Publié le: 4 mai 2018

Le trolleybus sans fil «made in Geneva»

tosa – Cette technologie anime douze bus de la ligne 23 à Genève. C’est la première ligne commerciale au monde mettant en 
service des bus 100% électriques dits en «biberonnage»! L’auteur a joué les passagers et recueilli quelques confidences.

La technologie TOSA (Trolleybus Optimisation Système Alimentation) qui anime douze bus de la ligne 23, à Genève, est le fruit d’un partenariat public-privé de sociétés genevoises: les Transports publics genevois, ABB Sécheron, les Services industriels 
genevois et l’Office de Promotion des Industries et des Technologies. C’est la première ligne commerciale au monde mettant en service des bus 100% électriques dits en «biberonnage»!

Le premier bus à «biberonnage» présenté au grand public était chinois et servait de navette à l’Exposition ­universelle de Shanghai, en 2010. Chaque arrêt était doté d’un portique de recharge et le simple contact d’un bras articulé rechargeait instantanément les supercondensateurs intégrés au bus. Mais comme ce type d’accumulateur se décharge presque aussi rapidement, la «tétée» était nécessaire à chaque arrêt, tous les 500 mètres…

Plus aboutie, la technologie TOSA répond aux exigences d’une exploitation commerciale en termes de fiabilité et de flexibilité. Les batteries lithium-titanate ne nécessitent pas de point de recharge à chaque arrêt (14 stations sur 50 arrêts), car leur niveau est constamment maintenu entre 60 et 100% de la charge. En deçà de 50%, le bus est rappelé au dépôt pour vérification. Le biberonnage est réalisé par un bras articulé sur le toit qui, une fois en contact avec le portique, recharge le bus TOSA pendant 20 secondes (stations flash), donc sans retardement par rapport à bus classique, et pendant 4 à 5 minutes aux deux terminus (stations recharge).

Moins cher qu’une ligne 
de trolley

Par rapport à un bus diesel, on gagne en écologie et en silence. Par rapport à un trolleybus, on s’affranchit des lignes de contacts, des mâts et des coûts élevés de l’infrastructure (sans compter la «pollution visuelle» des lignes aériennes).

Financièrement, la solution TOSA tire son épingle du jeu. La comparaison avec une ligne (12 véhicules) de trolleybus et la ligne TOSA est révélatrice: si le matériel roulant de la première revient à 12 millions de francs contre 15,6 millions, l’infrastructure des trolleybus coûte 18,86 millions contre 10,13 pour TOSA. Au bilan, avec les frais de raccordement, la ligne de bus TOSA est 11% moins chère (28,23 millions de francs contre 31,73).

Après la mise en service ratée du 
10 décembre 2017 due au système de refroidissement des batteries, le bus électrique TOSA revient le 12 mars (et 7600 km de mise au point plus tard…) sur la ligne 23. Fin mars, cinq véhicules ont été ajoutés à la ligne. C’est le moment de l’essayer! Surprise, le premier bus 23 arrive avec un déplaisant martellement de diesel! Visiblement, les douze bus promis ne sont pas tous en service… Mais le suivant est bien un TOSA, c’est écrit sur les flancs. À bord, c’est silencieux et on apprécie l’accélération linéaire des moteurs électriques. Faut-il une formation spéciale pour le conduire? «Attention, dit le chauffeur, le TOSA est homologué autobus et non trolleybus! Il faut donc le permis d’autobus. Sinon, une formation d’une seule journée suffit.» Arrive une station «flash», le conducteur m’explique qu’il s’arrête au repère rouge sur le trottoir. Un témoin au tableau de bord confirme l’arrimage du bras articulé: «Pas difficile de 
viser, le guidage automatique au laser permet une marge de 50 cm en 
longueur et 50 cm en largeur…» La 
durée de recharge varie un peu selon le niveau des batteries.

Les maladies de jeunesse

Pour s’intégrer au trafic d’une voie rapide, le chauffeur enfonce la pédale et le bus articulé de 27 m détale presque comme une voiture! C’est aussi grâce à ses batteries légères ayant une capacité équivalente à celle d’une Tesla. Au terminus, on découvre la station de recharge qui doit durer 4 à 5 minutes. Idéal pour prendre une photo du processus. Sauf que, pour une raison inexpliquée, le bras refuse de se déployer… Confus, le chauffeur appelle la centrale pour notifier la panne. Cela n’empêche pas le bus de poursuivre normalement son service, car «tant que la charge de la batterie est supérieure à 60%, ce n’est pas un problème», me rassure-t-il.

L’une après l’autre, on corrige les maladies de jeunesse d’une technologie d’avenir. D’autres lignes s’ouvriront à Genève et ailleurs. La ville de Nantes (ouest de la France) veut, elle aussi, s’équiper de bus TOSA.

Jean-Luc Adam

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