Publié le: 9 décembre 2016

Attention au recul du prêt-à-porter

commerce de détail – La branche a bouclé les comptes 2015 avec le plus fort recul de CA depuis un quart de siècle. La tendance se poursuit en 2016 et menace avant tout les magasins traditionnels dits stationnaires. Le grand test de Noël peut commencer.

Les fêtes de fin d’année approchent. Et, cette fois-ci, elles constituent un enjeu particulier pour les détaillants suisses et leurs employés. Il s’agit de quelque 317 000 personnes en Suisse, plus de 30 300 dans le canton de Vaud et près de 20 500 dans celui de Genève (chiffres de 2014 de l’Office fédéral de la statistique). La branche a en effet bouclé les comptes de 2015 avec le plus fort recul de chiffre d’affaires depuis au moins vingt-cinq ans, par rapport à l’exercice précédent: moins 2,3%. Pour 2016, nombre d’experts s’attendent à une stagnation des recettes dans l’alimentaire et une forte baisse dans le non-alimentaire. Les achats de décembre, souvent 15% des ventes annuelles dans la grande distribution, ne modifieront pas cette tendance.

Spécialiste des études de marché, l’institut nidwaldien GfK Switzerland AGprévoit une baisse des ventes de 3 à 4% en 2016 dans le non-alimentaire. Elle succédera à celle observée l’an dernier dans la confection: moins 5%. Cette tendance menace avant tout les magasins traditionnels dit stationnaires, et leurs employés. Les ventes en ligne tendent en effet à croître, mais sans compenser les baisses endurées dans les bons vieux commerces et centres commerciaux.

L’Association suisse de vente à distance (ASVAD) indique ainsi que les ventes des détaillants suisses ont diminué de 2,5 milliards de francs dans les magasins stationnaires de 2010 à 2015, tandis qu’elles n’ont progressé que d’un peu plus de 2 milliards sur le Net au cours de la même période. La Toile accroît en plus les forces du tourisme d’achat: le montant des emplettes online à l’étranger, portant sur des produits ou des services livrés en Suisse, aurait augmenté de 22% entre 2008 et 2015.

A tout cela s’ajoute la persistance de prix en baisse dans la grande distribution helvétique depuis 2012, exceptée la stagnation constatée en 2014. L’an dernier, ce fut moins 1,1% et ce sera moins 0,1% cette année. Une étude présentée mardi à Baden par NetComm (l’Association suisse des opérateurs de commerce électronique et de la communication numérique) et le consultant Contactlab a apporté de nouvelles données, confirmant les fortes pressions pesant sur les magasins traditionnels de nos cités. Surtout si leur offre porte sur des vêtements et des chaussures. Le montant des achats en ligne de la population suisse a ainsi progressé de plus d’un cinquième au cours des douze derniers mois. Et plus de la moitié de ces opérations portait sur des articles de mode, suivis de prestations de transport et de places de spectacles.

La concurrence des détaillants étrangers se révèle en outre féroce: 61% des internautes sondés s’adressent en effet à des fournisseurs non suisses. «Théoriquement un retourne­ment de tendance était à prévoir en janvier, un an après l’abandon du cours plancher de l’euro par rapport au franc. Malheureusement, il ne s’est pas produit», déplore le directeur général de Manor, Bertrand Jungo. Tous ces éléments tendent à renforcer un constat: le marché suisse des articles de mode est saturé. Avec l’offre textile actuelle en Suisse, un nombre de clients deux fois supérieur à la population du pays pourrait être vêtu. Dans le même temps, le consultant immobilier Partner Real Estate AG relève que plus d’un tiers des commerces des Rues-Basses, à Genève, est voué à la mode. Ce score atteint même 44% à la Freiestrasse à Bâle et 37% sur la Bahnhofstrasse à Zurich.

Dans ce contexte, 10 000 emplois ont été biffés dans la grande distribution suisse au cours des cinq dernières années. L’an dernier, le troisième distributeur du pays, Manor AG, propriété de la société genevoise Maus Frères SA, a dû lui-même supprimer 150 postes. Globus, propriété de la Fédération des coopératives Migros, a aussi sacrifié une soixantaine de postes. Avec une étude publiée hier, le cabinet d’audit bâlois Ernst & YoungSchweiz apporte du baume au cœur des détaillants helvétiques et de leurs collaborateurs. «Les Suisses prévoient de dépenser cette année 7% de plus dans les cadeaux de Noël qu’en 2015. L’an dernier, la moitié des personnes interrogées se déclarait prête à des largesses supérieures à 200 francs. Cette année, 55% des sondés manifestent des intentions comparables», indique Martin Gröli, responsable du secteur de la grande distribution chez Ernst & Young Schweiz. Des disparités apparaissent toutefois selon les régions. Les consommateurs de l’Arc lémanique ne participeront ainsi pas à l’augmentation des achats de cadeaux: une majorité d’entre eux prévoit de réduire son budget de Noël, selon Ernst & Young Schweiz.

A un peu plus d’un mois avant les fêtes de fin d’année, Thomas Hoch­reutener, directeur du secteur de la distribution chez GfK Switzerland AG, prévoit cette année une baisse des ventes de 5% dans un domaine très prisé pour les cadeaux: le prêt-à-porter. Au lieu d’un recul de 8% observé de janvier à la fin de septembre. Soit un léger mieux.

(TDG)

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