Publié le: 15 décembre 2017

Ne pas agir, 
l’option qui tue…

L’édito

Le problème est bien connu: les entreprises d’État chassent les PME hors du marché. Le Conseil fédéral vient de publier un rapport sur ce fléau. Il reconnaît que la situation est insatisfaisante, mais ne veut rien faire. «C’est trop compliqué», répond-il en substance. De plus en plus souvent, les entreprises publiques ou affiliées à l’État étendent leur activité au-delà des territoires assignés par la politique. Elles s’aventurent sur les marchés privés: la Poste Suisse, les CFF ou diverses entreprises de distribution d’électricité sont des cas flagrants. Or ces structures furent à l’origine créées pour remplir un mandat gouvernemental. Elles l’ont été ainsi délibérément en tant qu’entreprises – et non en tant qu’administrations – afin d’être efficaces et rentables.

La volonté politique était claire: ces entreprises devaient s’organiser économiquement pour remplir certaines missions de base. Pour y parvenir, elles furent dotées de compétences réglementaires spéciales et d’un statut de monopole. Il y eut des excès de confiance manifestes. Outre les divers avantages réglementaires et monopolistiques, les régies publiques bénéficièrent d’une garantie d’État et d’une structure de capital particulièrement favorables. N’importe quel manager eut souhaité en profiter pour mener à bien ses projets d’expansion.

Aussitôt dit, aussitôt fait! Le bureau de poste – dont la mission est (ou plutôt: devrait être) de transporter des lettres et des colis – devint une papeterie, puis un revendeur de multimédias. Les distributeurs d’électricité – comme la FMB à Berne, ou le Groupe E à Fribourg – sont passés des appareils électroménagers aux installations, puis à la planification. Le mécanisme fut le suivant: les entreprises d’État profitèrent de leurs avantages – structure financière et actionnariat favorables, garantie de l’État, bénéfices garantis, large clientèle ou publipostages déjà financés – pour pénétrer de nouveaux marchés. Et dans la foulée, rendre la vie encore plus difficile pour les PME.

Cette «compétition» se déroule avec des armes inégales. Les entreprises d’État bénéficient d’un autre avantage domestique déloyal, comme le veut la loi. De leur côté, les PME opèrent sans aucun avantage réglementaire. C’est du reste pour cette raison que les PME bernoises appellent leur campagne de sensibilisation «Fair is different».

A souligner encore, le style parodique que le Conseil fédéral utilise en parlant de «neutralité de la concurrence» dans son rapport. Il veut dire que les mêmes règles devraient s’appliquer à tout le monde! C’est fondamentalement exact, mais cela n’est pas appliqué. Si elles opéraient sur le même marché que les PME, les entreprises publiques respecteraient toutes les règles. Le problème est qu’elles utilisent leurs avantages pour pénétrer un marché. C’est sur ce point que le Conseil fédéral et les exécutifs cantonaux et communaux sont sollicités. Propriétaires, ils doivent assumer leurs responsabilités.

Obliger leurs entreprises d’État à préciser les limites de leurs activités, voilà ce qu’il faut faire! Les collectivités publiques qui en sont les propriétaires doivent mener une réflexion stratégique et obliger leurs entreprises à se concentrer sur les mandats de base qui leur ont été assignés. En définitive, rien n’est impossible dans ce domaine. Prendre ses responsabilités, ce n’est pas compliqué, mais exigeant. Ce qu’il faut ici, c’est du leadership.

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