Publié le: 5 juillet 2019

PME, nous avons besoin de vous!

champéry 2019 – Les discussions au sommet se sont prolongées en soirée, les invités ont profité du lumineux passage des chars d’Apollon et de la clémence des dieux des arts et métiers pour échanger sur les thématiques chères à l’usam.

Le lundi 24 juin, il fait déjà torride. Les participants arrivent dès neuf heures, puis c’est l’allocation de bienvenue par André Berdoz, vice-président de l’usam.

La première invitée nous parle des «perspectives économiques et monétaires: un dialogue avec la BNS». Il s’agit d’Andréa Maechler, membre de la Direction générale de la BNS.

«Nous sommes un petit pays ouvert, pour nous il est important de prendre en compte le contexte international. La dynamique sous-jacente est robuste, avec des signaux mitigés dans l’économie internationale (…). Donc comment garder une productivité élevée en Suisse? La politique monétaire est d’abord une condition-cadre, elle n’est pas toute puissante! Il faut donc des réformes structurelles pour accroître le potentiel de croissance.»

Croissance gourmande

Sommes-nous devenus trop gourmands en matière de croissance? Là aussi, des consensus ont vu le jour.

Benjamin Roduit (PDC/VS): «Il faut poursuivre la recherche du bien-être, mais pas seulement économique.» Laurent Wehrli (PLR/VD): «Il existe par ici un parti qui s’est créé sur la décroissance. Mais un tel parti a tout de même besoin de l’économie.»

Isabelle Chevalley (VL/VD): «Bien sûr que je suis pour la croissance. Mais si on augmente les centrales à charbon, ce n’est pas gagné d’avance!»

Alexa Krattinger, responsable politique fiscale et financière à l’usam et organisatrice des journées, a ensuite souligné la nécessité, face à la densité normative ambiante, du frein à la réglementation soutenu par l’usam et accepté aux Chambres. «En politique fiscale, nous avons trouvé un compromis et rassemblé une majorité. Il faut développer la PME attitude – pour paraphraser Laurence Parisot aux Journées romandes l’année dernière. »

Puis, ce fut le débat attendu entre Pierre-Yves Maillard, président de l’Union syndicale suisse (USS), et Jean-François Rime, président de l’Union suisse des arts et métiers usam (lire en page 2).

Au chapitre de la politique extérieure, il y eut des désaccords, mais pas sur le libre-échange. Christian Levrat (CE PS/FR): «Oui au libre-échange, car on gagne un franc sur deux à l’étranger. On essaie autant que faire se peut de redémarrer la machine multilatérale, puis les groupes. Dernier cas de figure, on essaie avec les accords bilatéraux. Il y a un travail d’explication à faire, car nos emplois en dépendent.»

Claude Béglé (CN PDC/VD): «Oui, consensus il y a sur le caractère essentiel des accords. Dissension il y a en revanche sur les conditions. Un accord, ça doit être donnant-donnant. Avec Mercosur, on ne peut pas ne pas mettre la viande.»

Philippe Bauer (CN PLR/NE): «Nous n’avons pas d’autre choix. Rien que pour l’horlogerie, cela vaut 20 milliards. Je suis donc 100% pour passer des accords de libre-échange. Mais le lobby agricole parvient à faire capoter certains d’entre eux en y ajouter des clauses.»

Yves Nidegger (CN UDC/GE): «Face aux grands blocs, il est bon que la Suisse ait de bons rapports avec tout le monde. Comme on élit les gens pour décider, on court le risque qu’ils décident!»

Si nous disons non: ensemble!

Ignazio Cassis, conseiller fédéral, chef du DFAE, était venu défendre l’accord-cadre Insta. «Nous voulons développer l’accès au marché intérieur de l’UE. C’est un milliard de francs par jour pour un marché de 500 millions d’habitants. Une actualisation dynamique du droit européen signifie que nous devons transposer dans nos lois chaque modification du droit de l’UE, avec une application uniforme pour éviter de fausser la concurrence. Donc nous voulons introduire une justiciabilité pour créer une stabilité juridique, une meilleure prévisibilité, de la protection contre les discriminations, une concurrence loyale… Et enfin, si nous disons non, nous le dirons tous ensemble.» Les échanges sur ce sujet furent nourris durant les deux jours et les positions contrastées.

Le risque, c’est la faillite

La soirée se passa à la Croix-de-Culet où les invités dégustèrent une délicieuse raclette et burent de bons vins valaisans. Le lendemain, mardi, la parole fut donnée aux entrepreneurs. Et aux femmes entrepreneur! A commencer par Leila Schwab, de Schwab System SA: «Le plus grand risque, c’est la faillite. Le facteur de risque, c’est la prise de décision. Je représente la 4e génération à la tête d’une entreprise de construction en bois et j’ai conduit une thèse de doctorat sur le risque de faillite. Mon but est d’aider les managers.»

Catherine Frioud Auchlin, Auchlin SA: «Dans le polissage horloger sur le traitement des métaux, nous en sommes à la 5e génération de centrale d’épuration. Nous n’avons plus aucun résidu, l’eau est 100% pure. Nous avons posé des panneaux solaires qui diminuent de 6% notre facture d’électricité.»

Marc Ehrlich, VIPA Group/Retripa, en campagne pour les fédérales (PLR/VD): «Nous faisons 100% de nos affaires avec des objets dont 100% des gens veulent se débarrasser. Travailler dans six cantons, c’est plus compliqué que six continents.»

Darius Golchan, acau architecture SA: «Il fallait loger 370 familles de migrants pour dix ans. Nous avons sensibilisé le maître d’œuvre aux questions environnementales. Le recyclage s’est imposé avec la filière locale de bois de Genève. Jusqu’ici, ce bois partait en centrale de chauffe.» Axelle Marchon, Enoki Sàrl: «Suite à un concours, notre bureau interdisciplinaire est né d’une vision commune: villes durables, agréables à vivre et circulaire. Nous visons à créer la pièce manquante dans les villes en transition. Par une construction modulaire, déplaçable et écologique.»

L’éolien mais pas chez moi!

La parole fut redonnée aux politiques. A commencer par Jacqueline de Quattro, conseillère d’Etat, cheffe du DTE (VD): «En politique, nous rencontrons même des obstacles en proposant de nouvelles énergies. Quant à la mise en œuvre, bonjour les dégâts. L’éolien oui, mais pas chez moi! (…) Les décisions politiques prennent du temps. Je travaille beaucoup avec les associations, comme sur l’aménagement du territoire. Chaque changement nous apporte des défis qui nous font aller plus loin. L’environnement et la durabilité en font partie. (…) Nous avons besoin de contact avec vous les PME. Vous avez besoin de meilleures conditions-cadres pour aller de l’avant.»

Environnement, droite ou gauche?

Puis un dernier podium rassembla divers parlementaires sur les questions d’environnement. Dont Frédéric Borloz (PLR/VD), sur une vague verte: «Je ne suis pas certain que les manifestations aient changé les choses. Mais dans les exécutifs cantonaux et communaux, c’est plus facile d’agir qu’au niveau parlementaire. Puis André Berdoz (vice-président usam, entrepreneur): «Nous avons des possibilités extraordinaires d’inciter les entreprises. En produisant et en consommant sur place, cela coûte beaucoup moins cher.»

Une vague de bureaucrates

Robert Cramer (CE Verts/Genève), fut interrogé sur une autre vague de tracasseries administratives au niveau des réglementations cantonales et communales. «C’est plutôt une question d’état d’esprit. Les bonnes collaborations existent. Tout dépend de la qualité de vos interlocuteurs. Plutôt que d’opposition des politiques, je vois plutôt celles de la bureaucratie. Quand on parle entre spécialistes qui connaissent l’environnement, on voit toutes les pistes. Mais face aux politiques qui essaient parfois maladroitement de traduire les questions environnementales en droite et gauche, je dirais qu’il s’agit d’abord de trouver des solutions qui conviennent à tout le monde.»

François Othenin-Girard

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