Publié le: 5 juin 2020

En avant Moussaillon!

PRODUCTIVITÉ – Étonnant, mais vrai: la Suisse est devenue plus productive ces derniers mois – mathématiquement parlant. Le verrouillage a montré qu’il existait un potentiel d’augmentation de la productivité. A mettre en œuvre!

Il ne fait aucun doute que la crise frappe durement les gens et les entreprises. Plus inattendu, il existe également un autre impact, indirect celui-ci, sur l’économie. C’est une énigme, mais le fait est avéré: durant le semi-confinement, la productivité a augmenté de près de 20%.

Même intuitivement, cela reste difficile à expliquer: Comment se fait-il que la productivité augmente en temps de crise? La logique économique elle-même ne semble pas aider. Si le produit intérieur brut (PIB) diminue, une augmentation de la productivité ne semble a priori pas plausible.

Terme à clarifier: la productivité

Un brin de théorie: le rapport entre les résultats de l’activité économique (production) et les facteurs de production (intrants) utilisés pour celle-ci est appelé productivité. Par production, on entendu les «outputs», terme qui désigne les biens et services effectivement réalisés, indépendamment des variations de prix.

En revanche, les facteurs de production comprennent toutes les ressources et tous les services nécessaires à la réalisation de la production. Cela implique généralement une utilisation combinée d’éléments aussi diversifiés que le terrain, l’énergie, les connaissances, l’immobilier, les machines. Pour simplifier, il est fait référence aux facteurs de production que sont le travail et le capital.

En termes purement arithmétiques, on parle d’une augmentation de la productivité lorsque le ratio augmente. Par exemple, si un nombre de biens plus important (output) est produit par heure de travail (input). Ou si le bénéfice d’une entreprise (output) augmente pour chaque franc investi (input).

Il est également possible de se rapprocher de la productivité de toute une économie. A cette fin, l’économie met le résultat de toutes les activités économiques, le PIB (output), en relation avec la somme de toutes les heures travaillées (input). Il convient toutefois de noter que les deux composantes sont mesurées pour la même période.

Effet inattendu de la crise

Et maintenant, revenons à la fermeture de l’économie. Pendant cette phase dite de «lockdown», la Suisse a perdu environ 10% de son PIB. C’est une mauvaise nouvelle, bien connue. Elle a également perdu environ 25% de sa main-d’œuvre. C’est également une mauvaise chose, on l’a dit, en plus d’être souvent une tragédie pour les personnes touchées par les licenciements et le chômage partiel.

Seules quelques personnes l’ont remarqué. Mais lorsque vous mettez les deux chiffres (input travail et output PIB) en relation l’un par rapport à l’autre, on trouve quelque chose d’étonnant. Bien que la production ait diminué et que les intrants aient chuté encore plus fortement, la productivité s’est améliorée!

Pour rester aussi productive qu’avant le verrouillage, la Suisse devrait connaître une baisse de 25% du temps de travail et une chute de 25% du PIB. Mais tel n’est pas le cas. Le PIB a chuté de «seulement» 10%. Cela signifie qu’une heure de travail en temps de crise a un rende­ment plus élevé qu’une heure de travail en temps normal. On peut donc dire que la Suisse est devenue plus productive pendant la période de fermeture.

Le message est clair

Mais la prudence reste de mise et ce chiffre doit être pris avec précaution. Premièrement, il s’agit d’un point général – et le diable se cache dans les détails. Deuxièmement, la période de mesure est courte. Même si une économie peut accroître sa productivité pendant une période limitée, cela ne signifie pas qu’elle puisse le faire sur le long terme.

Néanmoins, le message est important. En comparaison internationale, la Suisse cède du terrain. Elle a déjà été dépassée par l’Allemagne, l’Autriche ou la France. C’est devenu un problème chronique. Après tout, une croissance plus faible de la productivité signifie généralement une stagnation des salaires réels et donc de la qualité de vie, en particulier des employés.

La fermeture de l’économie aura permis de montrer qu’il existe un potentiel d’augmentation de la productivité. Cela doit être mis en œuvre. Les personnes les plus touchées par la crise seront celles qui bénéficieront le plus de l’augmentation de la productivité.

Henrique Schneider, usam

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