Publié le: 5 juin 2015

Hostile aux familles et aux PME!

INITIATIVE sur les successions – Les experts consultés avertissent des conséquences négatives de cette initiative lancée par 
la Gauche. Celle-ci nuirait gravement au tissu économique et aux entreprises du pays. Et provoquerait de nouvelles incertitudes.

Le 14 juin prochain, le peuple suisse décidera s’il veut introduire un impôt sur les successions. Si l’initiative passe, pour chaque héritage dépassant le montant de 2 millions de francs, un impôt de 20% sera prélevé. Et ceci avec un effet rétroactif au 1er janvier 2012. Le projet prévoit, dans le cas de transmissions d’entreprises, l’octroi d’une franchise sur la valeur totale des entreprises et une réduction du taux d’imposition à la valeur résiduelle imposable. Il est par ailleurs possible d’autoriser un paiement échelonné sur dix ans au maximum. «En dépit de ce prétendu allègement pour les transmissions d’entreprises, l’acceptation de l’initiative nuirait gravement à la place économique suisse», lance Reto Arnold, expert fiscal diplômé chez PrimeTaxe AG à Berne. Toutefois, ce petit plus pour les transmissions n’est possible que si l’entreprise poursuit son activité pendant une décennie. Et l’expert énumère toutes les questions auxquelles il pense: «Qu’est-ce que cela signifie? Est-ce que cela implique que les héritiers doivent être actifs à la direction? Que l’entreprise ne doit pas être vendue? Un mandat au Conseil d’administration suffit-il? La reprise par un héritier est-elle suffisante? Ou tous les héritiers? Que faire si des collaborateurs issus du management disposent d’une participation? Que se passe-t-il si un nouvel investisseur prend part à une augmentation du capital, afin de financer des investissements? Cela implique-t-il que l’entreprise n’appartient plus seulement par la suite aux héritiers?» Les zones obscures de cette initiative sont nombreuses. Le plus gros point d’interrogation concerne la valorisation de l’entreprise.

La planification de la relève: 
une mission impossible!

«Le financement de l’impôt sur les successions créerait une infinité de problèmes aux PME. Du point de vue économique, il serait hautement dommageable, que la poursuite des activités par les héritiers ne se fassent que pour cette raison, à savoir de pouvoir tirer parti d’un allègement», explique Arnold. Et de souligner: «Il est pas difficile de reconnaître que l’adoption de l’initiative de l’impôt sur l’héritage aurait de graves conséquences pour les PME suisses.» Il conclut: «Ne pas mettre en danger inutilement des places de travail et des investissement, voilà une raison nette de rejeter cette initiative.» Même son de cloche chez Erich Ettlin, partenaires et directeur du département fiscalité et droit chez BDO AG à Lucerne: «Pour les entreprises, la réforme de l’imposition sur les successions s’apparente à un pur désastre, car en dépit de la promesse d’augmenter les franchises, la poursuite de l’exploitation durant 10 ans est une condition préalable, explique-t-il. L’insécurité dans laquelle se trouve l’entrepreneur qui doit payer un impôt de 20% s’il ne parvient pas à tenir l’entreprises 10 ans, représente une entrave prévisible dans de nombreuses transmissions. Voire une impasse!»

Dix ans, c’est bien trop long!

Le délai de dix ans fonctionne aussi comme un repoussoir pour Roland Jeitziner, notaire et porte-parole du conseiller juridique et financier Peter Ruf AG à Langenthal: sur la base du texte de l’initiative, la question de savoir à combien s’élèvent ces «conditions particulières» dont bénéficient les héritiers ou donataires? «En comparaison avec l’international, ce rabais lié à dix années d’exploitation continue d’une PME, dans le contexte économique actuel de mutation rapide, cela représente une période bien trop longue», souligne encore Roland Jeitziner.

Attention aux emplois

Le marché du travail est un autre facteur crucial à prendre en compte, explique Marc Landolt, réviseur diplômé chez Gruber Partner AG à Aarau. En effet, selon lui: «Cette initiative endommage les possibilités de développement des PME et un nombre important d’emplois seraient menacés». Un nouvel impôt sur les successions entre parents et enfants toucheraient durement les entreprises familiales. «Cela reviendrait à ponctionner les PME d’une substance qui leur ferait défaut par la suite au moment d’investir dans des développements nécesssaires à la survie de l’entreprise», analyse l’expert.

Corinne Remund

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