une connaissance fine des réalités de terrain et contribuent à rendre les mesures plus pragmatiques, mieux ciblées et plus faciles à mettre en œuvre.
Qui décide paie!
Reste enfin la question de l’indemnisation. Le dispositif proposé repose principalement sur des prêts remboursables. Un prêt ne remplace pas un chiffre d’affaires perdu ni un loyer qui continue de tomber, il transforme un dommage en dette. Lorsqu’une décision publique empêche une entreprise d’exercer son activité, il faut un mécanisme d’indemnisation ciblée, proportionnée et pragmatique, selon le principe «qui décide paie». L’objectif premier reste évidemment de privilégier des mesures équilibrées qui ne restreignent pas, ou le moins possible, la liberté économique; l’indemnisation doit intervenir lorsque, malgré tout, des atteintes importantes sont à déplorer.
Sans devoir sacrifier les PME
La Suisse a besoin d’une loi sur les épidémies moderne, efficace et compatible avec l’État de droit. Le Parlement a maintenant la responsabilité d’améliorer le projet du Conseil fédéral dans ce sens. La révision devra renforcer le contrôle parlementaire, reconnaître le rôle central des partenaires sociaux, privilégier les mesures ciblées et pragmatiques et mettre en place un véritable mécanisme d’indemnisation. À ces conditions, elle préparera réellement le pays à une prochaine crise, sans sacrifier les PME et les emplois qui en dépendent.
Simon Schnyder, usam
