Publié le: 7 juillet 2017

Nous oserons engager des femmes!

career woman 2017 – Pour Alexandra Hugo, professeure HES-SO et coordinatrice de Career Women, le plafond de verre reste une réalité pour les femmes qui désirent faire carrière. Elle s’engage concrètement pour la mixité et demande aux femmes de bouger.

JAM: Le 6 juin dernier, vous annonciez la remise du prix Ă  quatre jeunes femmes romandes. Quelle importance ce prix revĂŞt-il?

n Alexandra Hugo : Le 6 juin dernier, nous avons remis, pour la deuxième édition, le prix Career Women 2017 à quatre jeunes Romandes. L’objectif pour nous est double: rendre visible les femmes qui suivent nos for-
mations tant au niveau bachelor qu’au niveau master en reconnaissant leur parcours professionnel ainsi que créer une communauté particulière. Les lauréates ont une valeur d’exemple pour les étudiantes et ont dû faire preuve de confiance en elles et de créativité. En effet, il n’est pas facile de se mettre en scène, de se présenter par le biais de vidéos de deux ou trois minutes. Les films proposés montrent que ce sont des femmes volontaires, incroyables, avec des parcours parfois atypiques et variés. Et ceci même si elles ont moins de cinq ans de parcours professionnel – c’est l’un des critères de sélection.

Il y a dix, lors du lancement, quel était le constat de départ et qu’est-ce qui a changé aujourd’hui?

n Career Women, initiative du domaine économie et services de la HES-SO, vise à sensibiliser les jeunes femmes aux enjeux de la carrière 
par des informations, conférences, mais aussi proposer des ateliers pratiques, des outils concrets. Lors de son lancement il y a plus de dix ans, Career Women était essentiellement une plate-forme de réseautage/mentoring destinée aux femmes professionnelles disposant déjà d’un parcours professionnel afin d’obtenir des conseils avisés. Ceci reste toujours d’actualité. Mais, pour des raisons de stratégie interne, le public-cible a quelque peu changé. Aujourd’hui, nous ciblons prioritairement les jeunes femmes à la fin de leurs études ou les jeunes alumnae. Notre offre a donc évolué avec notamment des ateliers sur des thématiques spécifiques.

En comparaison internationale, comment se situe la Suisse sur les Career Women?

n Selon plusieurs études de l’OFS, on constate que le taux d’activité professionnelle des femmes a nettement augmenté ces dernières années, notamment par le biais du travail à temps partiel.

«nous ciblons 
prioritairement 
les jeunes femmes à la fin de leurs études ou les jeunes alumnae.»

De plus, le taux d’activité des femmes et la part d’actifs occupés à temps partiel sont nettement plus élevés en Suisse que dans la plupart des autres pays européens. En revanche, toujours selon l’OFS, la part des femmes dans les positions dirigeantes stagne à un tiers. Ainsi, le nombre de postes de cadres occupés par les femmes sont encore bien minoritaires. Il en va de même pour les postes dans les conseils d’administration. Par ailleurs, il a été démontré que les entreprises dirigées par des directions mixtes présentent une productivité supérieure. C’est toute l’économie d’un pays qui bénéficie de la richesse d’une formation supérieure. Or les formations supérieures coûtent cher à la collectivité. Il est donc important de ne pas perdre les personnes qui se sont formées.

Que sont devenues les lauréates des année précédentes?

n Elles ont des parcours en ligne droite ou non. Elles ont par exemple débuté par une formation d’opticienne, en agro-alimentaire, en ingénierie. Elles voulaient travailler en crèche ou avec des personnes âgées. Elles ont peut-être fait un détour par l’université ou poursuivi à l’uni après leur bachelor. Elles ont voyagé, souhaitant partir à la découverte d’autres cultures et «apprendre ce qui ne s’apprend pas dans les livres». Elles travaillent aujourd’hui dans des domaines variés: entrepreneuriat et innovation, marketing digital, finances, tourisme – tant à l’international que dans des start-ups locales. Bref, elles représentent toute la diversité du marché de l’emploi.

Vous venez de mentionner des ateliers: de quoi s’agit-il?

n Organisées dans toute la Suisse romande, ces rencontres ont rassemblé cette année plus d’une cinquantaine de participantes qui viennent à un, deux voire tous les ateliers. Nous proposons des ateliers AutoPromo aux étudiantes des hautes écoles de gestion souhaitant acquérir des compétences pour gérer au mieux leur 
future carrière.

«elles représentent toute la diversité du marché de l’emploi.»

Ces manifestations s’inscrivent dans un cycle de soirées et peuvent être suivies ponctuellement ou globalement. Les thèmes abordés sont variés (négociation salariale, parler en public avec confiance, e-réputation et réseautage, booster son CV et carrière sur mesure). Les sessions ont une orientation très pratique, afin que les étudiantes puissent bénéficier d’un maximum de feedbacks et disposer d’outils qui ne sont pas forcément apportés en cours.

A noter que pour favoriser une inscription globale aux ateliers, il est proposé aux étudiantes ayant participé à au moins trois des cinq ateliers (automne 2016 et le printemps 2017) de bénéficier d’un coaching/mentoring individuel d’une heure avec des professionnels. Cette année, quatre personnes ont accepté de donner gracieusement de leur temps à la quinzaine d’étudiantes concernées. Venant d’horizons différents (responsables RH dans les domaines public ou privé ou via le Club des femmes entrepreneures), les mentors ont 
accordé un entretien individuel de soixante minutes, rencontres souvent très riches.

Quel message souhaitez-vous adresser aux PME romandes?

n D’une façon très directe, j’ai envie de leur dire: «Osez engager des femmes et réfléchissez à aménager le temps travail de façon innovante par des horaires souples, du télétravail...!» Ce n’est pas parce que les collaboratrices ont des enfants ou travaillent à temps partiels qu’elles sont moins compétentes. La mixité apporte un réel plus dans les équipes et sur les projets. Bien que les femmes ne soient pas forcément dans les réseaux traditionnels, peut-être faut-il les chercher différemment, via d’autres canaux et encore mieux les inciter, les encourager à postuler à des postes à responsabilités. Elles ont parfois peur de se lancer.

Et que dites-vous aux femmes qui souhaiteraient participer Ă  ce prix?

n Voici le message que nous souhaitons faire passer à toute future lauréate: «Osez, bougez et continuez à vous former! Selon Micaela, participante de l’édition 2016, ces ateliers nous donnent de meilleures clés en tant que femme afin de trouver notre place dans le milieu de la carrière. Et pour Natalie Sarrasin, professeure (de e-marketing) à la HES-SO Valais- Wallis, «que vous le vouliez ou non, Internet va parler de vous. On va 
essayer de faire en sorte qu’il parle de nous avec ce que l’on a envie qu’il dise.»

Interview: François Othenin-Girard

Les plus consultés