Publié le: 5 mars 2021

Initiatives agraires: le règne des utopies

Pesticides – Il faut absolument faire barrage à ces deux initiatives populaires qui nous vendent un cauchemar pour un rêve. Votation le 13 juin prochain!

Imaginez un petit pays de petites plaines et de grandes montagnes où les paysans produiraient des denrées alimentaires bio sans faire usage de pesticide, ni de produit phytosanitaire ni même d’antibiotique pour leurs animaux. Les exploitations agricoles fonctionneraient sur un mode autarcique. Cela veut dire qu’elles ne nourriraient leurs chèvres, poules, vaches et cochons qu’avec leur propre production. Et le gouvernement de ce pays ne subventionnerait que les exploitations dédiées au bio, autarciques. De plus, il ne financerait que la recherche pour ce type d’exploitation. Le gouvernement introduirait également une stricte interdiction de tout pesticides de synthèse, y compris les produits phytosanitaires et les biocides. Cela vaudrait même pour tous les produits importés en Suisse.

Sans pesticides les rendements des récoltes seraient en baisse et conduiraient à une hausse des prix. De toute façon, le bio serait imposé à tout le monde. Les bétails seraient réduits à peau de chagrin puisqu’il faudrait disposer d’assez de terre pour les nourrir directement. Le gouvernement devrait in fine subventionner une ribambelle d‘exploitations. Pire encore, pour combler la baisse de la production, il faudrait importer des denrées alimentaires bio en masse.

«on ne peut pas vivre seulement d’amour et d’eau fraîche.»

Voilà! Seulement, l’interdiction des biocides empêcherait de pouvoir importer des denrées alimentaires dans des conditions d’hygiène saine. En fin de compte, tout le monde devrait aller acheter ses fruits et légumes au marché du coin parce que l’hygiène des transports de denrées alimentaires ne pourrait plus être garantie. Les prix des denrées alimentaires crèveraient le plafond et l’on aurait vite fait de se rendre compte que l’on ne peut pas vivre seulement d’amour et d’eau fraîche, à savoir des utopies. Pourtant ces propositions utopiques feront les objets de la votation populaire le 13 juin prochain. L’initiative populaire «Pour une eau potable propre» prévoit une interdiction complète d’utiliser des pesticides et d’acheter des aliments pour animaux entraînerait une diminution de la production dans de nombreuses exploitations bénéficiant de paiements directs et mènerait à des baisses de rendement. La contrainte de ne nourrir les animaux qu’avec du fourrage produit dans l’exploitation imposerait des restrictions extrêmes à la production d’œufs, de volailles et de porcs. Le recul de la production provoquerait une hausse des prix des denrées alimentaires suisses et une augmentation des importations, dont nous ne pouvons pas contrôler la qualité. Une adoption de l’initiative signerait l’arrêt de nombreuses exploitations en raison d’une augmentation du travail et des coûts qui ne seront plus pris en charge ou conduirait des exploitations agricoles à quitter le système des paiements directs et ne soient plus tenues de respecter les exigences des prestations écologiques requises. La charge environnementale ne diminuerait pas comme prévu, mais au contraire augmenterait. Finalement, la qualité de l’eau potable suisse est extrêmement élevée en comparaison mondiale. Il s’agit d’en prendre soin mais avec des mesures raisonnables et réalistes.

L’initiative populaire «Pour une Suisse libre de pesticide» diminue la rentabilité, renchérit la production de denrées alimentaires en Suisse et réduit encore plus leur compétiti­vité. Les produits phytosanitaires (PPh) sont nécessaires pour produire des denrées alimentaires en quantité suffisante et dans la qualité requise en Suisse. Les pertes de récoltes seraient importantes. L’auto-approvisionnement en denrées alimentaires suisses est menacé sans PPh. De plus, les importations resteraient coûteuses puisqu’elles doivent aussi être produites sans pesticide de synthèse. L’initiative ne tient pas compte de l’évolution dans l’agriculture et l’horticulture suisses: les agriculteurs et les horticulteurs suisses sont des entrepreneurs innovants. Évoluant constamment et s’orientant vers les besoins du marché, ils réduisent l’utilisation de PPh en continu et ont élaboré des standards sectoriels avec le commerce de détail, tels SwissGAP et SUISSE GARANTIE, qui sont appréciés par les consommateurs. De plus, l’initiative n’est pas compatible avec le droit de l’OMC. Une interdiction générale des importations de produits fabriqués avec des pesticides de synthèse ne serait guère compatible avec le droit de l’OMC et les engage­ments contractés dans le cadre des accords commerciaux de libre-échange. Il faut absolument faire barrage à ces deux initiatives populaires qui nous vendent un cauchemar pour un rêve, une utopie quoi!

Mikael Huber, usam

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