Publié le: 14 décembre 2018

«Ces pénuries sont structurelles»

fiduciaire – Une étude publiée par Adecco Suisse met en évidence une très forte pénurie de personnel dans cette branche. Interview de Daniela Schneeberger, présidente centrale de Fiduciaire Suisse, conseillère nationale (PLR/BL) et vice-présidente de l’usam.

Journal des arts et métiers: L’Indice de pénurie de main-d’œuvre publié par Adecco Suisse et le Moniteur du marché de l’emploi de l’Université de Zurich met en évidence une pénurie de main d’œuvre dans les métiers spécialisés du fiduciaire. Cette évolution est-elle temporaire ou faut-il considérer que le problème est structurel?

Daniela Schneeberger: Je pense que le problème est structurel. La numérisation est un facteur important dans notre profession. La transformation digitale est particulièrement exigeante pour les fiduciaires. Les tâches répétitives, qui sont facile à automatiser, comme par exemple la comptabilité sont offertes par un nombre croissant d’entreprises étrangères au secteur.

Cette pénurie affecte particulièrement les métiers comme conseillers fiscaux et des réviseurs. À quoi cela tient-il?

Cette étude précise que la pénurie de main d’œuvre dans les métiers de la finance et des fiduciaires, dont les conseillers et conseillères fiscaux et des réviseur font parties, est principalement due au besoin élevé de main d’œuvre dans la branche fiduciaire. Je pense qu’il s’agit en partie d’un problème d’image. Les fiduciaires sont encore souvent associées aux comptes d’épicier, à tort. D’autre part, le secteur fiduciaire est fortement orienté sur les situations de droit suisse et cantonal, on pense par exemple au droit fiscal cantonal ou au contrôle restreint pour les PME.

Parmi les explications avancées par les auteurs de l’étude figure le fait que «les réviseurs et comptables devant notamment connaître le droit international et la comptabilité internationale, il est capital pour les entreprises de pouvoir recourir à des spécialistes étrangers». Que pensez-vous de cela?

Comme exposé, cela ne s’applique pas vraiment aux fiduciaires. Mais, elles doivent néanmoins connaître les domaines du droit des affaires lorsque les entreprises suisses sont concernées, comme par exemple, le règlement général de l’UE sur la protection des données qui est entré en vigueur au mois de mai.

Pensez-vous qu’il soit possible de remédier à cette situation et de quelle manière?

Absolument, j’en suis convaincu. Car la profession de fiduciaire est un métier passionnant, exigeant, créatif, avec des responsabilités. Les fiduciaires deviennent de plus en plus des conseillers, des accompagnateurs, des coachs de PME. Ils doivent connaître le contexte de la gestion d’entreprises, les aspects financiers, légaux et fiscaux, les assurances et les caisses de pension et même la communication d’entreprise afin de pouvoir recommander aux clients où être opérationnels, et le cas échéant, quand et à quels spécialistes ils devront faire appel. Un peu comme un médecin généraliste qui décide quels traitements sont nécessaires.

Ainsi les compétences classiques comme une bonne formation générale, l’expertise, des qualités de dirigeants ou la fiabilité et l’efficacité restent toujours le fondement de la profession de fiduciaire.

Quels sont les mesures que vous prenez en matière de promotion de la relève?

L’Union suisse des fiduciaires a créé l’an dernier l’Institut Fiduciaire 4.0 afin de rendre nos membres aptes à faire face au futur numérique et de les accompagner sur le chemin de la numérisation. De plus, nous continuons de développer nos offres de formation. En collaboration avec l’OFCF (Organisation pour la formation commerciale fiduciaire-immobilière), nous reconcevons notre présence aux foires professionnelles.

Nous menons la campagne «Hello Career» qui s’adresse aux nouveaux apprentis de commerce dans le domaine fiduciaire-immobilier. Depuis peu, il existe un réseau de la relève dans notre branche, Fiduciaire Suisse Young, que nous encourageons autant que possible. Nous avons également un projet en préparation, en collaboration avec la Haute école spécialisée du Nord-Ouest de la Suisse, pour une offre de cursus d’approfondissement fiduciaire-conseil.

Nous pensons également aux moyens de rendre le métier fiduciaire plus attractif pour les personnes qui changent d’orientation professionnelle.

François Othenin-Girard

étude adecco

«Forte pénurie de personnel fiduciaire»

Dans l’Espace Mittelland (BE, FR, JU, NE), les entreprises ont de grosses difficultés à trouver des professionnels pour les professions du fiduciaire (par ex. des conseillers/ères fiscaux et des réviseurs/euses).

Selon ce classement publié en novembre dernier par Adecco, les métiers du fiduciaire occupent la deuxième place dans l’univers de la pénurie en Suisse. Au premier rang figurent les métiers de l’ingénierie.

«Les réviseurs et comptables devant notamment connaître le droit international et la comptabilité internationale, il est capital pour les entreprises de pouvoir recourir à des spécialistes étrangers », ajoute Nicole Burth, CEO du Groupe Adecco Suisse. La demande en formations initiales et continues est donc actuellement très importante dans ce domaine.

Les entreprises vont devoir ici agir si elles veulent être en mesure de trouver un personnel qualifié pour leurs postes à pourvoir: « Sur le court terme, elles peuvent accroÎtre leur attracti­vité en offrant de meilleures conditions ou bien rechercher des spécialistes à l’étranger. Sur le long terme toutefois, il sera de plus en plus important d’investir dans la formation initiale et continue de leurs collaborateurs actuels et potentiels», selon Helen Buchs du Moniteur du marché de l’emploi suisse de l’Université de Zurich.

Par contraste, les métiers administratifs et commerciaux ainsi que le secteur du nettoyage, de l’hygiène et des soins corporels connaissent un fort excédent en main-d’œuvre, celui-ci ayant encore augmenté cette année et touchant un grand nombre de travailleurs.

JAM/réd

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