Publié le: 7 avril 2017

Mangé par le Lion pour une bouchée de pain Combien gagne un constructeur par voiture?

reprise – 2,2 milliards d’euros, tel est le prix payé par PSA pour avaler Opel. C’est cadeau! Mais un cadeau empoisonné? 
En Suisse aussi, beaucoup d’emplois dépendent directement de la marque au Blitz. Tableau comparatif des marges et bénéfices...

Dans les chiffres rouges depuis des années, la marque européenne de General Motors – depuis 1930! – était devenue un boulet. A tel point que GM a préféré la vendre à perte (vendue 2,2 milliards d’euros à PSA en s’acquittant au préalable de quelque 7 milliards d’euros de charges et frais de pension). De son côté, la nouvelle entité Peugeot-Citroën-DS-Opel-Vauxhall se hisse au deuxième rang des constructeurs européens, der-
rière les 12 marques du groupe VW. Mais ce nouveau géant européen ne vient pas empiéter sur les plates-bandes américaines de la GM.

Bon deal pour l’industrie europé-
enne? Oui, à condition que le Lion procède urgemment à un assainissement drastique d’Opel au risque de mener le groupe entier – lui-même en convalescence – dans le mur. On parle de 6000 licenciements sur les 34 000 employés que comptent les marques Opel et Vauxhall.

Coup de griffe

En 2014, le Lion a lui-même évité 
de justesse la faillite, sauvé par une restructuration lui coûtant 17 000 emplois et par l’ouverture du capital de l’entreprise familiale à l’Etat français et à son partenaire chinois Dongfeng (de 14% chacun). Heureusement, en 2016, PSA a repris du poil de la bête puisque ses ventes ont grimpé de 5,8%, franchissant la barre des 3 millions d’exemplaires. En ajoutant Opel/Vauxhall, le président du groupe Carlos Tavares annonce avec optimisme 5 millions d’exemplaires en 2017! En réalité, son plan de redressement est plus prudent puisqu’il s’étale jusqu’en 2026 pour atteindre 6% de marge bénéficiaire sur sa filiale allemande.

On peut regretter que PSA ait acquis une marque de même segment que Peugeot et Citroën, lui empêchant ainsi de s’attaquer au lucratif segment Premium, laissant ce challenge à la seule marque DS. A l’heure actuelle, il semblerait déraisonnable de créer une seconde marque Premium liée à la filiale allemande, utilisant par exemple ADAM, le prénom du constructeur… même si cela ne déplairait pas à l’auteur!

Forces et faiblesses

Notez que si la marque allemande a été déficitaire ces dernières années, c’est surtout à cause de son coûteux département d’ingénierie qui a largement contribué à la mise à jour technologique des modèles américains 
du groupe, après le dépôt de bilan 
du «big one», en 2009. Le «German engineering» profitera à PSA, en particulier concernant la technologie de propulsion électrique de la nouvelle e-Ampera, l’une des meilleures du genre actuellement. Et cela sans payer de royalties! PSA hérite aussi de 6 usines et 5 sites de production de pièces. Et à l’aube du Brexit, les deux unités Vauxhall (à Luton et Ellesmere Port) représentent un atout puis-
que le groupe français ne dis-pose d’aucune usine au Royaume-Uni.

Que va-t-il se passer dans les années à venir? En gros, la même chose que lorsque Renault a racheté Nissan: des économies d’échelle et des plate-formes communes. Mais on peut faire confiance à l’expérience du français dans sa capacité à respecter l’identité de la marque Opel – Peugeot le conservateur a quand même épousé 
Citroën, l’avant-gardiste! Quant aux utilitaires, PSA aura peut-être désormais la taille critique suffisante pour concevoir ses grands utilitaires sans devoir passer par un partenariat avec Fiat (les fameux «eurovans»).

Finalement, c’est un peu quitte ou double. Mais à moins d’une arrivée massive des marques automobiles chinoises qui, par un rapport qualité-prix imbattable, bousculeraient les constructeurs généralistes, la synergie et les économies d’échelle devraient renforcer le groupe et ses marques. Ce qui est aussi de bon augure pour le réseau suisse d’Opel.

Jean-Luc Adam

rentabilité: marges et bénéfices

Selon les recherches de l’Université de Duisburg-Essen (D), le constructeur le plus rentable en 2016 reste Ferrari avec 56 000 euros par voiture. Le chiffre est impressionnant soit mais représente, en réalité, 18% de marge bénéficière. Comparé à d’autres secteurs du luxe, comme dans l’horlogerie, c’est peu. Normal, l’industrie automobile est soumise à une concurrence d’une rare férocité.

Voici le classement par marque et par groupe:

Marque marge bénéfice par voiture

1. Ferrari 18% 56 000 €

2. Porsche 16,7% 15 641 €

3. Skoda 9,6% 1589 €

4. Audi 8,8% 3337 €

5. Peugeot Citroën 6,8% 844 €

6. Hyundai 6,7% 773 €

7. Ford (Europe) 6% 973 €

8. Renault 4,7% 715 €

9. Nissan 4,7% 2088 €

10. Fiat 2,2% 356 €

11. Seat 2,1% 337 €

12. VW 1,7% 395 €

13. Opel 1,3% 190 €

Groupe marge bénéfice par voiture

1. Ford 8,7% 1652 €

2. GM 8,6% 1210 €

3. Toyota 8% 1602 €

4. PSA 6,8% 844 €

5. Hyundai-Kia 6% 755 €

6. Fiat-Chrysler 5,9% 1330 €

7. Renault-Nissan 4,7% 899 €

8. Groupe VW 4,5% 801 €

Conclusion: on remarque les groupes américains sont les plus profitables et démontre la capacité des Américains à retrousser leur manches! Mieux, la vente d’Opel (lire ci-contre) devrait permettre à GM de dépasser Ford en 2017. En 2016, le groupe VW s’est hissé constructeur automobile numéro 1 de la planète, mais, malgré les bonnes marges bénéficiaires de certaines de ses marques, c’est Volkswagen qui fait le volume et le «Diesel Gate» a plombé les bénéfices de l’entreprise. Jean-Luc Adam

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