Publié le: 10 janvier 2014

«â€‰Je fais enfin partie d’un groupe »

EPER – L’entraide protestante suisse propose un programme intitulé « Mentorat Emploi Migration ». Objectif : lever les obstacles auxquels font face les migrants qui cherchent un emploi.

C’est son mariage qui a amené Léa Ferreira Granchamp en Suisse. Professeur de méthodes didactiques à l’université et coordinatrice pédagogique d’une école primaire dans son pays, le Brésil, elle a peiné à trouver un emploi qui corresponde à ses compétences en Suisse. Le mentorat proposé par l’EPER l’a aidée à surmonter les obstacles et à trouver sa place. Interview.

Comment avez-vous vécu votre arrivée en Suisse ?

n Je pensais que j’y trouverais des opportunités de formation pour avancer dans ma carrière. Mais la migration s’est avérée difficile. Après six mois, je me suis rendue compte que je ne pourrais pas faire le même travail qu’au Brésil. J’ai dû recommencer ma vie professionnelle à 30 ans. J’avais l’impression d’avoir beaucoup perdu.

Quelles étaient les barrières ?

n Le contexte scolaire suisse m’est apparu comme très fermé. La maîtrise du français était aussi un obstacle, même si j’avais de bonnes bases. J’ai donc suivi des cours de français. J’étais très motivée, mais cela m’a demandé beaucoup d’efforts. Pour couronner le tout, mes diplômes n’étaient pas reconnus.

Avez-vous pu valoriser 
vos diplômes ?

n J’ai dû passer des examens pour obtenir une reconnaissance de mes diplômes. Cela prend plus d’un an pour les personnes en provenance de pays tiers. La procédure est d’autant plus longue qu’il est fastidieux d’obtenir les documents en provenance du Brésil.

Vous vous êtes inscrite au programme de Mentorat Emploi Migration. Que vous a apporté votre mentor ?

n Elle m’a aidée à donner une direction à ma vie professionnelle et à mieux connaître le système éducatif vaudois. Elle m’a permis d’identifier mon profil, de le valoriser et de l’adapter pour cibler les postes de travail susceptibles de m’intéresser. Ensemble, nous avons travaillé mon CV et une lettre de motivation avec la bonne terminologie ; c’est complètement différent au Brésil, les postulations écrites n’ont pas de valeur, on veut voir les candidats ! Elle m’a aussi indiqué où trouver des postes d’enseignants. Quand j’ai obtenu un entretien avec le doyen, elle m’a coaché pour le préparer. J’ai ainsi décroché un poste à plein-temps d’enseignante pour l’accueil des élèves allophones entre la 5e et la 9e et je développe des outils d’intégration pour ces élèves. Ils doivent avant tout apprendre le français !

Que vous apporte votre nouveau travail ?

n Je travaille dans un contexte professionnel qui me plaît beaucoup, même si mon travail n’est pas facile tous les jours. J’ai des problèmes normaux d’une enseignante pour des adolescents entre 12 et 16 ans. J’ai aussi pu agrandir mon réseau avec mes collègues.

Votre parcours migratoire doit être un plus pour ces élèves ?

n Je suis aussi passée par là avant eux. Ça me donne une certaine sensibilité pour les comprendre et j’aime voir leur étonnement face à la société suisse et face à certains usages ou règles. J’aimerais aussi pouvoir témoigner qu’un jour, eux aussi pourront surmonter ces différences. Mais cela reste un processus personnel.

On peut dire que ce travail a ­changé votre vie ?

n Complètement. Avant, je n’aimais pas la Suisse, je ne comprenais pas la fermeture des gens et de la société. Mais ce travail m’a donné un déclic. Je fais enfin partie d’un groupe. Il y a plus de 150 enseignants dans mon établissement et j’ai été très bien accueillie.

Interview : Joëlle Herren Laufer

mentorat emploi migration

Les migrants qualifiés triplement pénalisés

Selon une étude de l’Université de Bâle, les personnes migrantes hautement qualifiées sont trois fois plus touchées par le chômage que les Suisses. Une situation qui s’explique généralement par leurs lacunes linguistiques, leur méconnaissance du marché de l’emploi suisse ainsi que l’absence de réseau professionnel. A cela s’ajoute la difficulté de faire reconnaître leurs compétences professionnelles : nombre de diplômes étrangers ne sont pas reconnus en Suisse et il est difficile de faire valider l’expérience acquise à l’étranger. Conséquence : une personne migrante sur trois issues d’un Etat extra-européen est surqualifiée.

Le projet Mentorat Emploi Migration (MEM) vise à aider les personnes migrantes qualifiées à se faire une place sur le marché de l’emploi suisse. Le concept : des mentors bénévoles forment des tandems avec des personnes migrantes qualifiées, qu’ils soutiennent dans leur recherche d’emploi. Dans les cantons de Genève et de Vaud, 35 tandems ont été créés à ce jour. Au terme de leur participation, 40 % des participantes et participants ont trouvé un emploi dans leur secteur et correspondant à leurs qualifications.

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